Appelée « loi sur l’autonomie des universités », la loi Pécresse propose aux établissements de se doter d’un nouveau cadre administratif, ainsi que d’une gestion plus libre et moins étatique.

La réforme de l’Université permet aux 85 établissements du pays d’accéder à une certaine autonomie. Sur trois domaines uniquement : le budget, les ressources humaines et la gestion des bâtiments. Dans les textes, l’État ne prévoit donc pas de se désengager complètement. On ne parle pas d’autonomie totale. Par ailleurs, la loi n’oblige pas les universités à adhérer au projet. Elle propose une sorte d’autonomie « à la carte ».
_ Mais ce point dérange. On peut craindre, dès lors, une mise en concurrence des facultés. Une autonomie partielle et choisie serait le spectre d’une éducation à plusieurs vitesses. Les établissements ne fonctionneraient plus sous un régime unique. Certains auraient accès à des financements supplémentaires à ceux alloués par l’État. D’autres pas. Quelques-uns pourront choisir le personnel. D’autres pas. L’idée d’un service public unique d’enseignement supérieur pourrait être remis en cause.
_ Une question revient fréquemment : autonomie budgétaire veut-elle dire liberté pour le montant des frais d’inscription ? Sur ce point l’État assure qu’il ne se désengagera pas. Il reste seul maître à bord et continuera de convenir d’un prix unique.

Moins d’étudiants au Conseil d’administration

Il est prévu que le CA (conseil d’administration) de l’université compte désormais beaucoup moins de participants. Jusqu’à présent, il se compose de 30 à 60 membres, majoritairement répartis entre les professeurs, maîtres de conférences, étudiants et personnels Iatos (Ingénieurs, Administratifs, Techniciens, Ouvriers et [personnel] de Service). En complément, des représentants des collectivités territoriales, des activités économiques ainsi que des personnalités choisies y siègent.
_ Aujourd’hui, la loi prévoit de baisser de 20 à 30 le nombre de membres du CA. L’article 7 [[Article 7
L’article L. 712-3 du code de l’éducation est ainsi rédigé :
« Art. L. 712-3. – I. – Le conseil d’administration comprend de vingt à trente membres ainsi répartis :
« 1° De huit à quatorze représentants des enseignants-chercheurs et des personnels assimilés, des enseignants et des chercheurs, en exercice dans l’établissement, dont la moitié de professeurs des universités et personnels assimilés ;
« 2° Sept ou huit personnalités extérieures à l’établissement ;
« 3° De trois à cinq représentants des étudiants et des personnes bénéficiant de la formation continue inscrits dans l’établissement ;
« 4° Deux ou trois représentants des personnels ingénieurs, administratifs, techniques et des bibliothèques, en exercice dans l’établissement.
« Le nombre de membres du conseil est augmenté d’une unité lorsque le président est choisi hors du conseil d’administration.
« II. – Les personnalités extérieures à l’établissement, membres du conseil d’administration, sont nommées par le président de l’université pour la durée de son mandat. Elles comprennent, par dérogation à l’article L. 719-3, notamment :
« 1° Au moins un chef d’entreprise ou cadre dirigeant d’entreprise ;
« 2° Au moins un autre acteur du monde économique et social ;
« 3° Deux ou trois représentants des collectivités territoriales ou de leurs groupements, dont un du conseil régional, désignés par les collectivités concernées.
« La liste des personnalités extérieures est approuvée par les membres élus du conseil d’administration à l’exclusion des représentants des collectivités territoriales qui sont désignés par celles-ci. Cela lui permettra d’être plus efficace et plus proche de la société ; mais pourrait poser problème dans le sens où les différentes composantes de l’université seront moins représentées.
]] les répartit ainsi : la moitié se compose des représentants des enseignants-chercheurs en activité (8 à 14), 2 à 3 sont des représentants des Iatos. 7 à 8 personnalités extérieures à l’établissement devront être nommées. Les étudiants n’ont plus voix qu’à travers 3 à 5 membres. En voulant rendre le collège plus proche de la société civile, les acteurs principaux de l’université, notamment les étudiants, deviennent sous-représentés. Certains s’inquiètent de ne plus voir les principaux acteurs du système au cœur du collège décisionnel. Par ailleurs, l’Université passerait-elle d’une dépendance étatique à une dépendance « entreprenariale » ?

Étude du dossier des futurs étudiants

Les bacheliers devront dès la rentrée 2008-2009 faire une demande de pré-inscription auprès des universités qui les intéressent [[Article 20 – « Tout candidat est libre de s’inscrire dans l’établissement de son choix, sous réserve d’avoir, au préalable, sollicité une pré-inscription lui permettant de bénéficier du dispositif d’information et d’orientation dudit établissement, qui doit être établi en concertation avec les lycées. » « Les établissements dispensant des formations sanctionnées par un diplôme d’études supérieures rendent publiques des statistiques comportant des indicateurs de réussite aux examens et aux diplômes, de poursuite d’études et d’insertion professionnelle des étudiants ».]] En 2007, plus d’une soixantaine d’établissements ont déjà testé la mesure. Le dossier du futur étudiant sera examiné par les universités d’accueil, en collaboration avec le lycée d’origine. Les facultés pourront émettre un avis positif ou négatif. Cela peut être perçu comme une pré-sélection. Il ne s’agit pourtant que d’un avis. Au final, l’étudiant reste maître de la décision, mais il le fera en connaissance de cause.
_ L’objectif est ici d’éviter les mauvaises orientations. Chaque année trop d’étudiants ratent leurs examens, voire abandonnent leurs études, le niveau étant trop élevé ou les cours ne correspondant pas à leurs attentes. Les universités seront dès lors obligées de rendre publiques leurs taux de réussite aux examens et l’insertion de leurs étudiants afin de rendre compte de leur efficacité.

La loi sur l’autonomie des universités soulève donc des questions, même si aucun désengagement de l’État au profit d’un système plus « marchand » n’est clairement annoncé par le Gouvernement. Aux universités de décider de leur devenir.