Pour les 5ème année de Sciences Po Toulouse, Jean Berger est professeur. Un professeur vacataire qui enseigne la gestion des ressources humaines en tronc commun. Mais pas que… Portrait d’un personnage aux vies multiples.
« Je ne suis pas du tout un enseignant, moi, vous l’avez peut-être senti». Jean Berger ironise. Professeur vacataire à Sciences Po Toulouse, à l’IAE et à l’INSA, ce ne sont pas ses connaissances théoriques qui lui donnent ce statut mais son expérience professionnelle. Dans la vie, certains suivent une maxime, lui suit un tryptique : apprendre, transmettre et donner.
Chaque semaine, il transmet à ses élèves ses observations sur la gestion des ressources humaines dans les entreprises, notamment à travers ses réussites et ses échecs dans les différents postes qu’il a occupés. « Je n’en ai rien à faire que les gens ne viennent pas, que l’amphi soit plein, ou que les étudiants fassent du bachotage, je veux que ceux qui viennent s’intéressent. Je considère qu’ils sont assez grands pour savoir ce qu’ils veulent.»
En parallèle, il donne de son temps comme président de l’association Le tremplin 31, qui permet l’insertion professionnelle des personnes sans emploi. Pour ce qui est d’apprendre, Jean Berger pallie une frustration datant de son enfance.
Étudiant et professeur : une revanche sur sa jeunesse
Pour ce qui est d’apprendre, Jean Berger a récemment pallié une frustration datant de son enfance.
« Quand j’étais jeune, les psychologues ont dit à mes parents » il est un peu abruti votre fils, faites lui faire un BTS » et je ne caricature pas ». S’il se confie en souriant, l’étudiant-professeur de Sciences Po Toulouse explique que ses parents l’ont sauvé. « Très très mauvais élève et immature », il redouble plusieurs fois, est viré de son lycée, avant d’être envoyé en pension à Pau. « Je n’ai pas beaucoup aimé, mais vers 16-17 ans j’ai compris. Le fait de me voir dans un miroir, et de devenir militant politique (gaulliste de gauche), ça m’a fait réagir.» Le jeune Jean Berger obtient son baccalauréat et part pour Bordeaux. En 1975, il décroche ce qu’on appelle alors un doctorat de spécialité en sciences économiques (sur cinq ans).
Mais son rêve d’enfant était tout autre : il voulait étudier à Sciences Po. En 2011, alors qu’il est en pré-retraite, il découvre les bancs de l’IEP de Toulouse. Pendant deux ans, il suit des cours des 4ème et 5ème années. Quand on lui demande ce qui le motive, il cite Jean d’Ormesson : « Si on veut concevoir l’avenir encore faut-il comprendre le passé ». Et il ajoute en souriant : « Le diplôme, je m’en fous comme de l’an 40 ».
Un self-made man sur les traces de son père
Un parcours scolaire en dents de scie suivi d’un parcours professionnel original. En 1975, diplôme en poche, sa volonté « c’était foutre le camp de ma région, partir à l’étranger. A l’époque c’était plutôt atypique. » Jean Berger envoie 600 candidatures spontanées, reçoit trois offres et décide de partir travailler à Abu Dhabi dans une entreprise pétrolière, comme son père. « Mon père était fils adultérin (sa mère travaillait comme ouvrière). Il s’est fait tout seul, il s’est payé ses études et a réussi à avoir une grosse carrière professionnelle chez Elf [NDLR : Total aujourd’hui]. Il nous a transmis beaucoup de valeurs à mes frères et à moi. Je suis son modèle, son chemin » confie-t-il fièrement.
Après trois ans dans le pétrole, Jean Berger est passé par une entreprise de téléphonie, une de cimenterie, une filiale d’Airbus pour finir à Airbus même. Et là encore, son poste a évolué. Il part cinq ans à Washington DC en tant que directeur financier de l’entreprise avant de revenir avec de nouvelles envies. « J’ai peu à peu perdu mes compétences de base dans la finance pour m’orienter vers le management d’équipes. Dans les dernières années ça m’a tellement plu que je voulais avoir une consonance RH. »
Aujourd’hui père de deux enfants (une ingénieur et un professeur de philosophie), il planifie une nouvelle étape de sa vie. « Ce sera certainement de la création, apprendre à peindre, faire du théâtre ou concrètement aider des jeunes à créer leur boîte, à voir, j’y réfléchis. Je ne suis pas un intellectuel, loin de là. »