Jeudi 18 mars, Airbus a annoncé le début d’une étude à Toulouse pour évaluer les effets de vols réalisés avec 100% de carburant durable. Une alternative prometteuse pour le futur de l’aviation mais qui reste largement minoritaire.

Le « Flygskam », terme suédois pour désigner la « honte de prendre l’avion » est un phénomène qui gagne du terrain. Dans un monde où l’avion est responsable de 5% de toutes émissions de gaz à effet de serre sur Terre, de plus en plus de citoyens se détournent de ce moyen de transport. Déjà secoués par la crise, les industriels de l’aéronautique cherchent donc des solutions pour revenir sur le devant de la scène dans un monde post-COVID. Parmi elles, le carburant durable, ou SAF (sustainable aviation fuel, ou carburant durable d’aviation) pourrait être un moyen de réduire l’impact environnemental des vols.

Une étude pour faire changer les choses

Airbus, le centre de recherche allemand DLR, le motoriste Rolls-Royce et le producteur de carburant durable Neste ont donc annoncé jeudi 18 mars s’être associés pour lancer la première étude d’envergure sur le sujet. Un premier vol 100% au SAF a été réalisé à Toulouse, et de nouveaux tests sont prévus durant le mois d’avril afin de mesurer les émissions de CO2 en vol.

« Cette campagne de tests a deux grands objectifs. Le premier est de préparer la certification de nos avions afin d’utiliser de manière quotidienne 100% de carburant durable. […] Le deuxième […] est de mesurer en vol les différentes émissions des moteurs« , expliquait le responsable du programme des énergies nouvelles d’Airbus, Steven Le Moing, dans une interview pour La Tribune. Une campagne qui sera stoppée cet été avant de reprendre à l’automne, comme l’annonce Airbus dans un communiqué.

Si les SAF possèdent de nombreux avantages, des études comme celle d’Airbus sont nécessaires pour en réduire les limites.

Fabriqués à partir d’huiles recyclées, de graisses animales, de sucres et de résidus végétaux, les SAF sont présentés comme une vraie alternative écologique au kérosène fossile : « en substituant une tonne de kérosène par une tonne de SAF, il est possible de réduire de 80% les émissions de CO2 sur l’ensemble du cycle de vie du produit« , précise Steven Le Moing.

Or, la législation actuelle n’autorise les avions à voler qu’avec 50% de SAF maximum. Leur faible disponibilité et leur coût explique leur utilisation très réduite pour l’instant. Selon l’Association internationale du transport aérien (IATA), la production actuelle de SAF est de 50 millions de litres par an alors que près de 360 milliards de litres de kérosène sont consommés dans le même temps. S’il résulte de l’étude toulousaine que voler avec 100 % de SAF permet de réduire significativement les émissions de gaz à effet de serre, le plafond des 50 % pourrait être reconsidéré, et la production mondiale accélérée.

En attendant l’hydrogène

Cela constituerait une première étape importante dans la décarbonisation de l’aviation, avant peut-être le stade ultime prévu pour 2035 : l’avion à l’hydrogène. Inépuisable, l’hydrogène a comme principal avantage de n’émettre aucune émission, si ce n’est de la vapeur d’eau. Airbus a ainsi présenté en septembre dernier trois prototypes d’avions à l’hydrogène baptisés « ZEROe » pour « zéro émissions ».

Concrètement, il est prévu que l’hydrogène soit injecté dans les turbines pour y brûler comme le kérosène. Pour cela, il devra être refroidit à – 250 °C pour être transporté à l’état liquide. Des contraintes techniques importantes, qui expliquent pourquoi Airbus ne prévoit pas de pouvoir voler à l’hydrogène avant 2035. Car c’est tout l’écosystème de l’aéronautique qui devra s’adapter pour réussir ce pari.

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Ces trois prototypes d’avions alimentés à l’hydrogène imaginés par Airbus pourraient bien être les avions du futur. La partie arrière sans hublots est dédiée au stockage de l’hydrogène, quatre fois plus volumineux que le kérosène.

L’étude menée par Airbus et ses partenaires à Toulouse porte donc une certaine responsabilité sur ses épaules. Car en attendant l’hydrogène, les SAF représentent bien la principale alternative au kérosène fossile. Et quand la pandémie aura quitté la une de l’actualité, « les gens voudront à nouveau se connecter, mais de manière durable », estime Simon Burr, le directeur du développement des produits et de la technologie chez Rolls-Royce Civil Aerospace pour 20 Minutes.

Photo à la une : Un avion Airbus A380. Crédits photo : Wikipédia Commons, Axel Bernet, Airbus.