Face à l’incontrôlable augmentation du taux de chômage en Espagne, de plus en plus de jeunes tentent leur chance à l’étranger, et notamment à Toulouse, traditionnelle terre d’accueil des émigrants espagnols. « Univers-cités » est parti à la rencontre de l’un d’eux.

La crise conduit les jeunes Espagnols au départ

En débarquant il y a plus de cinq ans à Toulouse pour suivre une année d’échange Erasmus, Joan Crespo venait de réaliser un des projets qui lui tenaient le plus à cœur : étudier à l’étranger. Mais aujourd’hui, à quelques mois de sa soutenance de thèse en économie, ce n’est plus pour le simple plaisir des études que ce jeune Espagnol originaire de Valence a décidé de prolonger son séjour dans la Ville rose : « Avec la mise en œuvre de coupes budgétaires drastiques dans l’éducation, trouver un poste comme enseignant-chercheur en Espagne est devenu mission impossible, regrette-t-il. C’est la raison pour laquelle je sais que, quoi qu’il m’en coûte, je ne retournerai pas chez moi cette année. »

Pas d’opportunités de carrière en Espagne

Comme Joan, qui jongle entre ses travaux de recherche et son poste d’Attaché temporaire d’enseignement et de recherche (Ater) à Sciences po Toulouse, les jeunes Espagnols sont de plus en plus nombreux à enchaîner études et travail à l’étranger, ou à quitter le pays une fois leurs diplômes en poche. Il faut dire qu’en l’espace d’un an, le taux de chômage dans la péninsule ibérique a augmenté de presque 4% (données Eurostat 2013), pour frôler le seuil fatidique de cinq millions de chômeurs en janvier 2013, et que le pays connaît sa deuxième récession en moins de quatre ans, sapant ainsi tout espoir de redémarrage prochain de l’économie : « Les seules offres proposées en Espagne sont des contrats de courte durée, sans perspective d’avenir, indique Joan. Par ailleurs, la plupart du temps, il s’agit de postes qui n’ont rien à voir avec nos qualifications. En France, en revanche, il est non seulement possible de trouver du travail, mais en plus il correspond à nos domaines de compétences. »

Le rêve toulousain

Pour ces jeunes de la « génération perdue », victimes des ratés économiques à l’origine de la conjoncture actuelle, le dynamisme de la Ville rose, au même titre que celui des villes anglo-saxonnes, allemandes ou latino-américaines, se présente comme une alternative à des années de galère : « Entre l’aéronautique et la vitalité étudiante, Toulouse offre beaucoup d’opportunités, confirme Joan. Beaucoup de mes amis ont ainsi trouvé du travail à Astrium ou à Airbus. Sans oublier que, par chance, nous ne sommes pas bien loin de l’Espagne ! Et puis, l’ambiance y est très agréable. »

Autant d’éléments qui confirment le rôle de la capitale de Midi-Pyrénées comme terre d’accueil des émigrants espagnols : il y a plus de soixante-dix ans, des milliers de Républicains avaient, les premiers, trouvé en Toulouse un refuge, fuyant la répression de l’Espagne franquiste. Une dizaine d’années plus tard, l’essor économique des Trente Glorieuses a ouvert la voie à une première vague d’émigration économique. Aujourd’hui, c’est une génération d’Espagnols bardés de diplômes qui aspire aussi à des lendemains meilleurs dans la Ville rose.