Le « mook« , contraction de magazine et de book, attire un public de plus en plus nombreux. Le détail et le soin apportés aux articles et à la maquette séduisent. Dernière en date, une revue toulousaine. Gibraltar, un pont entre deux mondes se situe entre Afrique et Europe. Santiago Mendita, créateur et directeur de la publication, a répondu à nos questions.

GIB1COUV.jpg Quand Santiago Mendita a découvert XXI en 2008, il a tout de suite accroché au concept. Ce journaliste a traversé de nombreuses rédactions, survécu au rachat des éditions Milan. Il en tire un constat amer sur la presse écrite aujourd’hui. « J’ai vu une presse déprimée. Redevenu pigiste, je me suis aperçu que personne ne prenait de sujets de fond en région. Et c’est encore pire à Paris. Le journaliste est contraint à faire dans l’alimentaire. Sa cote auprès de la population est très basse et le public déserte la presse ».

Le format long du « mook« , au contraire, fait place large aux reportages et aux textes les plus poussés. « Cette revue répond à une double frustration. D’abord celle du lecteur qui désire lire des sujets intéressants, dont le fond est travaillé. Et celle du journaliste, qui est fatigué de faire de l’actu chaude, de l’émotionnel. Le but de « Gibraltar » est de faire une revue en prenant le temps ». Ainsi est née l’idée de Gibraltar.

Remettre de l’homme dans le journalisme

Tout comme Rome, la revue ne s’est pas faite en un jour. Quatre années ont été nécessaires à la concrétisation de ce projet. En décembre dernier, Gibraltar, un pont entre deux mondes sortait en version papier dans plusieurs librairies de Toulouse. 180 pages entre le livre et le magazine, ce premier numéro découvre textes d’écrivain, reportage-BD, articles de fond et portfolio, le tout illustré de dessins et de photographies. Gibraltar fait partie de ces titres qui mélangent les styles sans perdre en cohérence.

Je me perdrai à Ghardaïa
Le rêve européen

Il est question de clandestinité et d’émigration, de village autogéré et de féminisme, de part et d’autre de la Méditerranée. Les sujets semblent communs mais qu’on ne s’y laisse pas tromper, il s’agit là d’histoires qui ne peuvent être lues ailleurs. A la différence des « news magazines« , à Tripoli, Marseille, Barcelone ou Alger, l’humain est placé au centre des sujets. Pour Santiago Mendita, le Sud est un formidable « réservoir de récits humains », qui méritent un beau livre pour être racontés.

Un accueil formidable

Le public est-il touché par la démarche ? Répondra-t-il présent à ce rendez-vous semestriel ? L’accueil correspond aux attentes du journaliste. « C’est même une surprise. Les gens sont attirés par le graphisme, c’est-à-dire la maquette mais aussi les illustrations. Ils apprécient aussi le gros travail derrière, le fait que les auteurs ont pris le temps de travailler leurs sujets ». La revue s’élargira prochainement aux librairies du Sud de la France et du Grand Ouest. Quant à savoir si ce succès va durer, il faudra attendre le second numéro en juin 2013.