La « slut walk« , soit littéralement “la marche des salopes” a regroupé plus de 150 personnes, samedi 28 septembre, place du Capitole pour dénoncer le viol et les agressions faites aux femmes. « Univers-cités » les a suivies et a interrogé les membres du comité d’organisation, à la composition exclusivement féminine !

“Avec cette marche, nous affirmons que si être une salope pour la société, c’est s’habiller et se comporter comme nous le souhaitons et occuper l’espace public à toute heure du jour et de la nuit, alors oui ! Nous sommes des salopes”, crie Carole dans son mégaphone. Il est 14 heures, la marche est lancée et les slogans résonnent déjà dans les rues de Toulouse. De la rue Rémusat à la rue d’Alsace, en passant par le boulevard de Strasbourg, les manifestants chantent : “Aux harceleurs, aux violeurs qu’est-ce qu’on leur dit ? non c’est non, range ta bite connard ou prend un coup de d’cutter”, “Du sexe si je veux, quand je veux, comme je veux” ou encore “En jupe, en jean ou en burqa, mon corps n’est qu’à moi”…

©Anaïs Chatellier

“La slut walk, c’est vraiment ce qui m’investit dans le féminisme”, Agathe

Ce mouvement est né au Canada en 2011 lorsqu’un policier de Toronto, invité pour un forum de prévention dans une université, ose conseiller aux femmes “de ne pas s’habiller comme des salopes si elles ne veulent pas être violées”. De quoi faire se retourner Simone de Beauvoir dans sa tombe. Si le féminisme a beaucoup évolué depuis son époque, la slut walk fait partie de ces mouvements que beaucoup considèrent comme une nouvelle vague du féminisme. Pour Vanessa, « Ãªtre féministe aujourd’hui, c’est toujours revendiquer les mêmes droits pour les femmes que pour les hommes dans tous les domaines et dans tous les pays et dénoncer les discriminations et le sexisme”.

Elles s’accordent toutes pour le dire, tant qu’il y aura du sexisme, il y aura des féministes. “Ce qui m’a poussé à participer, c’est de constater que dans nos sociétés aujourd’hui, le viol n’est pas pris au sérieux et les agressions sexuelles non plus. Il y a une très grande stigmatisation sexuelle comme le slut shaming, c’est-à-dire qu’on ne peut pas s’habiller comme on veut quand on est une femme. Si une femme a bu et qu’elle est un peu soûle, on peut abuser d’elle, c’est un peu de sa faute de toute façon”, ironise Lola.

©Anaïs Chatellier

“Le viol n’est pas un fait divers qu’il faut traiter sous l’angle d’un amour passionnel qui a dérapé”, Carole

Carole et Camille travaillent au planning familial et des femmes qui ont été victimes de viol, elles en rencontrent régulièrement. Elles sont 75 000 chaque année, soit une femme toutes les 8 minutes, rappellent-elles. Un chiffre qui paraît aberrant. Si les manifestants ont défilé ce samedi, c’est aussi parce que le viol reste un sujet tabou. “Du sexe, il y en a partout dans nos sociétés, mais dès qu’il faut en parler sérieusement, il n’y a plus personne”, regrette Carole. “On veut surtout démontrer que ce n’est pas un fait divers, un cas isolé. Un viol c’est un phénomène social”, ajoute Camille. Pour ces deux militantes, beaucoup de choses sont à améliorer, notamment par rapport à l’accueil fait aux victimes, à leur traitement par une police non formée, mais aussi par rapport à ces gestes quotidiens qu’elles dénoncent : “un sifflement, une main au cul, des blagues sexistes, il faut faire comprendre aux gens que ça suffit”, s’insurge Carole.

©Anaïs Chatellier

Si la slut walk est surtout féminine, quelques hommes ont participé, à l’instar de Romain : “Le féminisme me parle, je suis contre le sexisme, pour la parité et je pense que c’est important que des hommes participent car ils sont également concernés. En tout cas, plusieurs personnes se sont retournées et avaient l’air de trouver ça bien”. Avec un air étonné ou approbateur, plusieurs passants ont salué la démarche. “C’est un sujet abordable par tous. On verra rarement des gens dire qu’ils sont pour le viol, c’est pour cela qu’on croise souvent des regards de solidarité”, analyse Vanessa. Pour autant, Juliette qui ne fait pas partie du Comité d’organisation se dit déçue par le nombre si peu conséquent de manifestantes. “Je pense qu’il y aurait pu avoir encore plus de communication sur l’événement et pas seulement à travers les réseaux sociaux. J’ai en plus été choquée par quelques réactions comme cette fille qui a crié bandes de salopes, c’est vous qui allez vous faire violer”… Du chemin reste à parcourir et peut être pas uniquement du coté des hommes.