Que signifie le mot « bootleg » ?

A l’origine, le bootleg désigne une production pirate qui circule illégalement : l’enregistrement volé d’un concert, par exemple. Puis les DJs se sont appropriés le terme pour qualifier un remix « non officiel », c’est-à-dire réalisé sans l’autorisation des artistes originaux, ni de leur maison de disques. Dans le domaine des « bootlegers », cela se traduit généralement par le mélange de la voix d’une chanson sur l’instrumentale d’une autre.
Ce style de mix demande du recul et une bonne dose d’humour. J’ai déjà réussi à faire danser les gens sur un mélange de Las Ketchup et de The Beastie Boys ! Au premier abord, le public trouve juste le morceau marrant. Ensuite, s’il se prend au jeu, il peut découvrir que musicalement, il y du talent derrière.

Comment procèdes-tu pour assembler des artistes qui a priori n’ont rien à voir entre eux ?

Je récupère d’abord des parties instrumentales de chanson et des a cappella. Je me suis constitué une banque de données depuis plusieurs années avec tous les gros tubes pop, récupérés sur la toile ou fournis par les artistes eux-mêmes. J’ai classé les morceaux de manière très informatique, selon leur tonalité et leur tempo.
A partir de ces facteurs techniques imposés, j’essaie tous les mélanges possibles. Je puise dans tous les styles. En fait, plus les morceaux sont éloignés, plus cela m’intéresse. Je suis toujours à la recherche du tube ultime, qui va faire réagir les gens dès les premières secondes. Cela a pu donner lieu à des mix entre Mickael Jackson et Dionysos, ou entre Diam’s et Mano Negra, pour citer les plus tordus. J’ai aussi quelques challenges comme mon premier bootleg salsa… Mais ce n’est pas encore d’actualité.

Comment les artistes originaux réagissent-ils à tes remix ?

En général, leurs échos sont positifs. Ils retirent finalement un avantage de mes bootlegs, car je leur permets de toucher un univers qu’ils ne côtoient pas. Et puis, ils se montrent curieux de tout ce qui se passe avec leur musique. Par exemple avec mon bootleg « Daft Attaque », le groupe Louise Attaque, a découvert une dimension dansante à leurs chansons. Ils n’avaient jamais envisagé leur compositions sous cet angle, mais ça leur a plu. Ils ont donc voulu reproduire l’expérience lors de conceptuels « bootleg-concerts » : le 27 septembre au Nouveau Casino (Paris 11ème), puis le 29 novembre, au Palais omnisport de Bercy (Paris 13ème).
Deux artistes seulement m’ont fait part de leur désaccord. La première a regretté que « j’arrive avec mon tank pour casser la maison [qu’elle avait] mis un an à construire, en pensant à chaque détail ». Pour le second, c’est un problème de crédibilité face à son public qui s’est posé. Certains de ses fans lui attribuaient en effet l’initiative du bootleg alors que je l’avais mélangé à un groupe qu’il déteste. Il craignait alors de brouiller son image.

D’autres collaborations vont-elles se mettre en place ?

Depuis toujours j’ai voulu mixer dans des festivals pour côtoyer les musiciens. Je souhaite de plus en plus sortir de mon délire de solitaire, créant des duos virtuels face à son écran. Demain [vendredi 20 octobre], j’investis le Bataclan pour une soirée ZebraMix à laquelle j’ai convié Louise Attaque, The Film, Branda, Cali, les Saian Supa Crew.
L’idée d’inviter des artistes m’est venue aux Solidays de juillet dernier. J’étais programmé le même soir que Dionysos et Cali, alors que j’avais prévu de jouer des bootlegs utilisant leurs compositions comme base. Je leur ai donc proposé de venir directement poser leur voix dans mon set. Ca c’est tellement bien passé que, par la suite, j’ai proposé une collaboration à chaque artiste que je croisais.
Avec Louise Attaque _ comme le groupe ne voulait pas se désolidariser _ c’est moi qui les ai rejoint sur scène aux Francofolies de la Rochelle, l’été dernier. Avec le mélange des instruments, le résultat sonnait vraiment comme quelque chose de nouveau. En me renseignant, en effet, j’ai constaté qu’aucun bootlegger n’avait encore collaboré avec les artistes qu’ils détournaient.
J’ai donc de nombreux de projets en ce sens, dont le plus ambitieux est sûrement pour les Francofolies de l’année prochaine. Un groupe de musiciens permanents occupera la scène. Pour les invités, les organisateurs m’ont donné carte blanche. J’espère pouvoir réunir M, Téléphone, Jean-Louis Aubert, et d’autres encore.

A quand un nouveau cd de Dj Zebra ?

Dès mars 2007, un album sous le label Atmosphérique [la maison de production de Louise Attaque] sera dans les bacs. Ils regroupera des bootlegs déjà proposés en téléchargement gratuit sur mon site… Reste qu’il fallait le savoir. Produire un cd, c’est une manière d’accéder à une certaine visibilité : pour moi mais aussi pour tous les bootleggers de France. Car nous sommes nombreux et la demande croit de façon importante depuis un an. On peut aujourd’hui parler d’un phénomène « bootleg ». Or les médias refusent, pour l’instant, de s’en faire le relais.
Je prépare en même temps mon disque de productions personnelles pour l’automne 2007. Lee Roy des Saïan Supa Crew participera à l’aventure… Entre autres. J’ai déjà réalisé un mix avec Dionysos, LaPhaze et Stupefip qui s’appelle « Allez Debout ». Vous pouvez dès à présent le télécharger sur ma page My Space, pour vous faire une idée. Je vais aussi m’entourer de groupes moins connus comme Extra Extra, Hot Boy. Cet album sera un fourre-tout, qui part dans tous les sens : très rock, très électro, très funk… Tout ça à la fois !

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Discographie : « Dance to the underground » compilation mixée (Labels / EMI – 2004)

Retrouvez aussi dj Zebra dans le « Zebramix » sur oui fm, tous les samedi de 22 h à minuit et sur France Inter, dans l’émission « Ondes de Choc », tous les mercredi de 23h à minuit.