Crédit photo : Page Facebook «Liberté pour Ebru Firat »

Depuis plusieurs mois maintenant on peut lire sur les façades de l’hôtel de département, de région et de Toulouse métropole « Retour en France pour Ebru Firat ». Ces banderoles ont été suspendues en hommage à la jeune étudiante toulousaine partie combattre DAECH et (finalement) emprisonnée en Turquie depuis septembre 2016.

Jugée en huit clos pour « appartenance à une organisation terroriste », Ebru Firat est une jeune militante à la double nationalité française et turque. Née à Moissac (Tarn et Garonne), elle grandit à Toulouse, dans le quartier de Bellefontaine. Ses études, elle les commence dans la ville rose, mais c’est au Moyen-Orient qu’elle décide de débuter sa vie militante.

En 2009 et à tout juste 18 ans, Ebru Firat quitte son pays natal pour se rendre sur ses terres d’origine. Elle rejoint alors le Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK) au nord de l’Irak. Là-bas, la jeune femme entame des études de médecine et officie en tant qu’infirmière. Six ans plus tard, en 2015, Ebru Firat intègre l’unité de femmes kurdes contre Daech au Kurdistan. Elle oeuvre notamment dans la reprise de Kobané (ndlr : troisième ville Kurde en Syrie).

Puis, la jeune franco-kurde décide de rentrer en France, revoir sa famille et honorer un rendez-vous à Pôle Emploi. Pourtant, sur le chemin du retour, elle est arrêtée en Turquie par les forces de l’ordre du pays. Suite à un appel anonyme, Ebru Firat est accusée de vouloir fomenter un attentat-suicide dans la capitale économique dudit pays.

Son intervention et son procès se déroulent dans un climat de renforcement des mesures de justice extraordinaire. Depuis la tentative de coup d’Etat en juillet 2016 et les nombreux attentats mortels en Turquie, le pays est entré dans une « épuration politique ».

La France : silence, lettre ouverte et mobilisation

Alors qu’elle encourrait jusqu’à 20 ans de prison, la justice turque procède à une requalification de la poursuite et la jeune femme de 27 ans écope de cinq ans de prison pour « appartenance à une organisation terroriste », le PKK. Une organisation que la France définit de la même manière.

Septembre 2016. Suite à cette première décision de justice, son avocate Me Agnès Casero, en France, décide de faire appel. Puis, dans l’ancienne région Midi-Pyrénées, la communauté kurde se mobilise. Elle s’adresse au Président de l’époque, François Hollande, et à la diplomatie française pour intervenir directement dans l’emprisonnement d’Ebru Firat. Néanmoins, la décision de justice turque est confirmée en appel, sans audience publique. La jeune femme sera emprisonnée en Turquie pour une durée de cinq ans.

 

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Mars 2017. Ebru Firat ne perd pas espoir et écrit directement à François Hollande. Un appel à l’aide, que le représentant de l’Etat français laisse sans réponse. A l’époque, l’affaire de la jeune franco-kurde est silencieuse. La sphère politique ne se prononce pas sur le sujet. Mais à Toulouse, Ebru Firat n’est pas oubliée. Après la communauté kurde de la région, c’est au tour du maire de la ville, Jean-Luc Moudenc, de se mobiliser.

Septembre 2017. Le maire de Toulouse rédige une réponse au Ministère des Affaires Etrangères, où il affirme ne pas être opposé à une demande de transfèrement d’Ebru Firat en France.

Décembre 2017. Les avocats français et turques de la jeune femme demandent le transfèrement  de leur cliente, en France, au Ministère de la Justice et des Affaires Etrangères.

Janvier 2018. Le comité de soutien « Liberté pour Ebru Firat » demande au président turc Erdogan, en visite en France, la liberté et le transfèrement de la jeune femme. Puis, ce sont les Présidents de la région Occitanie, Carole Delga, du département, Georges Méric et le maire de Toulouse qui adressent une lettre ouverte au Président Emmanuel Macron, au Ministère des Affaires Etrangères et de la Justice pour attirer leur attention sur les « conditions de détention très difficiles d’Ebru Firat » [ndlr : elle serait incarcérée dans une cellule de moins de 4m2 avec des problèmes de santé].

Le cas d’Ebru Firat est une affaire judiciaire et diplomatique complexe. A Toulouse, les soutiens sont nombreux et la classe politique s’engage de plus en plus à ses côtés.