L’Artefact a signé sa troisième édition ce weekend. Né à Lyon en 2018 et reconduit à Lille l’année suivante, Toulouse s’est porté volontaire cette année pour perpétuer la tradition. Entre théâtre, danse, musique, éloquence, cinéma ou photographie, ce festival réconcilie les étudiants avec leur âme d’artiste. Des épreuves en tout genre ont réuni (presque) tous les Instituts d’Études Politiques de France, du vendredi 7 au dimanche 9 février. À l’origine de ce festival, neuf délégations, qui ont veillé au bon déroulement d’un programme riche en émotions.

Crédit : Emma Gomez

Les épreuves ont débuté vendredi sous la forme d’un concours d’éloquence. Le thème autour duquel se sont agencées les joutes était le courage. Sujet qui pourrait « donner lieu à des envolées lyriques » selon Étienne, étudiant de quatrième année qui a participé à l’élaboration de ce concours. Pour rester en accord avec l’esprit artistique de ce festival, ce sont des citations relevant de toutes formes d’art qui ont été sélectionnées pour nourrir le débat. « L’idée était de faire un panel représentatif de ce qu’est l’art aujourd’hui, et pas seulement avec les arts légitimes et légitimés » explique Étienne. C’est pourquoi ils ont choisi des arts « controversés » comme la musique ou le jeu vidéo. Ce sont les étudiants de Bordeaux qui ont remporté le prix de cette épreuve où plusieurs candidats par IEP se sont exprimés pendant près de trois heures.

 

Un weekend sur les planches

Crédit : Emma Gomez

Le festival s’est poursuivi le lendemain par des épreuves de danses où contemporain, classique, hip-hop se sont mêlés. « C’était des univers qui étaient très différents, c’est une belle surprise » apprécie Victor, membre bordelais du jury. L’esprit d’équipe et l’harmonie des groupes est ce qui est ressorti de ces moments de poésie. Sidonie, co-présidente de cette troisième édition, relève la magie de ces instants. « Je m’occupais des loges du sous-sol avec les danseuses, elles ont fait un échauffement collectif et c’est là que je me suis vraiment rendue compte que ce n’était pas du chacun pour soi ».

Crédit : Emma Gomez

La journée a continué au théâtre des Mazades où les troupes des neuf IEP sont montées sur les planches pour des pièces de quinze minutes. Certains ont écrit eux-mêmes leur création à plusieurs mains, comme les étudiants de Grenoble ou de Lille. D’autres ont présenté des pièces d’auteur. Aix-en-Provence a remporté le prix du jury avec « Huis clos » de Jean-Paul Sartre. « Revisiter une pièce classique ce n’est pas évident, surtout dans un cadre aussi restreint, avec peu de temps, ils se sont réappropriés le truc », approuve un membre du jury. Entre légèreté et engagement, humour et sévérité, fiction et réalité, ces comédiens amateurs ont saisi le public par leur jeu et leur prestance. « Il y a un vrai niveau, on ne pense pas que ce sont des pièces étudiantes » constate Émilie, l’une des comédiennes aixoises.

Crédit : Octave Lavaux

La soirée du samedi était l’occasion pour les groupes de musique et les DJ’s des IEP d’accomplir leurs prestations devant un public plus chaud que jamais. C’est ainsi que, jusqu’à sept heures du matin, les délégations ont tour à tour mis feu à une salle comble et déchaînée. « Le gérant de la salle était hyper content, il a dit que c’était l’une des meilleures ambiances qu’il ait eu » se réjouit Pauline, co-présidente de la fédération toulousaine. Le prix du groupe est revenu à Grenoble, et c’est la DJ de Saint-Germain qui a fait dansé le jury jusqu’au bout de la nuit.

Le lendemain, la journée a été animée par diverses présentations d’arts libres : de l’improvisation en théâtre et en danse, une exposition de photographies, une projection de courts-métrages, un concert par l’unique chorale strasbourgeoise… Une journée riche en émotions face au départ des huit délégations, et un seul mot sur toutes les lèvres: « incroyable ».

