Au moins les choses sont-elles claires. Le régime d’assiduité ne sera pas renié dans ses principes mais les modalités de son application seront reprécisées. Alors que la grogne étudiante se fait un peu plus entendre, « Univers-Cités » a rencontré Philippe Raimbault et Jérôme Viguier, respectivement directeur de l’IEP et directeur des études.

« Univers-Cités : Deux choses sont constestées dans ce nouveau régime : sa mise en application et sa rigidité.

Philippe Raimbault : Sur la forme, on nous a accusés d’avoir manœuvré de façon à ce que cette décision soit prise lors du Conseil d’administration du 28 juin, auquel les représentants étudiants n’étaient pas présents. Le problème, c’est que le CA en question devait avoir lieu dans le mois suivant le séminaire enseignant, où nous avions constaté des abus sérieux en termes d’absences. Il fallait un nouveau règlement des examens avant le début du semestre suivant, tout simplement. Quant au fond… l’essence de cette réforme, c’est de refuser désormais qu’une absence puisse être injustifiée. Le problème, c’est que nous avons en effet mal communiqué sur les motifs qui pouvaient valoir une justification.

Jérôme Viguier : A la pré-rentrée, nous avions évoqué le certificat médical comme étant une justification valable. Depuis, si vous faites le tour de la scolarité, vous pouvez voir qu’on en accepte d’autres : concours, permis de conduire, deuil, conférence…

Certains estiment qu’à 20 ans passés, ils n’ont pas à être obligés d’aller en cours. Qu’en pensez-vous ?

P. R. : Je ne suis pas d’accord. Le diplôme dans lequel les étudiants sont inscrits valide des acquisitions, des compétences et un volume d’enseignements. Ils veulent qu’on supprime le contrôle des absences ? Très bien ! Qu’ils aillent payer un diplôme à 20 000 € à l’ESC s’ils le souhaitent. En tout cas, je ne suis pas d’accord avec ce système. Il en va de la crédibilité du diplôme.

J. V. : Jusqu’à l’an dernier, il m’arrivait de voir des étudiants trois fois au cours d’un semestre. Pour moi, c’est inacceptable, ne serait-ce que par rapport au professeur mais aussi envers les étudiants présents. La valeur d’un diplôme passe aussi par l’assiduité. En ce moment, nous validons les diplômes de 5° année : un étudiant à eu 0 en anglais après avoir été sept fois absent. Vous n’allez pas me dire que le diplôme qu’on lui délivrera aura la même valeur que celui donné à un élève plus assidu !

Il y a tout de même des exceptions. Les étudiants qui s’absentent ne le font pas uniquement par paresse, mais par obligation et par intérêt pédagogique.

P. R. : Bien évidemment. Si on prend par exemple les étudiants – et heureusement, ils sont peu – qui ne sont pas en situation de se payer une mutuelle et qui ne peuvent donc pas disposer d’un certificat médical, nous réfléchissons à la mise en place d’une médecine universitaire. Ces cas-là, on peut les traiter. De la même manière, on peut comprendre certains cas graves. Jérôme parlait tout à l’heure des cas de deuils, mais ça englobe aussi les maladies, les problèmes familiaux. Nous ne sommes pas stupides: si nous en sommes informés, nous en tiendrons compte. Cette politique d’assiduité est rigide dans son principe, mais elle est plus souple qu’elle n’en a l’air.

Ce système dit clairement : « priorité aux études », sans autre forme de concessions. N’est-ce pas incohérent pour un établissement qui fait de l’insertion professionnelle son slogan ?

J. V. : C’est vrai que depuis le début d’année, j’ai revu la donne pour des cas particuliers, en demandant l’avis du responsable de parcours : est-il intéressant d’assister à telle conférence ou d’interviewer telle personnalité ? En cas d’accord de sa part, il est évident que je donnerai le mien.

P. R. : Si vous voulez, les étudiants doivent comprendre qu’ils ne peuvent pas gérer leurs études selon leur seule appréciation. Il faut comprendre que la répétition des absences, même pour les meilleures raisons du monde, reste préjudiciable d’un point de vue pédagogique. On veut bien discuter sur certains points, mais il faut être conscients que la priorité, c’est l’IEP.

Cette réforme n’est-elle pas un aveu d’impuissance de la part de l’administration au regard du contenu de la maquette pédagogique ? Certains étudiants en appellent à un débat autour de cette question.

J. V. : Je suis assez surpris par ce que vous dites. Il y a des réunions avec les délégués, avec la CEVE (Commission des études et de la vie étudiante) et, s’il y a bien évidemment des demandes de réajustements, les retours concernant le nouveau tronc commun sont assez positifs. Je ne suis par conséquent pas très favorable à un débat à ce niveau.

P. R. : Le diplôme de Sciences Po Toulouse s’inscrit dans une logique pluridisciplinaire. Ce qu’attend un recruteur d’un diplômé de cette école, c’est d’avoir un minimum de culture générale. Cela ne plaît peut-être pas à tout le monde de refaire du droit, mais c’est la limite d’une organisation collective : on ne peut pas tout individualiser.