Troisième passage important à Toulouse pour Benoît Hamon en moins d’un an. Avant sa conférence organisée à Sciences Po par l’association Cactus vendredi 13 octobre, nous avons pu lui poser nos questions lors d’une conférence de presse dans les locaux.
Candidat de la primaire de la gauche, de la présidentielle, cofondateur du mouvement du 1er juillet et autant de raisons successives de s’arrêter dans la Ville Rose. L’occasion de présenter son mouvement qui vise à construire une opposition de gauche au gouvernement, et de revenir sur un épisode particulier de la campagne des primaires, après dix mois très agités politiquement.
Univers-Cités : Vous aviez terminé votre campagne au Zénith, débuté les primaires ici même à Sciences Po, est-ce que vous avez un attachement particulier à Toulouse ?
Benoît Hamon : « Oui, d’abord parce que j’y ai des amis, nombreux, donc c’est toujours sympa de revenir. Demain, nous poserons les fondations du mouvement à Ramonville, pour la Haute-Garonne, c’est une belle opportunité.
Mais il y a un vrai clin d’œil en venant spécifiquement ici. La dernière fois, c’était le jour où le Président de la République a annoncé qu’il ne serait pas candidat [le 1er décembre 2016 NDLR]. Ce jour-là, j’ai retenu deux leçons, et faute de les avoir retenues jusqu’au bout, cela m’aura coûté beaucoup pour la présidentielle.
La première c’est que lorsque l’association Cactus a organisé l’événement, je ne les connaissais pas, ils n’avaient aucun lien avec le PS, avec des amis politiques. Et la salle était pleine. J’aurais confié à l’époque une réunion à la fédération socialiste, la salle eut été aux trois quarts vide. J’ai compris qu’il fallait déborder les appareils pour pouvoir avoir de l’écho.
La seconde leçon est très particulière. On a assisté en direct à l’intervention du Président de la République pendant la conférence, sur vidéoprojecteur. La réaction de la salle a été comme un but dans un stade anglais. Une sorte de hourra, de joie, de délivrance. J’ai pu mesurer à quel point il y avait une envie de se débarrasser de cette façon de faire de la politique pendant le quinquennat. Et mon tort aura été de ne pas avoir rompu plus tôt avec le PS. Si je l’avais fait, oh, je n’aurais pas été Président, c’était compliqué, mais le sort aurait été différent. »
U-C : Cette rupture, relativement tardive avec le PS, ne vous prive-t-elle pas de cadres de parti, d’élus aux Parlements français et européen ? Sur qui pouvez-vous compter ?
BH : « C’est marrant, parce qu’un d’un autre côté j’ai eu beaucoup d’amis qui m’ont dit « houlà là pourquoi tu es parti si tôt ? ». Moi je jugeais que si je voulais donner de la crédibilité au mouvement, on ne devait pas pouvoir m’accuser de vouloir préparer le congrès du PS etc. Je voulais assumer mon risque. Et je l’ai fait sans inciter mes amis à le faire. Le mouvement que nous créons, s’il devait être à l’extérieur du PS la reproduction de ce qui se fait à l’intérieur, tout ça n’aurait aucun intérêt.
Pour les cadres, vous allez voir, il y en aura de plus en plus. Mais ce qui m’intéresse n’est pas de réunir d’ex-socialistes ou d’ex-écolos, bien sûr que je suis content s’ils viennent, mais ce n’est pas le but. Le but c’est de fonder un nouveau mouvement, si on recommence comme au PS ou chez les Verts, j’ai peur que ça ne vire vite à la thérapie de groupe. Et bon, j’ai pas très envie, ça va être vite chiant…pardon de parler comme ça hein. »
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U-C : Au moment où l’intervention du Président se termine, l’année dernière, votre première réaction a été « C’est donc Manuel Valls qui y va ». Est-ce qu’après les primaires, vous avez été surpris de son ralliement à Emmanuel Macron ?
BH : [petit silence] Et si je vous dit que j’ai pas très envie de parler de Manuel Valls ? Enfin, c’est surtout que j’ai plus grand chose de commun avec lui. Y compris dans la manière dont il parle de la République, de façon dévoyée. Il a des obsessions… je regarde ça de loin. Je trouve pathétique la polémique aujourd’hui avec Mélenchon, ou le drapeau européen. Tout ça c’est très loin des sujets importants.
Donc Manuel… euh Valls [long silence] j’ai vu qu’il avait la barbe, le bouc, a part ça y a rien de nouveau, je vois pas trop ce que je pourrais commenter.
Propos recueillis par Simon Arrestat et Hugo Florent