Ce week-end, les contrôleurs SNCF appellent à la grève nationale. Lundi, la CFDT cheminots annonce qu’elle ne participera pas au mouvement. Rencontre avec Johann Bedel-Navarro, secrétaire général de la CFDT Cehminots Occitanie et animateur du pôle technique ASCT.

Rachel T. : La CFDT Cheminot a retiré son préavis de grève pour le week-end à venir, cependant les autres syndicats des travailleurs ferroviaires ont la ferme intention de mener ce mouvement qui revendique la hausse de leur rémunération. Pourquoi cette divergence au sein de la profession ?

Johann Bedel-Navarro : Tout d’abord, dans la profession nous avons plusieurs syndicats à la SNCF, dont deux courants : un courant conservateur et contestataire et un courant réformiste, porté par la CFDT. L’accord qui a été signé en décembre 2022 n’est pas encore totalement respecté, donc on dialogue depuis plus d’un an sur la pénibilité et la fin de carrière. Il n’y a pas eu d’avancée jusqu’à ce que nous déposions les préavis, et qu’il y ait eu de nombreuses déclarations individuelles d’intention de grève, qu’on appelle D2I pour obtenir des promesses sur l’amélioration de la pénibilité du travail et sur l’embauche de 1000 salariés dont 200 ASCT (Agent du Service Commercial Trains).

Les autres syndicats ont maintenu leur préavis de grève car ils estiment qu’ils obtiendront quelque chose. Nous partons du principe que nous ne laissons pas les agents faire grève quand nous savons qu’ils n’obtiendront rien.

R. T : Avez-vous confiance en la réalisation future des engagements pris par la SNCF ?

J. BN : Tant qu’il y a des négociations, la grève n’est pas envisageable. On demande que l’accord soit appliqué immédiatement. En parallèle, nous allons lancer des actions locales parce que certaines choses doivent être traitées localement. La CFDT Cheminots constate des progrès pour toutes les professions, et pas seulement pour les contrôleurs. La SNCF nous assure la mise en place de groupes de travail qui auraient dû déjà être constitués l’année dernière. 

Depuis que des progrès ont été faits, nous estimons que les agents SNCF ont plus à perdre dans ces trois jours de grève. Nous continuerons à évaluer les chances de gain au fil des négociations. Mais si rien ne se fait, nous agirons. On n’est pas fermés à l’idée d’une grève. Pour ce week-end, il n’y avait aucun intérêt pour nous.

R. T : Depuis cette semaine, il y a une vague de contestation du droit de grève en France. Le Premier ministre, Gabriel Attal, parle de « devoir de travailler », le Président du Sénat dénonce une « prise d’otage ». Que pense la CFDT Cheminots de ces déclarations ?

J. BN : Quand la CFDT fait un plan, ce n’est pas tous les jours. Et si nous, premier syndicat de France, le faisons, alors c’est un vrai problème. Par définition, une grève va contraindre les gens, elle va créer des difficultés. S’il n’y a pas de difficulté, à quoi sert une grève ? Donc, oui, M. Attal peut sortir de la punchline comme il l’entend, mais le droit de grève est protégé par la Constitution. C’est un peu facile de dire cela quand les cheminots font grève, mais quand les agriculteurs sont en grève et bloquent le pays comme ils l’ont fait, et qu’ils essaient de recommencer, on ne s’indigne pas. 

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