C’est depuis neuf mètres carrés dans la cité universitaire de Chapou, aux Ponts-Jumeaux, que les étudiants témoignent. Neuf mètres carrés qui ne sont plus un couchage mais un lieu de vie à part entière où les étudiants, sans distinction aucune, mangent, travaillent, et passent le temps.

 

En première année de Langues et Littérature Étrangère à Jean Jaurès, Ambre n’a pas encore eu de cours à la faculté : « J’ai été à la pré-rentrée, sinon rien du tout. » Chassés des universités depuis la rentrée scolaire, les étudiants se sont retranchés dans ce lieu de vie étriqué. N’étant pas tous originaires de Toulouse, c’est la cité universitaire qui rythme la plupart de leurs journées, où ils vivent cloisonnés: «  Deux fois par semaine, je n’ai pas le temps de faire de pause ni de prendre l’air« , explique Ambre. Noa, une autre étudiante, en troisième année d’ingénieure, éprouve la même frustration vis-à-vis des mesures sanitaires: « Je le vis super mal. C’est très dur de tenir. Les journées passent vite et j’ai l’impression de n’avoir rien fait. »

Quand on n’a que le distanciel

Un autre phénomène mine les résidents de ces cités : le décrochage scolaire. A l’heure où les esprits mesquins crient au scandale et à la facilité des examens à distance, c’est pourtant les sentiments d’impuissance et d’abandon qui germent derrière les quelques 1173 portes de la résidence: « Ça me manque d’aller en cours. Je décroche« , confie Ambre. « Je suis souvent distraite« , avoue Noa. Et lorsqu’on lui demande s’il va être plus simple de valider son année universitaire, Ambre répond: « Je pense que cela va être plus compliqué, vu que c’est dur de rester concentrée devant un ordinateur toute la journée. »

Solidaires dans l’adversité

Les étudiants ne baissent pas les bras pour autant. Et ce, grâce aux rencontres dans la cité universitaire. En effet, comme l’indique Noa, il est difficile de voir du monde à l’extérieur : « on essaie de s’inviter avec des amis, mais cela ne comble pas le manque de liberté. » Alors, certains en profitent pour se découvrir entre voisins : « Heureusement qu’il y a la résidence ! J’ai rencontré du monde ici« , témoigne Ambre. Un sentiment de communauté qui s’accompagne d’initiatives solidaires entre étudiants, souvent postées sur le groupe Facebook de la résidence Chapou. Certains proposent de se réunir autour d’un atelier crêpes dans les cuisines collectives, quand d’autres donnent des contacts aux plus démunis afin qu’ils puissent se nourrir. Si cela ne comble pas entièrement la détresse psychologique et la précarité physique qui hantent depuis près d’un an la jeunesse qui apprend, ces rares bouffées d’air pur entre étudiants compensent, un tant soit peu, celles qu’ils ne prennent plus dehors.