La Petite est une association toulousaine de promotion et production de musique électronique. En 2016, elle lance son projet “Girls Don’t Cry” et organise des événements à la programmation musicale 100% féminine et/ou queer. Festival de cinéma, soirées électro dans la plupart des salles de la ville ou encore un podcast entre musiciennes : le projet Girls Don’t Cry souhaite rendre visibles les grandes mises à l’écart de la culture : les femmes et les minorités de genre.


Ce mois de février 2023, l’association La Petite entend une fois encore faire danser la ville au cours de son annuelle « Girls Don’t Cry Party » au Muséum de Toulouse. Féministe, militant et soucieux de la sécurité de son public, c’est une proposition originale dans un monde de la fête encore très hostile aux femmes et aux minorités en général.

Faire la fête quand on est une femme ou bien une minorité de genre ? La réalité est loin d’être aussi réjouissante que cela le devrait. En France, les chiffres de harcèlement sexiste et sexuel en milieu de fête défient l’imagination. En 2018, 78% des 1 000 personnes interrogées par l’association Consentis déclarent connaître une personne ayant vécu une agression au cours d’une soirée. Les milieux peuvent différer : concerts, boîtes de nuit, festivals, etc. Mais les mécaniques restent les mêmes : agressions physiques, insultes, insistances, verres drogués : soudainement la fête ne semble plus en être une.


Dans cette même enquête, 50% des femmes indiquent se sentir en insécurité dans ces lieux. Parmi celles-ci, 48% l’expliquent par la présence d’agressions sexuelles. Pour contrer ces violences, il faut les comprendre, mais aussi réinventer. C’est à cette tâche que s’attelle l’association La Petite dans le milieu festif toulousain.

Affiche de Girls Don’t Cry Party au Museum de Toulouse © La Petite


Créer la sécurité


Proposer des lieux de fêtes « safe » passe par plusieurs facteurs. Il faut d’abord une organisation intransigeante. Les équipes de sécurité de chaque événement sont formées aux VSS*, et un protocole très strict est mis en place en cas de détection d’agression. La Petite déploie également le dispositif « Mainforte » : c’est un ensemble de bénévoles formés par leur soins à la prise en charge et à la veille des VSS, directement sur le lieu des événements.


La Petite est aussi un organe de formation auprès d’acteurs toulousains de la fête. « De plus en plus de salles de concerts font appel à nous pour nos formations. Il y a deux explications à cela : depuis 2021, les aides du publiques sont conditionnées au respect, par les entreprises qui les demandent, d’obligations précises en matière de prévention et de détection du harcèlement sexuel. Et puis, on imagine quand même un réel éveil des consciences : les choses changent », explique Camille Mathon, directrice artistique et responsable événementiel de La Petite.

*VSS = Violences sexistes et sexuelles


Faire bouger les corps et les lignes


Aujourd’hui, La Petite sélectionne avec soin les artistes femmes et/ou queers qu’elle programme lors de ses événements. C’est un travail de chinage : trouver la perle rare, les propulser sur le devant de la scène. Pourtant, quand l’association se crée il y a 19 ans, c’est seulement pour parler et programmer de la musique ; proposer du bon son avant tout chose. Elle est alors loin de cet engagement militant qu’elle prône aujourd’hui. Puis, au fil du temps, en évoluant dans le monde de la scène, de la programmation musicale et de la fête, un constat alarmant apparaît : les musiciennes sont nulle part, ou presque.

Pourtant, des femmes qui font de la musique, ça existe. Mais elles ne rencontrent pas la même légitimité que leurs homologues masculins. Moins programmées en festival et en concerts, elles sont, de fait, moins recensées et parfois invisibilisées. La Petite prend alors un tournant féministe et intersectionnel : dorénavant, elle prendra soin de programmer des artistes femmes, mais aussi queers, racisé.e.s et discriminé.e.s. Il s’agit de proposer une scène encore très rare dans le monde de la musique.


Aujourd’hui, le projet Girls Don’t Cry est une influence majeure dans le monde militant et culturel toulousain. Ce sont de nouvelles propositions pour transformer le monde de la fête en une expression artistique libre et inclusive.

Girls Don’t Cry Party – Mardi 14 Fevrier au Museum de Toulouse

Lison Chambe