Vendre des lunettes sur internet tout en ouvrant des boutiques un peu partout en France, c’est ce que proposent Antonin Chartier et Sacha Bostoni, les fondateurs de l’entreprise Jimmy Fairly. A l’occasion de l’ouverture d’un magasin Jimmy Fairly* à Toulouse, Antonin Chartier, 26 ans, à répondu à nos questions.

« Univers-Cités » : Comment avez-vous eu l’idée de miser sur la vente de lunettes en ligne tout en ouvrant des boutiques ?
Antonin Chartier : Le e-commerce c’est pour nous quelque chose de génial dans lequel on avait envie de se lancer. Donc au début on a pensé à ouvrir notre site internet. C’était plus simple, moins cher, plus efficace et après un an d’existence on s’est rendu compte qu’il y avait des gens qui n’étaient pas prêts à acheter sur internet. On a donc ouvert une boutique dans le Marais à Paris. Ca a été un énorme succès. Maintenant on mène les deux développements de front, les boutiques et le web.

Comment achète t-on des lunettes chez Jimmy Fairly?
Le client va sur le site, il choisit une paire de lunette qui lui plaît, et les traitements qui lui plairaient, la surface antireflet par exemple. Ensuite il a le choix d’être soit recontacté par nos opticiens en boutique, soit de nous envoyer son ordonnance par scan directement et on lui fait sa monture à sa vue. Il manque souvent une mesure qui est l’écart pupillaire. Cette mesure on peut la voir sur des anciens dossiers optiques ou maintenant avec la dernière loi (la loi Hamon entrée en vigueur le 18 mars ,ndlr). Les ophtalmologistes devront écrire directement cette mesure sur leur ordonnance. Si jamais on ne l’a vraiment pas, le client doit se prendre en photo avec une règle sur les sourcils, regarder droit devant, et grâce à ça on peut définir l’écart pupillaire. Vous commandez puis vous recevez vos lunettes sept jours après avec une facture, une feuille de soin et une photocopie de l’ordonnance, le tout à envoyer directement à votre CPAM. Vous êtes remboursé trois semaines plus tard.

Antonin Chartier

Quels sont vos clients, à Toulouse plus particulièrement ?
Sur internet ce sont les jeunes, les étudiants qui vont acheter, surtout parce qu’ils ont des verres simples. Dès qu’on dépasse 40 ans il y a des verres plus compliqués, les verres progressifs. Ces verres-là, certains opticiens en ligne les vendent, pas nous. Il faut prendre une autre mesure spécifique. Cela ne peut pas se faire à distance, c’est la raison pour laquelle on ne vend pas de verres progressifs sur internet, mais on les vend en boutique. Sur notre boutique de Toulouse on a beaucoup de clients de 25 à 35 ans. On a aussi des gens de plus de 40 ans qui, en boutique, peuvent s’acheter des verres progressifs ultra haute gamme puisque nos verres sont des verres de la marque Zeiss. Le prix est de 299 euros monture plus verres ; chez un opticien ça serait juste le prix d’un seul verre.

Votre principal argument de vente c’est votre prix (99 euros prix de base pour des verres simples) ; comment parvenez-vous à proposer ce tarif ?
C’est parce que l’on supprime tous les intermédiaires. On dessine nos montures, on les fabrique et on les vend. Elles sont dessinées par nos équipes à Paris, fabriquées à la main en Italie, les verres sont fabriqués en France et tout est disponible exclusivement sur JimmyFairly.com et dans nos boutiques. C’est cette alliance de choses qui fait qu’on peut vendre des lunettes deux à trois fois moins cher que le marché tout en gardant une qualité équivalente à des lunettes de luxe.

Comment se passent les relations avec les mutuelles et les ophtalmologistes ?
Pour le moment on n’a pas fait de partenariat avec des mutuelles, tout ce qu’on sait c’est qu’elles nous apprécient parce qu’on vend des lunettes de qualité. On a en revanche un agrément avec la Sécurité sociale qui nous a agréés en tant qu’opticien lunetier, cela permet à nos clients d’être remboursés par la Sécu et ensuite par leur mutuelle. Les ophtalmologistes on ne va pas trop les voir, mais j’ai eu des retours positifs. Ils savent très bien que les lunettes coûtent trop cher et que tant qu’il y a quelqu’un qui peut donner accès à des lunettes haut de gamme pour un prix abordable, ils ne sont pas contre. D’autant plus qu’on refuse la vente de lunettes progressives en ligne. A partir de là on est à l’abri de toute critique.

Vous pensez que c’est plus la faute des intermédiaires que des opticiens si les prix des lunettes sont élevés, non ?
Ce n’est pas tellement une question de faute, c’est une question de profiter d’un système. L’opticien classique fait des marges indécentes, au même titre que ses fournisseurs et tous les intermédiaires de la chaîne. Les opticiens traditionnels participent au système et la particularité de l’optique c’est qu’il y a deux grandes multinationales, Luxotica et Safilo, qui détiennent la distribution mais surtout qui possèdent la plupart des marques connues. Ils maintiennent des prix élevés. En plus, avec le système des mutuelles en France, les Français sont remboursés 180 euros en moyenne par an, ça tire forcément les prix vers le haut. Le client paie tous les mois une mutuelle en abonnement, il ne se rend pas compte, mais plus les lunettes sont chères, plus les mutuelles sont chères aussi.

* Rue Saint Antoine du T.