À l’occasion des Assises du journalisme organisées à Tours, le traitement médiatique réservé aux quartiers a été remis en cause. Souvent trop partiel, ne montrant pas toute la réalité de ces territoires ou encore sensationnaliste, celui-ci pose question.
Quand on pense quartiers populaires, on pense souvent drogues, insécurité, ou encore meurtres, car c’est bien souvent tout ce qu’en laissent paraître les médias. Et le reste, la vie des quartiers, les nombreuses activités et initiatives qui y émergent, on en parle trop peu. Le problème, c’est que cela influence l’opinion publique, qui a par conséquent une mauvaise représentation de ces quartiers.
Un non-intérêt pour ces territoires
Pour Guillaume Villemot, cofondateur du mouvement citoyen Bleu Blanc Zèbre, le premier problème est que le pays regorge d’initiatives extraordinaires, mais qu’on ne les voit pas suffisamment. Et cela surtout parce que les gros médias ne s’intéressent pas aux quartiers :
« Les médias installés dans les quartiers sont souvent associatifs, donc les grands médias ne les regardent pas ou avec condescendance. Il n’y a donc pas de relais de toutes ces initiatives » explique-t-il.
Selon lui, le sujet de ces territoires est très complexe et nécessite du temps pour le comprendre et l’appréhender. Or, nous sommes dans un monde où l’information va très vite, où les journalistes ne prennent pas assez le temps d’aller voir ce qu’il s’y passe.
Second problème, cet entre-soi dans les médias devient nocif et empêche les initiatives locales de progresser. Erwan Ruty, journaliste pour LeMédiaLab93, explique qu’à un stade, ces initiatives atteignent un plafond de verre, car les médias ne les aident pas à trouver les passerelles pour se faire connaître :
«Ces associations n’ont pas forcément les réseaux nécessaires pour faire passer leur propre information des quartiers. Elles n’ont pas non plus les fonds financiers. »
Quelles solutions pour changer ce traitement médiatique ?
Il serait urgent de modifier l’image que la majorité de la population a des quartiers, et cela passe par changer le traitement médiatique qui leur est réservé. Les intervenants aux Assises du journalisme font part de leurs propositions.
Pour Latifa Oulkhouir, directrice du Bondy Blog, cela passe d’abord par plus de diversité et de mixité au sein même des rédactions et des journalistes :
« Le journalisme est un domaine où il y a beaucoup d’entre-soi, notamment social. Le premier levier serait donc d’avoir plus de journalistes qui représentent d’avantage la France et une diversité sociale plus importante. Il faut également que les journalistes arrêtent de faire du sensationnalisme. »
Erwan Ruty la rejoint sur ce point. Il met en avant le fait que les journalistes qui traitent de ces sujets ne connaissent pas du tout les quartiers populaires. Etant à distance et non sur le terrain, ils ne peuvent que répercuter les clichés dominants sur ces territoires.
Guillaume Villemot, quant à lui, est persuadé que les récits sur les quartiers doivent venir de l’intérieur pour faire changer les choses. Il faut donc donner la parole aux habitants de ces territoires. Selon lui, il est nécessaire de produire un fil régulier d’informations sur ce qu’il se passe au quotidien dans ces espaces, pour que cela remonte d’avantage dans les médias et que l’image des quartiers change. Mais tout ne repose pas que sur la responsabilité des médias. Les lecteurs ont aussi un rôle à jouer pour améliorer le traitement médiatique des quartiers :
« Depuis 40 ans, les quartiers ont tendance à faire la une sur ce qui ne va pas plutôt que sur ce qui va. En tant que consommateurs des médias, on a pris l’habitude de s’attarder à des choses qui sont violentes et brutales. »