En attendant le 1er avril et l’entrée en vigueur de la baisse de quinze centimes annoncée par le gouvernement, certains automobilistes toulousains sont contraints de modifier leurs habitudes pour faire des économies. D’autres sont tout simplement résignés.

En remplissant le réservoir de sa Twingo grise, Philippe a les yeux rivés sur le compteur. Avec les prix encore élevés à la station Total des Ponts-Jumeaux, il est obligé de faire attention. « À plus de deux euros le litre de gazole, je ne peux plus me permettre de faire le plein », confie le Toulousain de 66 ans, « en galère » depuis le début de la flambée des tarifs fin février, liée à la guerre en Ukraine.

Si le 12 mars dernier, le Premier ministre Jean Castex a annoncé une remise de quinze centimes sur les prix des carburants à compter du 1er avril, et ce pendant quatre mois, pour Philippe, ce n’est « pas du tout » suffisant. « Revenir à un prix en dessous des 1,60 euros le litre, ça ce serait raisonnable », estime le sexagénaire, qui songe à vendre son deuxième véhicule. « Ce n’est plus possible. Tout augmente et notre pouvoir d’achat disparaît. On devient de véritables vaches à lait ! »

À la station Leclerc de Blagnac, Anaïs est aussi déçue par cette mesure, surtout par sa mise en application tardive. « Quinze centimes, c’est trop peu… Et c’est maintenant qu’on aurait besoin de cette aide », lance la femme de 32 ans, en se remettant au volant de sa Polo rouge. « Ce n’est que de l’électoralisme, à quelques semaines du premier tour de la présidentielle. » À l’inverse, pour Jérémie, étudiant de 22 ans, cette baisse est « un bel effort » concédé par le gouvernement : « C’est la spéculation qui fait grimper les prix et ce sont les distributeurs les fautifs. L’État ne peut pas tout ! »

Moins de sorties le week-end, livraison des courses…

En attendant que cette remise soit effective, face aux tarifs encore importants dans la plupart des stations de la Ville rose, de nombreux automobilistes sont contraints de modifier leurs habitudes. « J’utilise moins la voiture pour aller travailler, je prends plus souvent mon vélo électrique. Et le week-end, c’est vrai que je ne sors pas en dehors de la ville, car ça a un vrai coût », reconnaît Daved, 44 ans, conducteur d’une Volkswagen Up bleu métallique.

« Avec ma femme, on cherche le prix de l’essence le moins cher à proximité de nous »

S’il bénéficie d’une « prise en charge partielle de la hausse des prix » par son employeur, Rafaël, 42 ans, doit tout de même trouver des astuces pour ne pas se ruiner. « Avec ma femme, on cherche le prix de l’essence le moins cher à proximité de nous », explique cet employé administratif dans une école de commerce toulousaine. « Au niveau des courses, on s’est aussi rendu compte que ça ne vaut plus le coup d’aller dans les grandes surfaces. Donc maintenant, on se fait livrer ! »

Explosion du « court-voiturage » 

Déjà en forte augmentation auparavant, le nombre de covoiturages a encore largement grimpé face à l’augmentation des prix à la pompe. Une façon de plus en plus démocratisée d’économiser de l’argent, particulièrement pour les trajets quotidiens domicile-travail. « Nous avons enregistré une augmentation des inscriptions de 230% sur les deux premières semaines de mars. Les primo-covoiturages, c’est-à-dire les gens qui effectuent leur premier trajet, ont également explosé », s’enthousiasme Lucie Mandile, directrice du développement de Karos. Cette application, figurant parmi les des leaders du marché, se présente comme BlaBlaCar, mais propose de personnaliser au maximum ses « court-voiturages » – des trajets réguliers et de courte durée.

L’application n’hésite pas à se saisir de la situation pour promouvoir ses services. Crédits : Capture d’écran Karos

Si Karos est soutenue par la Région Occitanie, elle bénéficie également d’un partenariat avec Tisséo. En enregistrant sa carte Pastel, deux trajets par jour, jusqu’à 30 kilomètres, sont donc gratuits. Mais si Noémie, employée chez Europarc âgée de 26 ans, s’est inscrite tout récemment, c’est pour bénéficier d’un contrat directement signé entre son entreprise et l’application : « Je covoiturais déjà avec mes collègues avant de m’inscrire, mais désormais, c’est plus simple et transparent pour nous tous. Et vu les prix, tout le monde fait des économies, donc tout le monde est gagnant ! »

Clément a quant à lui découvert Karos grâce à des amis toulousains. Inscrit depuis le 21 mars, il n’a néanmoins pas encore trouvé de covoitureurs pour son trajet Toulouse-Blagnac. « Je prévoyais de le faire tous les matins et ainsi d’économiser 40 à 50 euros par mois. Pour le moment, ça démarre mal », regrette l’ingénieur de 26 ans. « Mais bon, je ne désespère pas. On fait ce qu’on peut pour faire face à une essence aussi chère ! »

Crédits photo : Lucas Planavergne