Après l’annonce par Jean-Luc Moudenc d’un possible retour du minotaure dans les rues de Toulouse, la Halle de la Machine a récemment réouvert ses portes. L’occasion de revenir sur l’histoire houleuse de la Piste des géants, au cœur des querelles politiques municipales.

Samedi 8 février, la Halle de la Machine de Montaudran réouvrait ses portes après un mois de fermeture pour entretien. Quelques jours plus tôt, Jean-Luc Moudenc présentait ses projets pour Toulouse dans le cadre des élections municipales. Le maire sortant déclarait alors être favorable à une biennale de l’art de rue, avec un possible retour du Minotaure dans la ville rose.

La première sortie de la machine géante avait été un franc succès. Du 1er au 4 novembre 2018, entre 800 000 et 900 000 personnes se sont retrouvées pour admirer le spectacle de la Compagnie de la machine dirigée par François Delarozière. Un rassemblement aux proportions inédites pour un événement organisé par la ville. Une semaine plus tard la Halle de la Machine était inaugurée. Un succès qui serait la principale motivation de Jean-Luc Moudenc selon son adversaire politique Pierre Cohen. « Il veut faire oublier que c’est moi qui ait amené les machines à Toulouse. »

La bataille acharnée contre le minotaure

La promesse récente de Jean-Luc Moudenc est en effet très surprenante, au regard de la bataille qu’il a mené en 2014 contre Pierre Cohen, alors maire de Toulouse. En pleine période d’élections municipales, l’actuel maire s’était opposé de manière très virulente au projet de la majorité socialiste. Accusation de copinage entre Pierre Cohen et la compagnie artistique, dénonciation du coût de l’opération (près de 20 millions d’euros au total), Jean-Luc Moudenc va jusqu’à qualifier la Halle de « monstruosité » devant la presse. Il ne cache pas sa préférence pour un lieu rendant hommage à l’aéropostale, qui serait éclipsé par l’ombre du minotaure.

Vainqueur de la bataille du Capitole, il décide finalement de maintenir le projet déjà bien entamé. La Halle de la machine s’installe donc sur « La piste des géants », aux côtés de… l’aéropostale ! Le maire fraîchement élu ne manquera pas de reconnaître le travail de Pierre Cohen, en précisant qu’il s’opposait surtout à la méthode employée.

L’éléphant géant, pièce maîtresse des Machines de l’île – crédit Jean-Pierre Dalbéra

Toutefois, on peut remonter la dispute autour de l’art de rue encore plus loin. Dans les années 80, François Delarozière et la compagnie Royal de Luxe s’installent à Toulouse. Ils organisaient régulièrement des manifestations d’ampleur autour de l’art de rue, en plein cœur de la ville. La mairie de Dominique Baudis (UDF), apprécie peu les perturbations et décide d’interdire ce genre d’évènements. La troupe part donc à Nantes où elle installe les désormais célèbres Machines de l’île.

La culture : le nerf de la guerre des municipales

La question de l’art de rue et de la Halle de la Machine est finalement représentative du débat sur la place de la culture dans la municipalité. Alors qu’il s’agissait du premier poste culturel lors du mandat des Socialistes, les Républicains fraîchement élus ont très vite annoncé la couleur en 2014. Au total, les subventions allouées à la culture ont diminué d’environ 25% au cours du mandat. Pierre Cohen y voit la marque du « manque de vision » du maire sur la question culturelle. « Il ne comprend pas le sens de l’art de rue. » Pour la majorité sortante, il s’agissait surtout de rééquilibrer le budget de la ville rose.

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Un débat qui ne concerne pas que les éléphants de la politique toulousaine. Le 13 février, tous les candidats étaient réunis par Sciences Po Toulouse pour discuter de leur programme culturel. L’absence de Jean-Luc Moudenc, alors représenté par son adjoint à la culture Francis Grass, s’est d’ailleurs fait sentir. Les discussions ont tourné principalement autour de l’accès à la culture, chacun promettant l’ouverture au plus grand nombre. Mais plus que la culture, c’est bien le Capitole qui est en jeu. Pas de surprise donc, à voir le débat resurgir tous les 6 ans.