Le stade Daniel Faucher à Toulouse – Crédits : Tiphaine de Saint Viance
Annoncé le 6 février, le montant final de l’enveloppe dédiée au monde sportif pour 2025 est réduit de 108 millions d’euros par rapport à 2024. En Occitanie, les clubs et sportifs de haut niveau regrettent cette décision.
C’est une situation qui touche toute la France. Dans le contexte où le déficit public français doit être ramené à 5,4% du PIB, le budget alloué au ministère des Sports pour 2025 est le plus petit depuis 2021 selon France Info. Pour Benjamin Robert, athlète toulousain spécialiste du 800 mètres et deux fois olympien à Tokyo et à Paris, cette baisse est un coup de massue comme pour de nombreux sportifs français : « Je ne pensais pas que c’était si peu le budget du sport en France. Ce n’est pas encourageant pour le sport français et les jeunes. »
Michel Coloma, directeur général des Dauphins du TOEC, emblématique club de natation dont Léon Marchand est originaire, dénonce cette décision : « On a cru comprendre qu’il fallait que l’État dans sa globalité fasse des économies, c’est compréhensible. Après c’est moins compréhensible quand on sait que l’impact des Jeux a fait monter le PIB les trois mois qui ont suivi. » Selon la Banque de France, les Jeux de Paris ont provoqué une hausse de 0,25% du PIB au troisième trimestre 2024.
Une baisse des subventions
Dès la fin d’année, la mairie toulousaine prévoyait de faire des économies. Sacha Briand, adjoint au maire de Toulouse chargé des finances, annonçait le 28 novembre une baisse de 20% des subventions pour tous les clubs de sport, professionnels et amateurs.
Selon Mathieu Puch, directeur du club de judo Avenir 31, ce sont entre 30 et 40% des projets qui n’aboutissent pas ou qui aboutiront avec des retard conséquents, allant jusqu’à 5 ans. Dans ce club amateur qui compte 450 adhérents, les filières de haut niveau en subissent les conséquences. « On a des sportifs de haut niveau qui font de l’international et qui s’entraînent en France. Mais forcément si on est obligé de casser le budget, c’est là. » explique le directeur.
Les clubs essayent de contrebalancer avec l’augmentation du nombre d’adhérents. D’après le directeur des Dauphins du TOEC, l’impact médiatique de Léon Marchand, et plus généralement des Jeux de Paris, ont engendré une augmentation de 20 à 30% des licenciés depuis la rentrée. Selon Michel Coloma, « la mairie a joué le jeu » en leur accordant plus de créneaux à la piscine, afin qu’ils puissent organiser d’autres activités comme des stages pour contrebalancer le manque à gagner. Pour ce club de natation qui possède une forte renommée, l’impact sur les filières de haut niveau est relatif. Toutefois, il explique que les nageurs n’iront pas à l’étranger pour leur stage et qu’ils partiront en compétition plus près de la région cette année.
Lire aussi : Austérité – 6 mois après les Jeux de Paris, le sport retrouve une place de parent pauvre des finances publiques
Les subventions délivrées par la Haute-Garonne et l’Occitanie diminuent elles aussi. Mathieu Puch, qui a pour projet d’ouvrir un grand complexe sportif dédié au judo à Toulouse, est inquiet : « Avant, on pouvait monter des gros dossiers pour des développements au niveau départemental et régional. Là ça devient un peu plus compliqué. On nous bloque des projets sociaux et sportifs. » Autre conséquence de cette baisse de revenus, une précarisation des emplois : « Aujourd’hui quand on a des salariés à plein-temps comme chez nous, c’est compliqué si les budgets baissent. On ne pourra plus les prendre. » regrette-t-il.
Des départs à l’étranger
La précarisation des emplois et le manque d’infrastructures impactent directement les athlètes de haut niveau. C’est le cas de Benjamin Robert, parti s’entraîner à Manchester après les Jeux de Paris, notamment car son entraîneur travaillait seulement à mi-temps. « À Toulouse, j’avais un kiné et un préparateur mental mais c’était beaucoup plus indépendant. L’entraîneur devait prendre contact avec ces gens-là, ça prenait du temps, comme il n’était pas à plein-temps », explique-t-il.
L’athlète regrette le manque d’infrastructures en athlétisme à Toulouse, autre raison de son départ. « Pour les infrastructures, ce n’est pas génial ce qu’on a en France. Tu fais presque mieux de payer ta salle à Basic Fit (ndlr : salle de sport payante) ou ailleurs, qu’à aller dans le truc adapté pour les sportifs. » Dans son nouveau groupe, dont la britannique Keely Hodgkinson, championne olympique du 800 mètres en titre, fait partie, l’entraîneur est payé par Nike. Une tendance qui se développe de plus en plus, notamment en athlétisme. « Les groupes privés sont à la mode. C’est une marque qui paye le groupe » souligne Benjamin Robert.
Quoi qu’il en soit, tous pointent du doigt l’impact négatif de cette situation sur la santé publique. « Les budgets qu’on gagne là, on les perd sur l’éducation, sur la santé des jeunes, sur le social, quand plus tard il faudra lutter contre la délinquance et contre les problèmes de santé. J’ai du mal à comprendre. » s’interroge Mathieu Puch. Comme Michel Coloma, qui dénonce l’arrêt du dispositif « J’apprends à nager » (des cours de natation gratuits pour les enfants) que les Dauphins du TOEC proposaient.