Les règles sont-elles vraiment le dernier tabou du sport ? Avec un dossier inédit, L’Équipe Magazine s’est attaqué à un des derniers silences du sport de haut niveau, féminin exactement. Au CREPS de Toulouse, sous la bulle du pôle France de beach-volley, nous sommes allées à la rencontre de l’équipe de France féminine pour savoir si l’évènement périodique reste « un truc de filles ». 

Le 18 février dernier, avec une Une inattendue et osée, L’Équipe Magazine a délié les langues et ouvert ses colonnes à un sujet qui n’avait jusqu’à présent jamais été abordé par un média sportif.

L’évènement déterminant de cette décision éditoriale fut sans doute la déclaration de la nageuse chinoise Fu Yuanhui, en août dernier :

« C’est parce que mes règles sont arrivées hier et que je me sentais fatiguée».

Ces mots, prononcés lors des Jeux de Rio, au micro de la chaîne nationale CCTV, venaient excuser le fait d’avoir « laissé tomber [ses] partenaires » du 4 x 100 m (4e).

Dans un pays où les tampons sont encore culturellement très peu utilisés, bravant un tabou culturel et national, Fu Yuanhui devenait une héroïne.

Parce que toutes les championnes sont aussi des femmes, les règles font forcément partie du jeu. Même si les ressentis divergent et que les incidences sur la performance sont plus ou moins importantes, combien d’entre elles n’ont jamais osé en parler ? En France, où le sujet est bien plus intégré qu’en Chine, le silence a-t-il vraiment été brisé ?

La Une de L’Équipe Magazine, le 18 février 2017.

Tabou ou pas Tabou ?

Univers-cités est allé à la rencontre des joueuses de l’équipe de France de beach-volley. Un groupe de six joueuses qui s’entraînent entre Toulouse et Montpellier. Au CREPS, dans leur «bulle», nous avons posé la question :  à l’entraînement, en compétition, les menstruations ont-elles vraiment une place ? Bref, les règles : tabou ou pas tabou ?

Fièvre, vomissement, crampes, saute d’humeur. Les symptômes peuvent être nombreux et affecter l’efficacité à l’entraînement, la performance en compétition ainsi que le bon déroulement de la récupération. Pas le choix, il faut donc aborder le sujet. Mais avec qui ? D’une sportive à l’autre, la réponse n’est jamais vraiment la même. Si plusieurs d’entre elles ne voient aucun obstacle au dialogue avec l’entraîneur, certaines, comme Ophélie Lusson, 22 ans, sont catégoriques : pas question de parler de cela avec le coach ! La famille ou le service médical sont parfois une forme d’alternative.

Au CREPS, Véronique Maurin, infirmière au service médical depuis seize ans, souligne l’évolution des mentalités.

«Les jeunes filles n’hésitent plus à venir me voir si elles ont besoin d’informations».

Elle relève néanmoins que la plupart du temps, les plus jeunes d’entre elles lui demandent d’être présente lorsqu’il faut en parler au médecin, qui est un homme.

Pour David Martin, entraîneur des équipes de France jeunes, la confiance entre la joueuse et le coach implique le fait d’aborder ce sujet féminin. On comprend qu’il s’agit pour lui d’un devoir de terrain. Il relève cependant que le sujet n’a jamais été évoqué au cours de sa formation.

«C’est typiquement quelque chose que l’on apprend sur le tas.»

Avec vingt ans de terrain, dont plus de dix dans le secteur féminin, l’entraineur national peut véritablement s’appuyer sur son expérience.

Reportage de Lou van Noort
Images et montage de June Raclet