Mercredi 27 février 2019, la librairie de la Renaissance et le Parti communiste (PCF) ont co-organisé une soirée de soutien au journal l’Humanité. C’est le deuxième événement national du genre après une première initiative parisienne. Le quotidien national fondé par le socialiste toulousain Jean Jaurès a été placé en redressement judiciaire le 7 février dernier.
De Pierre Lacaze (PCF) à Claude Raynal, sénateur PS, en passant par Nadia Pellefigue, fondatrice du mouvement Une nouvelle énergie et élue PS, diverses sensibilités de gauche étaient réunies ce mercredi dans la salle comble de la librairie de la Renaissance. Pour le président de la section PCF de Haute-Garonne, Pierre Lacaze, pas question de divisions politiques, en cette soirée, mais d’union pour sauver le quotidien. L’Humanité, en grandes difficultés financières depuis quelques années, a lancé un appel à la mobilisation de ses lecteurs ce 7 février après avoir été placé en redressement judiciaire avec poursuite d’activité.
1,5 million d’euros récoltés en moins d’un mois
« Si tout le monde dans la salle donne 50 euros, nous pourrons remettre une enveloppe de 12 000 euros à Patrick Apel-Muller [directeur de la rédaction de l’Humanité] » annonçait un des organisateurs dès le début de la soirée.
Quelques retraités ont souri à l’annonce du montant de 50 euros mais les 5 000 euros débloqués par la section Haute-Garonne du PS pourraient aider à atteindre ce montant.
Soirée de soutien au quotidien l’#humanité à la librairie #renaissance #31 #Toulouse pic.twitter.com/crHK8BEtD4
— Juliette Barot (@Juliette_Barot) 27 février 2019
Depuis le 7 janvier, l’Humanité a récolté 1,5 million d’euros et gagné 2 000 abonnés supplémentaires. À Paris, la première soirée de soutien de vendredi dernier a réuni 4 000 personnes, souligne Patrick Apel-Muller, qui a fait le déplacement spécialement pour cet événement.
Une « union sacrée » pour sauver le pluralisme ?
La mobilisation pour sauver le quotidien jauréssien semble dépasser les clivages politiques habituels. Les personnalités politiques présentes pour afficher leur soutien venaient de partis engagés séparément dans la campagne pour les prochaines élections européennes : le Parti socialiste, Génération.s, le PCF, EELV ou encore La France insoumise. Pourtant, les mots qui sont revenus dans les prises de parole pour souligner l’importance de l’Humanité étaient souvent les mêmes : pluralisme, indépendance de la presse, combat.
Historiens ou simples lecteurs de l’Humanité prennent la parole pour évoquer ces combats qui ont construits la réputation du quotidien : contre la guerre, notamment la Première Guerre mondiale et la guerre d’Algérie, ou plus récemment contre les violences policières.
«Ce legs, nous voulons le mettre à disposition de tous les humanistes » explique son directeur.
À droite aussi, les politiques se mobilisent, au nom de la liberté d’expression et de la démocratie. Des représentants de la majorité municipale de Jean-Luc Moudenc (LR) ont annoncé leur soutien. À l’échelle nationale, des députés LR et LREM ont même donné des fonds à la souscription exceptionnelle actuellement en cours.
Une indépendance financière difficile à assurer
Carole Delga, présidente socialiste de la région Occitanie, ne pouvant être présente, a repris dans un communiqué les mots du premier éditorial de Jean Jaurès.
« Faire vivre un grand journal sans qu’il ne soit à la merci d’autres groupes d’affaires est un problème difficile mais non pas insoluble » disait le fondateur en 1904.
Le directeur de la rédaction rappelle à ce sujet que le seul autre quotidien national « indépendant du CAC 40 » en France est La Croix, le journal du groupe catholique Bayard. Xavier Neil, le patron de Free possède Le Monde, Bernard Arnault a racheté et épongé les 80 millions d’euros de dette du Parisien et l’Express a été vendu pour un euro symbolique. Cette dépendance majoritaire s’explique selon Patrick Apel-Muller par les difficultés financières que rencontrent la presse française. Le Canard enchaîné fait figure d’exception avec son modèle unique fondé seulement sur l’abonnement et l’achat en kiosques, «sans aucune publicité» souligne un jeune homme dans la salle.