A l’occasion des Assises du journalisme qui se sont déroulées au mois d’octobre à Metz, les membres de la rédaction d' »Univers-Cités » ont fait une découverte étonnante. La préfecture de la Moselle est surnommée la Ville Rose, tout comme Toulouse. Florian Cazzola et Pierre Cornu vous emmènent à la découverte de cette cité envoûtante. Bon voyage !
En ce dimanche après-midi d’octobre, le soleil radieux inonde les terrasses des bords de Garonne. Le Toulousain lézarde et profite de ce bout d’été qui s’attarde sur la ville rose. L’épicurisme au sens vrai du terme semble rejaillir : sourire, lunettes de soleil, rires, bon temps. Toulouse profite !
Pourtant, point de sourire sur nos visages. Une pensée nous trouble. Quitter ce coin de paradis pour prendre la direction de la Moselle dans quelques jours. Il faut bien dire que le Nord-Est de la France, pour nous gens du Sud, reste une sorte de mythe, une région que l’on ne connaît que de nom. Bien sur, quelques clichés nous viennent à l’esprit : la grisaille, les friches industrielles, le froid, l’austérité. De quoi contraster avec l’image que nous rend Toulouse en cette fin d’après midi.
Le jour J, c’est la valise remplie de pulls et de chaussettes de laine que nous nous embarquons dans le train qui nous amène à Metz. Rapidement la douceur toulousaine laisse place à la pluie lors de notre changement à Paris. “Le Sud” de Nino Ferrer nous trotte dans la tête, laconique. Et si l’enfer du Nord existait bel et bien ?
Premiers pas, premiers émois
Quand le train stoppe enfin en gare de Metz-ville, nous sommes fin prêts au choc thermique. Mais surprise, nous sommes accueillis par un temps clément. Le réchauffement climatique se répercute même en Lorraine ! Intrigués, nous découvrons ensuite certainement l’une des plus belles gares de France. D’un style gothique moyen-âgeux, elle frappe par la majestuosité de sa structure.
Un détail nous saute aux yeux. La couleur de la pierre tire fortement vers le rose sombre. Nous ne sommes donc pas totalement dépaysés. Mais lorsqu’un bus entièrement rose nous passe devant, le doute n’est plus possible. Metz revendique également le fait d’être une “ville rose”. Nous nous lançons donc à la découverte de cette “Toulouse du Nord”.
Armés d’un appareil photo et d’un carnet de notes, nous commençons notre ballade messine par le quartier Impérial. Et c’est le terme. Construite au début du XXe siècle, dans un temps où la Lorraine était annexée par les Allemands, l’avenue Foch abrite certainement parmi les plus belles demeures de la “Nouvelle-Ville” (voir photo ci-dessous).
La longer est un plaisir de tous les instants. On ne sait plus où donner de la tête tant les bâtiments sont nombreux : ancienne Poste Centrale, Hôtel des Mines, place du Roi-Georges, … Vous pourrez admirer toutes ces merveilles architecturales en vous baladant entre les deux voies de circulation, depuis un jardin fleuri improbable qui vous accompagnera jusqu’à la Tour Camoufle. Construit au XVe siècle, cet édifice aujourd’hui classé “monument historique” avait une fonction défensive. Bien que les remparts alentours aient été détruits depuis, on peut encore observer des impacts de boulets de canon, héritage du siège mené par Charles Quint.
A l’issue de ce quartier néo-classique, nous tombons nez à nez avec la porte des Allemands. Certainement un des plus beaux édifices de la ville. Véritable porte-forteresse dotée de tours, de créneaux et de mâchicoulis, elle doit son nom aux chevaliers teutoniques qui avaient fondé un hospice dans une rue adjacente. Détruite à plusieurs reprises mais réaménagée à chaque fois, cette citadelle, autrefois rempart messin contre les ennemis extérieurs, éblouit par son architecture inédite, à la fois baroque, gothique et moderne.
On peut s’y balader et la visiter (gratuitement) tout en profitant d’une exposition permanente qui retrace les dernières heures de déportés pendant la Seconde Guerre Mondiale.
Une ville chargée d’histoire
Les origines de Metz sont très anciennes puisque la ville était un oppidum appartenant aux Médiomatriques, une tribu celtique qui allait donner son nom à Metz. Conquise par Jules César, elle connaîtra bien plus tard la visite d’un certain Attila et de ses Huns. Reprise par les Francs de Clovis, elle deviendra une des villes majeures de la Francie puis du Saint Empire Romain Germanique. Au Moyen Age, profitant du dynamisme du Nord de l’Europe, la ville s’enrichit et s’enorgueillit de son statut de ville libre. En effet, du XIIe au XVIe siècle, Metz sera une république oligarchique jusqu’à ce qu’elle soit annexée au Royaume de France en 1552. Dès lors, elle revêt une importance stratégique pour la France face au protestantisme du Nord de l’Europe puis face à l’empire allemand.
