Fidaa Horani, Duha Al-Ashour et Wejdan Nassif ont trois choses en commun. Elles sont des femmes, elles sont syriennes et elles sont exilées en France. Trois visages de l’exil. Trois témoignages.

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«Allô le monde, c’est la Syrie ! Allô ?» : lecture d’un extrait de « Lettres de Syrie », écrit par Wejdan Nassif sous le pseudo de Joumana Maarouf.

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Fidaa Horani : «Mon histoire n’est pas unique»

Médecin gynécologue et femme politique indépendante, Fidaa Horani a été présidente de la Déclaration de Damas pour le changement démocratique en 2007, suite à quoi elle a été arrêtée par le régime syrien et emprisonnée pendant trois ans.

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«Ils nous disaient : ‘Vous êtes des traîtres, des agents d’Israël’. Ils ne connaissaient rien du droit, des lois et de la consititution. Tout ce qu’ils savaient, c’était ‘Assad, pour l’éternité’. Ce sont des générations entières qui répètent ce slogan depuis leur plus tendre enfance. C’est comme ça que la Syrie a vécu pendant des décennies, avant la révolution de 2011. Dans un état de mort clinique.»

Duha Al-Ashour : «Penser que nous pourrons retourner en Syrie est primordial»

Auteur et journaliste, Duha Al-Ashour a été faite prisonnière entre 1991 et 1993 pour son appartenance au parti communiste. Aujourd’hui réfugiée à Paris, elle milite pour la liberté et les Droits de l’Homme.

«En Syrie, il était courant d’utiliser le terme ‘toit de la patrie’, généré et répandu par les médias du pouvoir. Depuis, les syriens ont été classés en fonction de leurs réclamations. Ceux qui participaient à la révolution étaient considérés en dehors du ‘toit de la patrie’. Le toit de la Syrie était bas et humiliant, ce toit qui avait décidé de transformer la Syrie en un grand cimetière et en une prison encore plus grande. C’est ce toit qui a poussé les syriens à se révolter en mars 2011. C’est ce toit qui les pousse aujourd’hui à risquer leurs vies et leurs économies pour fuir.»

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«C’était la première fois que je quittais la Syrie. Seule avec une mémoire ensanglantée face à un monde étrange qui m’indique qu’il faudrait que je remette en question toutes mes connaissances et me redéfinir. Qui suis-je et qu’est-ce que je veux ? Les français nous demandent régulièrement ‘pourquoi avez-vous choisi la France comme pays d’asile?’. La plupart des réfugiés répondent par cette phrase qui à leurs yeux est censée satisfaire les autorités : ‘la France est le pays de la liberté, de l’égalité et de la justice’. En réalité, nous sommes les victimes d’une longue tyrannie. La guerre froide est chaude et nous avons peur. Nous n’avons pas choisi la France. Nous avons simplement fui la guerre.»

Wejdan Nassif : «Salam à la Syrie, mille salam»

Auteur du livre «Lettres de Syrie», une série de témoignages datant de 2012 à 2014, Wejdan Nassif est une ancienne prisonnière politique. En 2011, elle fonde l’association «Femmes syriennes pour soutenir la révolution syrienne».

«Quatre décennies de silence et mutisme politique ont pris fin avec le début de la révolution. Prononcer le mot liberté avait un effet magique. C’était l’ouverture de la nouvelle ère syrienne. Tout ce que nous voulions était la liberté. Pour le mot liberté, nous avons perdu des camarades, des proches, nous nous trouvons aujourd’hui dispersés partout dans le monde. Malgré l’espoir qui s’amenuise, nous voulons répéter tous les matins le mot salam.»

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«Salam à toutes les femmes syriennes en Syrie vêtues depuis cinq ans de la robe de l’espoir et qui tentent aujourd’hui de contourner l’horreur et citent les versets de l’amour à ceux qui sont restés en vie. Salam à toi la Syrie, à tous les recoins de ta terre.»