Rouler en voiture électrique, même avec des revenus modestes ? Depuis le 14 décembre, le dispositif leasing social permet, sous réserve de conditions d’éligibilité, de louer un véhicule électrique pour seulement 100 euros par mois. Un luxe jusqu’alors réservé aux salaires élevés. Il suscite un tel engouement quil est victime de son succès et ne peut répondre à toute la demande.

Malgré les efforts du gouvernement pour décarboner les routes, en encourageant notamment l’achat de véhicules électriques, ces derniers restent onéreux : ils coûtent en moyenne 10 000 euros de plus que leur équivalent thermique. Un surplus expliqué par un prix élevé des batteries, et donc inaccessible pour beaucoup de bourses. D’autant plus que le bonus écologique vient, quant à lui, de baisser de 1 000 euros. Un coup dur alors que les métropoles se sont fixées pour objectif de transitionner vers des Zones à Faibles Émissions (ZFE). 

La solution du leasing social, voulue par le président de la République, insuffle une nouvelle dynamique à ce marché d’avenir. En 2023, les voitures électriques représentent 16,8% des nouvelles immatriculations ; des chiffres encourageants, mais encore insuffisants pour réguler la quantité de particules fines dans l’air, principal enjeu environnemental du parc automobile. Désormais, 50% des ménages français aux plus faibles revenus peuvent louer l’une d’entre elles à des prix équivalents aux véhicules thermiques, à condition qu’ils rentrent dans les critères de revenus, parcourent plus de 8 000 kilomètres par an et résident à plus de 15km de leur lieu de travail. 

Un dispositif victime de son succès : «On est dépassés par le nombre de demandes»

Le dispositif rencontre d’ores et déjà un véritable succès, selon la ministre de la Transition énergétique, qui se félicite d’un lancement réussi : “plus d’un million de connexions” ont été enregistrées sur la plateforme officielle qui lui est dédiée. Un intérêt qui fait déjà son chemin chez les loueurs et constructeurs, conventionnés par l’État. Ces derniers font face à un véritable raz-de-marée de sollicitations, qu’ils n’ont pas la capacité de gérer. “On est dépassés par le nombre de demandes, c’est incroyable de voir à quel point les gens sont attirés par cette nouvelle offre”, raconte un salarié de SIPA Automobiles, une concession automobile située au nord de Toulouse. Il regrette cependant que la plupart de ces clients ne soient en réalité pas éligibles au dispositif, et ne puissent donc pas en bénéficier. 

Face à l’engouement provoqué par le dispositif, la production des constructeurs (ou l’enveloppe gouvernementale allouée, selon les avis) se retrouve insuffisante. L’État n’a ni les moyens de proposer suffisamment de véhicules à la location sous cette formule, ni de répondre favorablement à toutes les demandes.  À l’échelle du pays, ce sont 1,1 million de foyers avec un revenu inférieur à 15 547 € qui devront changer leur véhicule trop polluant. Et rien qu’à Toulouse, près de 500 000 véhicules du parc actuel doivent être interdits de circulation dans la Ville rose en 2024. Les automobilistes sont donc nombreux à chercher une voiture de remplacement plus écologique et au meilleur prix possible.

La voiture individuelle électrique reste une voiture individuelle

La mesure, qui se veut autant sociale qu’environnementale, fait certes le bonheur des usagers, mais ne convainc pas complètement les associations écologistes. Car si l’idée d’une voiture plus verte est de bon sens, elle reste une solution imparfaite, surtout dans les grandes agglomérations à la densité de population importante. Rallumons l’étoile !, une association qui milite pour un RER toulousain, est certaine que “le train pourrait devenir une alternative fiable, écologique et économique pour les usagers automobilistes”. La ville profite déjà d’un réseau ferroviaire cohérent avec les besoins, et d’une gare centrale nichée au cœur de son agglomération. Des atouts préexistants sur lesquels s’appuyer pour construire le transport urbain de demain.

Ainsi, si l’association reconnaît que le leasing social est “l’un des pas qui permettront de réduire les émissions de gaz à effet de serre des transports”, elle envisage plutôt cette mesure comme une offre complémentaire des transports en commun, qui eux, peuvent et doivent encore être améliorés. Avec près de 4,5 millions de déplacements en voiture, représentant 70% des modes de déplacement de la métropole, Toulouse a effectivement une large marge de progression sur le sujet.

Photo de Mikes-Photography