Après plus d’un siècle, la CGT est sommée par la mairie de Toulouse de quitter la Bourse du Travail à Saint-Sernin. Un lieu historique pourtant inauguré par Jean Jaurès.

Mercredi 11 mars, Sacha Briand, adjoint du maire aux finances, a reçu des représentants d’organisations syndicales toulousaines. La mairie de Toulouse, face à la baisse des dotations de l’Etat, entend stopper la mise à disposition gratuite de locaux aux unions syndicales départementales et régionales. Elle estime que ces dépenses ne relèvent plus de sa compétence depuis 2010 et la fin des conventions tripartites avec le Conseil Général et le Conseil Régional, co-financeurs.

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Le 16 février dernier, la mairie notifie donc par courrier à la CGT qu’elle doit quitter les locaux qu’elle occupe au 19, place Saint-Sernin avant le 30 juin 2015, si elle ne peut en payer le loyer. L’organisation utilise pourtant gratuitement ce lieu, la Bourse du Travail, depuis 1895.

Un bâtiment historique

La Bourse du Travail, nous en avons hérité, elle est à nous, et nous comptons bien la transmettre”, s’indigne Cédric Caubère, secrétaire général de l’Union Départementale CGT.

En effet, le syndicat y officie depuis plus d’un siècle. Anciennement située rue des Couteliers, la Bourse du Travail est inaugurée place Saint-Sernin le 17 juillet 1892 en présence du maire Charles de Fittes et de Jean Jaurès, alors conseiller municipal de Toulouse. “Ce sont des ouvriers syndiqués qui ont fait les travaux à l’époque”, raconte Cédric Caubère.

***“La Bourse du Travail est un refuge pour les salariés”

Cet endroit est emblématique de l’histoire sociale de la ville”, explique-t-il. Pour lui, hors de question de partir. Il évoque le 14 juillet 1958, lorsque des parachutistes pour l’Algérie française avaient lancé un assaut à la Bourse du Travail et avaient été repoussés par les militants armés de pavés et de cocktails Molotov. “Il n’y a pas de raison que l’on se fasse expulser aujourd’hui plus qu’hier”, conclut Cédric Caubère.

Outre l’union départementale CGT, la Bourse du Travail abrite la radio Mon Pais et également l’Institut départemental d’histoire sociale, qui détient des archives datant de 1890.

Quand les Toulousains ont un problème concernant leur emploi, ils viennent à la Bourse du Travail. Ils nous sont même envoyés par les services de l’Etat. C’est un refuge pour les salariés”, explique le syndicaliste. Un lieu d’accueil historique donc, que les syndicalistes entendent bien conserver.

Un bras de fer politique

Le maire de Toulouse, au moment de la réunion du 11 mars, il était à Cannes au salon de l’immobilier”, ironise Cédric Caubère. Selon lui, la mairie pourrait vouloir récupérer la Bourse du Travail dans le cadre de la rénovation du quartier de Saint-Sernin. Il pointe du doigt une “démarche politicienne pendant la période électorale”, “une offensive contre les locaux syndicaux”.

La Bourse du Travail héberge en effet toutes les branches CGT professionnelles. Une cohabitation des secteurs qui est fondamentale pour le représentant. Fermer la Bourse du Travail, ce serait éparpiller toutes ces organisations. “La mairie veut nous empêcher de nous organiser, de construire des mobilisations de masse autour de revendications interprofessionnelles comme la sécurité sociale ou le salaire minimum”, dénonce Cédric Caubère.

La CGT entend donc défendre fermement sa place. Une manifestation sera organisée à l’occasion du prochain conseil municipal, le 10 avril. “Nous réclamons une réunion en présence de tous les acteurs du dossier, les organisations syndicales et les quatre collectivités concernées [la mairie, la métropole, la Région et le Conseil départemental, ndlr]”. Une proposition pour l’instant rejetée par la municipalité.