Depuis 2020, Transgène, une entreprise de biotechnologie strasbourgeoise, a lancé la première phase de tests cliniques de son vaccin. Ce dernier est censé prévenir les risques de rechute du cancer. Il a été élaboré avec l’aide des équipes de chercheurs de l’Oncopole de Toulouse, de l’Institut Curie à Paris, et de deux hôpitaux en Angleterre et aux États-Unis. Après avoir étudié les résultats des 50 patients ayant accepté de se soumettre à l’expérience, les résultats sont plutôt concluants.

« Parmi les six premiers patients atteints d’un cancer ORL, vaccinés en 2020, aucun d’entre eux n’a pour le moment rechuté », affirme le professeur Jean-Pierre Delord, directeur général de l’Institut Claudius Regard et administrateur de l’Institut Universitaire du Cancer de Toulouse (IUCT) Oncopole. Ces premiers résultats, observables sur l’actuelle phase d’essais cliniques du vaccin anti-rechute du cancer, sont positifs. L’entreprise Transgène et les chercheurs de l’Oncopole de Toulouse se disent confiants. Pour eux, ces premiers résultats montrent déjà, a minima, que le vaccin est efficace pour retarder les rechutes des patients atteints de cancer.

Pour ces phases de tests, seulement deux grands ensembles de cancers ont été ciblés par les chercheurs : les cancers de la tête et du cou, et les cancers des ovaires. Un choix qui s’explique par le fait que ce sont des cancers à fort taux de rechute, avec en moyenne un malade sur deux qui rechute dans les deux ou trois ans après leur rémission. Le fait que 100% de primo-vaccinés n’aient toujours pas eu de rechute en plus de deux ans est donc très encourageant. La suppression totale des rechutes, qui est l’objectif à terme, n’est pas encore atteinte ; mais cela n’est peut-être qu’une question de temps.

Un vaccin personnalisé

Ce nouveau vaccin a des résultats encourageants, car contrairement aux vaccins préventifs habituels, celui-ci est injecté après le diagnostic du cancer, et il est produit de manière individualisée. Chaque tumeur retirée par chirurgie sur un patient suivant la phase est analysée en profondeur par un système d’intelligence artificielle.

Le procédé isole, au sein de la tumeur étudiée, 30 000 mutations. Parmi celles-ci, 30 sont ciblées comme étant des antigènes potentiellement provocateurs de rechute. Le vaccin est alors créé sur mesure, afin d’attaquer ces 30 gènes pathogènes précis. Le processus dure entre trois et quatre mois, entre le moment où la tumeur est retirée, et le moment où le patient peut recevoir sa dose personnalisée du vaccin.

Sabrina Le Bars, présidente de l’association de soutien aux personnes atteintes de cancer Corasso, et diagnostiquée d’un cancer de la tête et du cou en 2014, rappelle d’ailleurs que ce vaccin personnalisé est un véritable espoir pour les patients. « Avoir un cancer ORL c’est avoir une épée de Damoclès au dessus de la tête, toujours se demander de quoi demain sera fait. Le vaccin c’est vraiment rassurant pour nous, ça nous permet d’envisager un après à la maladie « 

Combler les failles de l’immunothérapie ordinaire

Le vaccin contre le cancer, et plus précisément contre les rechutes du cancer, est né d’un constat simple : l’immunothérapie est peu efficace pour les cancers ORL, et complètement inefficace pour les patients atteints de cancers des ovaires, dits papillomavirus. Les patients qui ne sont pas réceptifs à l’immunothérapie sont généralement ceux qui ont très peu de lymphocytes T, qui sont des antigènes émis par le corps pour détruire les tissus tumoraux.

La professeur Maha Ayyoub, immunologiste directrice de l’équipe Immunité anti-tumorale et immunothérapie au Centre de Recherche de Cancérologie de Toulouse (CRCT), explique que « le vaccin est basé sur la cellule tumorale, c’est-à-dire ses antigènes et ses protéines, mais pas sur ses signaux de danger, comme c’est le cas pour l’immunothérapie. ». L’objectif du vaccin est donc d’agir comme pour une immunothérapie, après la chirurgie et la radiothérapie des patients, lorsqu’ils sont en rémission, mais justement pour les cancer les moins réceptifs à l’immunothérapie traditionnelle. Jean Pierre Delord rappelle d’ailleurs que « il ne faut pas vacciner quelqu’un qui a encore des cellules cancéreuses visibles ». Les personnes participant aux tests cliniques sont toutes sorties d’affaires lorsqu’on leur administre le vaccin.

LA LUTTE CONTRE LE CANCER À TOULOUSE EN 2023

Le 4 février, c’est la journée mondiale de lutte contre le cancer. Pour cette occasion, la Ligue nationale contre le cancer organise, le 5 février, la cinquième édition de Toulouse Onco Run, pour récolter des fonds pour la recherche médicale. Quatre parcours sont proposés : une course de 10 km, une course de 5 km, une marche de 5 km, et une marche digitale.

Le 26 janvier, l’IUCT Oncopole a présenté le nouveau scanner Omni Legend de GE Healthcare. L’hôpital toulousain est le premier au monde à s’être doté de cette machine, qu’il utilise depuis février 2022 dans le cadre d’essais cliniques. L’objectif de cet équipement est de pouvoir détecter et effectuer le suivi des tumeurs cancéreuses de manière plus rapide, pour alléger le parcours de soin des patients.

Le 4 janvier, le CHU de Toulouse annonce sa dernière grande réussite chirurgicale : une ablation ex-vivo de tumeurs rénales multiples. Cette chirurgie robotique a été réalisée par le docteur Nicolas Doumerc sur une patiente de 68 ans qui avait été diagnostiquée en octobre 2021. Ses tumeurs rénales lui ont été retirées, et elle a également pu bénéficier d’une auto-transplantation rénale et d’une réparation de l’urètre. Cette intervention innovante a permis de traiter la patiente de manière moins invasive et plus efficace que ses précédents traitements.

Lohine Gagnolet