Les ficelles de l’organisation

Le projet est porté depuis plus d’un an par Pauline Robert, étudiante en quatrième année, et Sidonie Dequenne, en deuxième année. Derrière elles, toute une équipe composée des 40 membres de la fédération et d’une quinzaine de bénévoles engagés spécialement pour le weekend. « On a de la chance parce qu’on est très nombreux, si ça n’avait pas été le cas, ça aurait été très compliqué » confie Pauline.

Crédit : Emma Gomez

Depuis fin 2018, après avoir vécu une « expérience incroyable » à la première édition, Pauline s’est mis en tête de mener ce projet à son tour. En 2019, après les campagnes des bureaux de Sciences Po Toulouse, elle et ses camarades ont proposé à la liste perdante du Bureau Des Arts (BDA) d’organiser l’événement à leurs côtés. « Après on a élargi un peu les recrutements, on a proposé au BDA élu, et aux premières années », raconte-t-elle. Sidonie, à l’époque membre de la liste perdante du BDA, ne regrette pas de s’être lancée dans cette aventure, malgré ses appréhensions. Les deux jeunes filles ont du revoir leurs priorités, « on met les cours de côtés déjà, surtout là depuis janvier » avouent-elles, complices. « C’était très dur et très peu compatible avec une vie sociale et avec une vie étudiante, mais c’est pas grave on l’a choisi, et on savait que ça finirait en février ».

L’organisation s’est faite à distance, avec les IEP de Rennes, Lille, Strasbourg, Saint-Germain-en-Laye, Grenoble, Lyon, Aix-en-Provence et Bordeaux. Pauline explique : « On s’est organisé sur facebook, par des conversations messenger et avec des groupes par thèmes ». Par le biais de drive et de partages de fichiers, les neuf délégations ont ainsi travaillé côtes-à-côtes pour mettre en place cet événement artistique et culturel.

Les tâches sont ainsi réparties entre différents pôles : logistique/restauration, logement/transport, infrastructures, sponsor, soirée, communication. Clémentine est au pôle logistique, elle explique que le plus délicat c’est « qu’on doit être partout, sur tous les petits détails » : devis pour les repas, achat du matériel, trajets, emploi du temps des bénévoles, recrutement, briefing… Malgré l’intensité du travail fourni, c’est une certaine satisfaction qui semble ressortir à la fin de ces trois jours.

Une récompense pour chacun

Crédit : Octave Lavaux

C’est une ambiance festive et très soudée qui s’est faite sentir, là où la compétition n’était en aucun cas le mot d’ordre. Le jury était composé de neuf étudiants, membres du Bureau des Arts de leurs IEP. Victor explique que « le but n’est pas du tout de faire un jury pour une compétition, la preuve il n’a pas été mis en avant ». Artefact se démarque ainsi du CRIT (rencontre sportive entre les Sciences Po de France), en sortant de cet esprit de classement, et en valorisant les talents. Pauline confie que « dans des écoles comme ça où on a longtemps valorisé le sport, je trouve ça incroyable d’avoir autant de gens qui ont pu se réunir pour les arts et la culture. » La question n’était pas « qui est le meilleur » mais « dans quelle discipline chaque IEP s’est le plus illustré ? » détaille Aliette, jury et membre de la délégation de Saint-Germain. « Tous les IEP se sont démarqués par un point positif » confie-t-elle. Chaque délégation est ainsi repartie avec un prix, c’était une règle mais finalement pas une contrainte. Pauline explique : « le jury n’a pas réparti les prix de façon forcée, donc ça tombait bien, c’est aussi le hasard qui fait bien les choses, les gens étaient tellement talentueux ».

Ce weekend a été pour tous un moyen d’expression, de partage, de rencontres. Un moment hors du temps où tous les univers ont pu être exploités et où la bienveillance était de mise. « C’est vraiment un événement qui ressemble à ce qu’on avait envie de voir » conclue Victor, bordelais fier d’avoir pu participer à cette édition d’Artefact pour la première fois.