Peut-on parler de crise migratoire ? Le mot déplaît à Jean-François Mignard, secrétaire général de la Ligue des Droits de l’Homme en Midi-Pyrénées (LDH), qui préfère parler de « situation exceptionnelle indéniable ».

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En effet, le nombre de demandeurs d’asile est en constante hausse en Europe. Alors que la France doit accueillir entre 25 000 et 30 000 migrants sur les deux prochaines années, ses dispositifs d’accueil ne sont toujours pas rodés.

**La peur du « grand remplacement » freine l’action des associations

Fin septembre à l’Espace des Diversités et de la Laïcité à Toulouse, Jean-François Mignard est venu exposer les difficultés rencontrées par les associations, dans « une France traversée par des courants xénophobes ».

Des représentants de La Cimade, du Collectif Réseau Éducation Sans Frontières 31 et de Toulouse Syrie Solidarité étaient également présents à cette réunion publique.

**Obtenir le droit d’asile : 21 jours pour faire le récit d’un exil

Les migrants doivent faire face à un parcours du combattant pour obtenir leur droit d’asile. À entendre les associations, la lourde machine bureaucratique ne s’adapte pas à ce public.

Une fois sur le territoire, les migrants ne disposent que de 21 jours pour faire le récit de leur épopée dans une langue qu’ils ne parlent pas, le français. Ils doivent exposer les raisons de leur exil pour convaincre l’OFPRA, « alors même que leur état psychologique est faible » s’indigne un représentant de Toulouse Syrie Solidarité.

**Urgence : personne au bout du fil

Un jeune homme se lève, il accueille chez lui depuis trois jours trois Syriens dans son appartement. Il les a croisés à la gare Matabiau et leur a proposé de les héberger.

« Je fais quoi maintenant ? » demande-t-il, un peu naïvement, aux représentants des associations.

Silence gêné. L’homme devra appeler le 115, inlassablement. « 90% des appels au 115 n’aboutissent pas, selon les associations présentes dans la salle, mais il est nécessaire de composer le numéro » : c’est une preuve pour espérer obtenir une place en Centre d’Accueil des Demandeurs d’Asile.

L’hébergement de quelques nuits risque donc de se prolonger.

**« Ce n’est pas le rôle des citoyens »

Le jeune homme est félicité pour son acte car « on ne peut pas laisser les gens dormir dehors ».

Cependant Pierre Grenier, le président délégué de La Cimade à Toulouse, insiste sur le fait que « l’Etat n’a pas à se décharger de ses responsabilités sur les citoyens : ce n’est pas facile d’accueillir des inconnus chez soi, las et fatigués qui ne sont pas forcément d’humeur à faire connaissance. Ce n’est pas le rôle des citoyens !  » s’insurge-il.

**« C’est très bien qu’il y ait des actions humanitaires, caritatives, mais cela ne suffit pas. »

Un groupe d’étudiants pleins de bonne volonté prend la parole à son tour. Ces jeunes espèrent collecter des produits d’hygiène et des médicaments pour les quelques 200 Syriens de l’immeuble du quartier des Izards. Notamment des cachets contre les aigreurs d’estomacs, « sans doute liées à l’anxiété ».

Le président délégué de la Cimade sort de ses gonds : « Je ne comprends pas qu’on en soit là, à chercher des cachets pour le ventre. Il y a Médecin Sans Frontières en face de la gare. Les Syriens n’ont pas besoin de charité, ils ont besoin d’informations, ils ont besoin de droits ! » Puis, un peu confus de cette diatribe, il s’adoucit : « C’est très bien qu’il y ait des actions humanitaires, caritatives, mais cela ne suffit pas. »

**Lutte contre l’expulsion des réfugiés syriens du quartier des Izards

Les associations dénoncent la nonchalance des pouvoirs publics. À l’image du Droit Au Logement 31, non présent dans la salle, qui lutte sur le terrain contre l’expulsion des sans papiers.

Le 9 octobre 2015 les militants du DAL faisaient le pied de grue devant le Tribunal d’Instance de Toulouse contre l’expulsion des Syriens du quartier des Izards, installés dans un immeuble que veut récupérer Habitat Toulouse. Les avocats des familles syriennes ont demandé à ce que l’État soit partie au procès. Celui-ci a été reporté au 6 novembre.