Dimanche 3 mars 2019, les partisans de la nouvelle Algérie se sont réunis un peu partout en France. À Toulouse, place du Capitole, ils ont protesté contre un nouveau mandat d’Abdelaziz Bouteflika, l’actuel président algérien, qui a prévu de se représenter, mais aussi d’organiser une élection anticipée d’ici un an. Une protestation derrière laquelle se cache une volonté de changement profond.

À minuit ce dimanche, les candidatures à l’élection présidentielle algérienne seront closes. Bien sûr, tous les regards sont tournés vers la Suisse, où le président en fonction, Abdelaziz Bouteflika, est hospitalisé. Six ans qu’il ne s’est pas adressé aux Algériens suite à son accident vasculaire cérébral. Ses apparitions publiques sont très limitées. Partout les partisans d’une Algérie « libre et démocratique » se lèvent contre la candidature du président en poste.

300 à 350 personnes se sont données rendez-vous sur la place emblématique de la Ville rose. La manifestation a débuté vers quinze heures pour se terminer en début de soirée. Dans une ambiance bon enfant, les défenseurs de la démocratie ont scandé des slogans mi-arabes, mi-français. Des chants ont aussi été repris comme l’hymne algérien.

Rassemblement place du Capitole, des Gilets jaunes sont présents, photo : TP

C’est surtout le moyen de se retrouver pour échanger sur l’Algérie, tout en imaginant un nouvel État. En ce sens, des petits débats prennent place. Au centre du rassemblement, les femmes et les hommes se sont assis côte à côte pour échanger et parlementer sur le futur scrutin, sur l’état de santé d’Abdelaziz Bouteflika, mais aussi sur leur manière de composer une nouvelle Algérie. Quelques votes ont eu lieu au milieu des drapeaux verts et blancs. Chacun exprime son point de vue au mégaphone. Un homme d’une trentaine d’années, polo gris et lunettes de soleil, prend la parole :

« On veut de la démocratie. Aujourd’hui le pouvoir est concentré dans les mains d’une même famille », explique le manifestant, applaudi.

Au final, les adhérents à l’Algérie libre et démocratique souhaitent du changement. 25 ans que le Front de Libération Nationale (FLN) est au pouvoir. Pour Ahmed, la situation a assez duré : « On en a marre, c’est toujours les mêmes qui gouvernent. D’abord le président, puis son frère lorsqu’il était malade, maintenant le ministre des transports, et puis quoi ? »

Une étrange fusion

Dans la foule, majoritairement des hommes. Pourtant les partisans d’une nouvelle Algérie sont divers. Bien sûr, des Toulousains originaires d’Algérie sont présents, ainsi que d’anciens vacanciers, des médecins, des personnes y ayant travaillé etc., mais surtout, des amoureux du suffrage universel.

Peu avant seize heures, une vague de Gilets jaunes arrive par la rue Lafayette. Le groupe d’une cinquantaine de marcheurs, surtout des femmes, se joint au rassemblement de « l’Algérie sans Bouteflika ».

« Ce n’était pas du tout prévu. Au final, on ne soutient pas la ré-élection d’Abdelaziz Bouteflika donc on peut parler. Je les soutiens » argue Coline, vêtue de son gilet jaune et ses lunettes de soleil.

Les Gilets jaunes étaient en train de marcher lorsqu’ils sont tombés sur le rassemblement citoyen organisé place du Capitole. Pas de CRS, ni de policiers, simplement une compréhension entre manifestants et partisans. Les Gilets jaunes s’essaient eux aussi à scander les slogans arabes. Traduits, on peut notamment entendre :

« Abdelaziz Bouteflika dehors ! Vive l’Algérie ! »

À y regarder de plus près, pourfendeurs de la « vieille Algérie » et Gilets jaunes auraient pratiquement les mêmes aspirations.

En marge de ce rassemblement, Abdelaziz Bouteflika a annoncé dans une lettre ce dimanche sa candidature pour un cinquième mandat, malgré les appels de la rue pour qu’il y renonce. Le président octogénaire a également promis une élection anticipée d’ici un an à laquelle il ne participerait pas.