Plus de quinze ans après la catastrophe et après deux jugements à Toulouse, le troisième procès AZF s’est ouvert mardi à la cour d’appel de Paris. Un déplacement qui passe mal auprès des victimes, qui se sentent mises à l’écart.

L’histoire n’est pas encore terminée. Le troisième procès AZF s’est ouvert mardi à la cour d’appel de Paris, plus de quinze ans après la catastrophe industrielle. Serge Biechlin, directeur de l’usine au moment des faits et Grande Paroisse, la filiale de Total chargée de son exploitation, vont être jugés une nouvelle fois. Après avoir été relaxés en 2009 par le tribunal correctionnel de Toulouse, ils ont été condamnés en appel en 2012. Une décision contestée par la Cour de cassation qui a ordonné que l’affaire soit rejugée, par la cour d’appel de Paris cette fois.

Si les associations de victimes ont obtenu sa retransmission à Toulouse, la délocalisation du procès à Paris passe mal. Plusieurs d’entre elles sont venues manifester mardi midi devant le centre de congrès Pierre Baudis avant le début de la première audience. Pour Jean-Pierre Sertillange, instituteur, « c’est la triple peine : l’explosion, les quinze ans de procédures et finalement pas de procès à Toulouse ».

« Ça fait mal de ne pas pouvoir participer »

Contrairement à ce qu’avaient demandé les avocats des 2700 parties civiles, personne n’aura la possibilité d’intervenir dans les audiences depuis Toulouse. Pour Jean-Pierre Sertillange, « c’est un mépris supplémentaire envers les victimes ». Rose Frayssinet, victime et membre de l’association Plus jamais ça, confie avoir « mal de ne pas pouvoir participer ».

Malgré une aide de l’État, beaucoup de victimes ne pourront pas se rendre à la capitale pour suivre le procès. Monter à Paris, « c’est impensable » pour Guy Fourest, 85 ans. L’ancien président du Comité de défense des victimes d’AZF, à bout de force après quinze ans de bataille, se dit « plus que désemparé ».

« On n’a aucun respect pour l’être humain, aucun respect pour ces gens qui ont souffert. J’ai honte d’être français. » – Guy Fourest

Certaines victimes accusent Total de vouloir les éloigner du procès pour pouvoir plus facilement réfuter les expertises officielles de la catastrophe. « C’est la politique de Total depuis le début de semer le doute sur l’explosion, affirme Jean-Pierre Sertillange. Pourquoi pas la faute des extraterrestres, tant qu’on y est. »

Malgré tout, le procès doit durer quatre mois, et sera retransmis au Centre de congrès et à l’arche Marengo. Les audiences sont ouvertes à tous, à condition de présenter une pièce d’identité. A la fin du mois de mai, la justice devra enfin trancher sur les responsabilités dans cette catastrophe industrielle qui a durablement marqué la Ville rose.