Forcés d’user de nouveaux outils numériques pour rester présents sur la scène culturelle, les théâtres, les musées, les cinémas toulousains se réinventent en temps de pandémie. Retour sur une année d’innovations et de tests.

Depuis la non-possibilité d’ouverture des musées, nous avons beaucoup développé notre présence sur les réseaux sociaux”, explique Jason Petit-Jean, le chargé de communication du musée des Abattoirs. Les lieux culturels sont en effet fermés, rouverts puis refermés depuis maintenant un peu plus d’un an. Les cinémas, les musées, les théâtres toulousains ont donc été contraints de se réinventer pour survivre à la crise du covid.
On s’adapte, on crée des nouveaux outils, et puis on continue à communiquer avec le public en montrant que la cinémathèque continue à travailler, à trier ses collections. L’idée est de faire découvrir des choses aux gens vraiment régulièrement dans cette période”, souligne Franck Loiret, le directeur délégué de la cinémathèque de Toulouse. Ghislaine Gemin, chargée de la communication presse pour le musée des Augustins (en travaux jusqu’en 2023), partage cet avis : « On a essayé de mettre en place des choses nouvelles ou alors d’adapter des projets qui étaient déjà existants. Ça se passe soit hors les murs avec un lien direct avec les « visiteurs »,  ou alors en ligne sur le web et sur les réseaux sociaux. »

 

captures d’écran du site internet du musée des Augustins. Le musée propose des activités culturelles en ligne.

 

Dernière connexion avec le public, les outils numériques sont vitaux pour les lieux culturels. « Ils permettent aussi de toucher un public plus éloigné; […] c’est une manière de travailler, d’être présents et d’avoir des choses à proposer”, soutient Franck Loiret, avant de présenter un des nombreux projets numériques de la cinémathèque de Toulouse : “On a créé une lettre info HomeCinémathéque en octobre dernier. L’idée était de poursuivre ce lien avec le public a travers la mise en ligne et la valorisation de choses différentes de ce qu’on fait habituellement. On a pu monter des choses assez insolites, assez originales ; ce qu’on ne peut pas faire dans le cadre d’une programmation de cinémathèque classique.

 

On est en train de réinventer ce qu’on sait faire, notre cœur de métier.

Après un an de travail remanié, les employés culturels voient les points positifs d’une telle période : « C’est transformer un obstacle, une contrainte, en atout. La partie collection de la cinémathèque a tiré son épingle du jeu, et tant mieux ! », s’exclame Franck Loiret. Un gros travail d’adaptation a été nécessaire, mais les outils numériques leurs permettent d’inventer de nouvelles formes de présence artistique et de communication comme “des petits films qu’on met en ligne.
On a un petit peu déplacé nos missions et donc nos priorités vers le web grâce au confinement, mais avec toujours le même objectif de rester en lien avec le public”, se réjouit Ghislaine Gemin. Le musée des Abattoirs, par exemple, innove : “Nous sommes un peu sur une phase de test et de lancement et c’est maintenant quelque chose qui est appelé à être pérennisé. Par exemple les Jeudis des Abattoirs, on est en train de voir si on ne peut pas en filmer quelques-uns des prochaines programmations pour pouvoir ensuite les mettre en ligne. »

 

capture d’écran du site internet de la cinémathèque de Toulouse, qui propose des activités culturelles …à distance.

 

Des visites guidées (et en langue des signes !) en ligne, des conversations et expositions animées par des conférenciers, des “direct sur Instagram, où on présente une oeuvre”, … tant “de nouvelles activités qu’on ne faisait pas avant« , comme le souligne Jason Petit-Jean, et qui font vivre les lieux culturels. “L’idée est de permettre au public de remettre un pied au musée malgré tout. On essaye de faire ça en salle, ça nous permet aussi de montrer un peu le musée en chantier. Les visiteurs aiment bien avoir des aperçus des coulisses”, explique Ghislaine Gemin.

L’outil numérique vient, dans ce contexte particulier, vraiment compenser la fermeture des musées et autres lieux de culture. Le but ultime est de garder un lien avec le public, “parce qu’il faut avouer que le public nous manque. Ce que nous faisons, nous le faisons pour que ce soit vu en vrai, pour que les gens puissent ressentir les œuvres. c’est vrai qu’on essaye de pallier ce manque avec des choses en ligne. », avoue Jason Petit-Jean.

 

« Malgré tout, on continue de travailler »

Pour pallier à ce manque du public, les musées et autres lieux culturels ont également du adapter leur partie  « action éducative culturelle » : “Ca a été un gros travail d’organisation mais ça a pu se faire”, explique Franck Loiret, “ces derniers temps, on a fait beaucoup d’interventions dans les établissements.” Les médiatrices du musée des Augustins se déplacent dans les écoles “pour présenter les collections et animer des ateliers d’arts plastiques.

Le travail dans les musées continue également : “Le musée [des Abattoirs] est totalement prêt à accueillir de nouveaux visiteurs avec de nouvelles propositions !
Le questionnement principal est de savoir si les lieux peuvent prolonger, réadapter ou reporter les expositions souvent prévues depuis plus d’un an. Alors que beaucoup de reports se sont transformés en annulations à la cinémathèque de Toulouse, le musée des Augustins a maintenu sa collaboration avec l’ISDAT, l’Ecole des Beaux-Arts de Toulouse : “Habituellement, cette expo est faite dans le musée. Pour cette édition, on s’adapte et on la propose dans la rue, dans les douves autour du musée.
Autrement, “le traitement des collections, le catalogage, la restauration continuent d’être importants parce que c’est du travail de fond pour pouvoir animer et exposer plus tard”, comme l’accentue Franck Loiret.

Alors que la culture représente 3,2 % de la richesse nationale selon une étude publiée fin 2013 et que son importance pour la société n’est plus un débat, son avenir est incertain. “On croise les doigts, si la situation sanitaire nous le permet, on a programmé une exposition temporaire pour le mois d’octobre, autour du peintre Théodule Ribot”, espère Ghislaine Gemin.

 

Photo à la Une : Le musée des Abattoirs, fermé au public. / Crédit : Pistolero31, CC BY 2.0