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Comment le parrainage de Florence Aubenas est-il devenu évident ?

Laure Ortiz : A la suite du choix fait par les étudiants de la promotion 2006-2007 de s’appeler Anna Politkowskaïa, ce qui signifiait un hommage au combat pour la liberté de la presse, le droit d’expression et la démocratie. Il était normal que l’on songe à y associer Florence Aubenas, une personne qui connaît dans sa chair le prix de cette liberté.

Quel sens accordez-vous à cette démarche?

L.O: Le choix d’ Anna Politkovskaïa pour la dénomination de la promotion et celui de Florence Aubenas pour l’honorer ont pour moi un sens très fort. Ils révèlent la force des valeurs humanistes et de l’engagement démocratique des étudiants de Sciences- Po Toulouse, leur respect et leur admiration pour le courage de celles et de ceux qui quotidiennement sont prêts à prendre des risques pour satisfaire notre droit à l’information et nous permettre ainsi d’exercer pleinement nos droits de citoyens. Je n’oublie pas non plus que la précédente promotion s’appelle Olympe-de-Gouges, et en tant que féministe, je me réjouis que les étudiants de Sciences-Po Toulouse (qui sont en majorité des étudiantes…) aient choisi encore une fois de rendre hommage à des femmes. Les femmes ne sont plus orphelines de référents féminins et c’est bon que les étudiantes et les étudiants aient choisi de le dire. Je suis fière d’eux.

En ce qui concerne l’initiative de la conférence sur « La presse » qui a eu lieu en amont de la cérémonie, quel était son but premier ? Quel message souhaitiez-vous porter auprès des étudiants ?

L.O: Ce thème a été choisi par Florence Aubenas elle-même et je n’avais aucune commande à lui formuler. Je savais bien qu’il serait question des conditions d’exercice de la liberté de la presse et du droit à l’information et donc d’éthique du journalisme et des rapports entre les journalistes et le pouvoir, les pouvoirs, devrais-je dire (pouvoirs politiques mais aussi médiatiques, financiers, économiques…). C’est une réflexion sur ces questions que je souhaitais, sans autre « message » à faire passer. Je suis une profane de la sociologie politique des médias et j’étais là pour l’écouter autant que vous. J’ai personnellement été comblée car j’ai trouvé que son analyse était puissante. Avec des mots simples et percutants elle a osé révéler une dégradation des conditions d’exercice du métier que fort peu de journalistes oseraient dénoncer.

Quelques mots sur le déroulement de la cérémonie de remise des diplômes. Comment la promotion Anna Politkowskaïa a-t-elle accueilli sa marraine ?

L.O: Si j’en juge par le public nombreux, la qualité des personnalités qui se sont déplacées, la profondeur du discours du président de Région Martin Malvy, et si j’en juge par les « retours » que je reçois chaque jour de ceux qui ont assisté à la cérémonie, Florence Aubenas a fait une très forte impression et chacun garde le souvenir d’une très belle cérémonie très particulière, tranchant par rapport aux autres remises de diplôme. Beaucoup relèvent que la cérémonie a mis en valeur la qualité des étudiants de Sciences-Po et la diversité de leur parcours. C’est une très belle réussite.

Le cru 2007 est un peu spécial : 11 étudiants se sont vus remettre le premier diplôme de l’IEP en 5 ans. La rentrée 2008-2009 inaugure plus officiellement ce nouveau diplôme : que va-t-il changer pour les étudiants ? Quels bénéfices pour la formation ?

L.O: Le nouveau diplôme de Sciences-Po est un master en 5 ans, et cela n’a rien à voir avec une formation généraliste en 4 ans qu’on coiffe d’un « master 2 » qui se résume à un semestre de cours de spécialité et un stage plus ou moins en relation avec le métier visé. Le diplôme de Sciences-Po couronne une formation qui se déploie sur les 5 ans avec des séquences cohérentes de formation pluridisciplinaire généraliste les 4 premiers semestres puis qui s’oriente progressivement vers une formation professionnelle par des connaissances spécialisés et une pédagogie qui privilégie l’exercice pratique, le savoir faire concret sur 3 ans dont un an de mobilité internationale et un semestre final de stage mais aussi un mémoire de recherche. Le diplôme débouche donc sur un panel de spécialités professionnelles dont la recherche. Ce qui est nouveau c’est que le diplômé de Science-po n’aura plus à aller chercher un supplément de 5ème année ailleurs et qu’il pourra entrer directement sur le marché du travail (Je précise que certains le faisaient déjà avec un diplôme en 4 ans). Les bénéfices par rapport au système diplôme + master 2 des Université est très clair. L’étudiant peut choisir une diversité de parcours, faire du journalisme, des relations internationales, de l’économie, s’intéresser à la gestion des risques, aux politiques de lutte contre les discriminations, aux affaires internationales……. Tant mieux s’il s’est spécialisé mais peu importe sa spécialité car c’est à la totalité du panel des spécialités que renvoie l’image du Diplôme de Sciences Po dans l’esprit des recruteurs. Un Diplômé de Sciences Po peut être journaliste, directeur de ressources humaines, directeur de cabinet, attaché parlementaire, consultant, directeur financier….Ce qui compte sur le marché du travail c’est ça ! C’est cette potentialité de mobilité professionnelle, le savoir faire présumé. C’est le réseau que cela crée, entre diplômés, par delà les frontières des métiers.
L’étendue des débouchés possible du Diplôme de Sciences Po et son prestige sont une chance formidable pour chacun des Diplômés car c’est non seulement un vrai passeport pour l’avenir mais un multipass. Les étudiants n’en sont pas assez conscients. Je les entends, je les écoute : ils ne parlent plus que de « master »… Il y a autant de « masters » que de spécialités dans le diplôme. Ils n’ont que ce mot à la bouche, prononcé à l’anglaise autant que possible : « masteur ». Parfois même ils se plaignent que le nom de « leur master » ne figure pas en gros sur le parchemin à la place du mot « Diplôme de Sciences-Po ou d’IEP » . Mais quelle erreur ! Qu’on se le dise.