Pourtant, après la défaite de 1870, la ville tombe aux mains des Allemands qui annexent l’Alsace-Lorraine à leur empire. Les nouveaux maîtres de la Moselle amènent avec eux le savoir- faire industriel et développent cette activité dans la région. Ils entament aussi une politique d’embellissement de la ville avec la construction de la gare actuelle, du quartier impérial et de nombreux autres bâtiments de la ville. Ayant réintégré la France après la victoire contre l’Allemagne de 1918, Metz redeviendra allemande quatre années durant, de 1940 à 1944, intégrée au sein du IIIe Reich comme toute l’Alsace-Lorraine.
L’émerveillement face au folklore messin
Prendre une ou deux heures pour flâner dans le centre-ville, se laisser entraîner dans les petites ruelles, aller de placettes en placettes est un véritable enchantement pour le rêveur. Derrière la place de la République, c’est un quartier dynamique, où se mêlent artisans régionaux et cafés créant une ambiance tout à fait atypique. Se perdre dans cette partie dans la ville à la nuit tombée est un plaisir de tous les instants. Les lumières s’allument et le spectacle est de taille. D’une boucherie artisanale, vieille de trois générations à un relieur de livre, c’est en allant de surprise en surprise que nous avons déambulé dans ce centre-ville très animé. A côté des petits stands de gourmandises régionales, des échoppes proposent toutes sortes de produits régionaux certifiés authentiques.
Mais le plus envoûtant reste l’atmosphère de ce quartier. Aux notes médiévales que dégagent l’architecture, on rencontre les vrais Messins qui, après une journée de travail, aiment à venir boire une bonne bière dans leurs bistrots préférés. L’occasion de faire de belles rencontres, car les habitants de cette ville sont extrêmement chaleureux et seront ravis de faire connaissance autour d’une pinte et d’une flammekueche. L’occasion également de se frotter à l’accent lorrain ! Bref, ce centre-ville en fin de journée, avec en toile de fond la cathédrale Saint-Etienne illuminée est notre véritable coup de cœur !
Comment parler de Metz sans évoquer sa cathédrale située en face des bâtiments néo-classiques de la Mairie et de l’office du tourisme ? Sublime, majestueuse, gigantesque, incroyable, les qualificatifs nous manquent pour décrire ce à quoi nous faisons face. Longue de 136 mètres, haute de 80 mètres, la cathédrale Saint-Etienne est unique. Nos poils se hérissent une fois passé ses portes imposantes. “La lanterne du bon Dieu”, comme la surnomme les Lorrains, est non seulement la cathédrale de France ayant la plus grande surface vitrée, mais elle est également celle qui dispose des plus grands vitraux d’Europe.
Et si vous êtes chanceux, vous pourrez accéder à la crypte, située sous l’autel. En ce qui nous concerne, nous pressons à présent le pas vers d’autres lieux. Et pour cause, nous avons faim. Direction alors le marché couvert de la ville situé à deux pas de la cathédrale pour y découvrir délices et spécialités locales.
Pas de cassoulet, mais plein de bonnes choses !
A l’intérieur de ce marché, nous nous intéressons aux spécificités culinaires de Metz et de la Lorraine auprès des producteurs locaux. En premier lieu, les incontournables quiche et potée lorraine. En vente dans pratiquement tous les restaurants et brasseries de la ville, elles sont les fiertés des Lorrains.
Pour les marmitons en herbe, voici le lien d’un site internet où la recette de la “meilleure” quiche lorraine est bien expliquée : http://www.quiche-lorraine.com
Moins connue, la mirabelle est le fruit emblématique de la région. Elle est ainsi utilisée dans toutes sortes de plats sucrés (tarte, confitures), mais aussi salés. A notre grand étonnement, nous en trouvons dans des fromages et des charcuteries. Et entre deux stands de viande, nous découvrons Patrick avec sa fameuse moustache, son bonnet rouge et sa boutique de “Soupes à Soup’s”. Lui sa spécialité, c’est les soupes. Et c’est ainsi depuis de longues années. De la “Classique” à la “Dubarry” en passant par “La Triplette de Metz-ville”, il y en a pour tous les goûts et c’est d’ailleurs pour ça que Patrick Grumberg est connu dans toute la région.
Autre spécialité régionale, le fuseau lorrain. Nous nous arrêtons donc à une des boucheries de ce marché centenaire (il a ouvert ses portes en 1831) et questionnons la vendeuse sur ce qu’est le fuseau. Réponse immédiate et pour le moins intrigante : “C’est comme de la mortadelle, mais fumée”. En fait, un long saucisson qui a la particularité d’être fumé, ce qui lui donne un goût tout à fait exquis.
La majorité des restaurants de la ville propose les plats typiques de l’Est de la France comme la flammekueche, la choucroute ou encore les bretzels.
Les vins de Moselle sont réputés pour exister depuis le IIIe siècle. Il s’agit de vins tranquilles blancs, rouges ou rosés, qualifiés couramment de « secs ». La région est aussi productrice de Schnapps, créé à partir de la mirabelle ou de quetsche.
Les fins gourmets pourront également déguster un plat de qualité ou une « mousse » tout aussi bonne dans une des quelques brasseries et pubs ouverts place Saint-Louis. Vous profiterez alors du cadre de l’ancienne place de l’époque médiévale qui compte plus d’une soixantaine d’arcades et est entourée de maisons aux balcons de style Renaissance.
La place de la République, située à quelques foulées du marché couvert, grande place pavée qui a accueilli l’exposition universelle de 1861, propose, en traversant le mur d’eau situé dans le fond, des repose-dos en pierre. Idéal pour une sieste digestive.
Ce qu’il faut savoir sur Metz
Aujourd’hui la ville de Metz intra-muros compte un peu moins de 120 000 habitants. En un siècle, la population messine a doublé grâce notamment à l’âge d’or de l’industrie lorraine. La ville a également été un grand centre de garnison tout au long du XXe siècle de par sa position stratégique face à l’Allemagne. Mais avec la réforme de la carte militaire de 2008, beaucoup de régiments ont quitté la ville.
Face à la crise industrielle, la ville de Metz s’est faite la championne des technologies de l’information et de la communication grâce à son technopôle et son label “ville internet”. La ville mise aussi sur son patrimoine historique pour développer le tourisme. De plus, de nombreux espaces verts, des espaces piétons ont été aménagés, afin de rendre la ville plus séduisante aux visiteurs. La ville a été récompensée par un Grand Prix et dispose des quatre fleurs au palmarès 2007 du concours des villes et villages fleuris. Le New York Times a classé Metz à la 39e place des destinations à visiter en 2009.
Politiquement, la ville était traditionnellement de droite. Mais en 2008 et à nouveau l’an dernier, le socialiste Dominique Gros a été élu maire de Metz. Fait atypique, depuis la fin de la guerre, seulement trois maires se sont succédés à la tête de la commune.
Ne vous y trompez pas, il fait bon vivre à Metz
En continuant notre balade, nous avons l’agréable surprise d’arriver dans un grand parc, à deux pas de l’Arsenal, qui jouxte la Moselle canalisée et son port de plaisance. S’y promener, longer le ponton face aux cygnes et aux péniches qui accostent est des plus agréables. A ne pas en douter, Metz est une ville verte et la municipalité tient à sa réputation.
Car avec ses 570 hectares d’espaces verts, la préfecture de la Moselle est une des villes les plus “vertes” de notre hexagone. Au loin, on aperçoit des gradins et nos doutes disparaissent rapidement lorsque nous consultons notre carte touristique.
Il s’agit bel et bien du mythique stade Saint-Symphorien qui accueille les rencontres footballistiques du FC Metz depuis les années vingt. Passionnés de sport, nous nous renseignons alors et nous rendons compte que le club de ballon rond de la ville n’est pas le seul à évoluer au plus haut niveau. Le handball féminin, le canoë-kayak et l’aviron sont également des sports réputés en Lorraine. Et nous qui pensions que Metz était une ville des plus banales et ennuyeuses…
Le 12 mai 2010, Metz a connu une petite révolution culturelle avec l’inauguration du centre Pompidou-Metz, une extension du célèbre musée parisien du même nom. Magnifique bâtiment au design très contemporain, il est le porte drapeau de la culture de la préfecture de la Lorraine. De nombreuses expositions et conférences s’y déroulent tout au long de l’année. A côté de ce géant culturel, on retrouve d’autres musées et lieux d’expositions en centre-ville comme le musée de la Cour d’Or ou la chapelle Saint-Pierre-aux-Nonnains. Metz compte aussi dans ses murs le plus ancien opéra-théâtre encore en activité de France (depuis le XVIIIe siècle).
A côté de ces expositions permanentes, la vie de la cité est aussi ponctuée par des évènements tout au long de l’année. Entre autres, le Ciné Klap, festival de courts-métrages européens et les Montgolfiades, l’une des plus prestigieuses manifestations aérostatiques en France. Au mois de décembre, c’est un véritable enchantement de parcourir le marché de Noël qui, en termes de fréquentation, est le deuxième de France après Strasbourg. De même nous recommandons fortement le défilé de la Saint-Nicolas le premier samedi du mois : une marche dans Metz illuminée, à la tombée de la nuit, pour partir à la découverte du patrimoine architectural de la ville.
Nos coups de cœur
- Le wifi disponible dans tout le centre-ville en accès gratuit et illimité
- La propreté des rues
- Le «Saint-Vivian’s», qui retransmet les matchs des Rouges et Noirs du Stade Toulousain
- L’atmosphère conviviale de la ville
Loin des yeux, loin du cœur ! Si l’on a jamais vu Metz, on ne peut la juger. Telle est la leçon que cette ville nous a enseignée. Les Messins, le quartier impérial, la cathédrale Saint-Etienne … Tant de souvenirs marquants. Par son aspect historique mais aussi folklorique, nul doute que cette « Toulouse du Nord » saura vous faire chavirer. A condition toutefois d’être chaudement habillés ! Car ne vous y méprenez pas, si nous avons bénéficié d’un temps clément, les hivers sont rudes dans le Nord. Mais les pierres roses de Metz sauront vous réchauffer.
Pierre et Florian
Avec l’aimable participation de Siméon Chamard et Arnaud Roy .
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