Le 29 février a signé la fin de l’exercice pour la saison 2011-2012 de la collecte pour la taxe d’apprentissage. Créé dès 1925 afin de financer la formation des apprentis, cet impôt représente actuellement une manne de deux milliards d’euros que se disputent les nombreux établissements de l’enseignement supérieur.

Or depuis le 1er janvier 2012, la réforme de la taxe d’apprentissage est entrée en vigueur. Cette mesure est censée faire la part belle aux établissements de formation au détriment des Grandes Écoles, anciennement bénéficiaires majeures de ces aides. « Univers-Cités » a rencontré Raphaëlle Surun, responsable des relations extérieures et de l’insertion professionnelle de l’IEP de Toulouse sur la nouvelle politique menée par l’établissement.

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« Univers-Cités»: Qu’est-ce que la taxe d’apprentissage ?

Raphaëlle Surun: La taxe d’apprentissage est un impôt dû par toutes les entreprises domiciliées fiscalement en France du moment qu’elles comptent au minimum un salarié. Cependant des exceptions à la marge existent comme pour le statut d’auto-entrepreneur. Bien entendu, suivant la taille et le poids de l’entreprise, cet impôt est modulable et proportionnel sans plafond. L’intérêt pour les entreprises est qu’elles peuvent choisir de manière totalement arbitraire le-s destinataire-s de leur contribution. Aussi, c’est une forme de subvention de l’enseignement supérieur par les groupes privés qui ont la possibilité de compartimenter leur aide entre plusieurs établissements.

Comment se décompose l’aide reçue par l’IEP ?

La structuration des aides issues de la taxe d’apprentissage à l’IEP est assez particulière. Géographiquement, près de la moitié du financement provient de fleurons de l’économie locale, contre 25% directement de la région parisienne. Au niveau de l’identité même des donateurs, elle reste très diversifiée et est le résultat d’un important travail en amont effectué par la cellule insertion professionnelle de l’établissement. Entreprises fournisseurs, prestataires de service, entreprises locales, partenaires, établissements professionnels des parents d’élèves, entreprises dans lesquelles travaillent les anciens diplômés, sont autant de voies suivies par l’IEP dans sa quête de la taxe d’apprentissage.

Quelle est l’évolution du montant de la taxe d’apprentissage récolté ?

En quatre ans, le montant de la taxe d’apprentissage récolté par l’IEP est passé de 15 000 à 90 000 euros pour l’exercice actuel. Une progression très importante mais qui pèse bien peu dans le budget global de notre établissement. Ce n’est rien en comparaison des écoles concurrentes de type UT1 qui possèdent de véritables structures entièrement dévouées à cette tâche. D’ailleurs, autre point à relativiser : à moins de trouver d’autres entreprises donatrices, les fonds issus de la taxe d’apprentissage devraient vraisemblablement baisser dans les années à venir étant donné que la part « hors-quota » de cet impôt tend à diminuer au profit de celle « quota » propre au financement de contrat d’apprentissage ce qui ne concerne pas l’IEP de Toulouse. Immanquablement, la réforme de janvier 2012 va peser sur notre budget mais l’IEP a les moyens pour réagir et maintenir un niveau important de fonds perçus dans le cadre de cette taxe.

Lorsqu’une entreprise choisit de financer l’IEP, à quelles contre-parties s’attend-elle à avoir droit ?

Même si officiellement aucune contre-partie n’est prévue ou imposée, l’IEP a mis en place une politique qui vise à devenir attractif auprès des entreprises, l’objectif étant de les inciter à reverser une partie ou la totalité de la taxe due à notre établissement. Cela se traduit par la mise à disposition de l’annuaire des élèves – anciens ou actuels –, l’invitation à la soirée de remise des diplômes, la facilitation dans l’organisation de conférences, le relais des offres d’emploi et stage…

À quels types de projet sont destinés les fonds perçus dans le cadre de la taxe d’apprentissage ?

La taxe d’apprentissage est une source de financement majeure pour l’IEP, non pas tant du point de vue purement numéraire mais fonctionnel dans le sens où elle finance directement des projets matériels, parfois décidés grâce aux concours des élèves. Aussi, cette année, elle a permis la rénovation de plusieurs salles de cours, l’achat de matériel informatique (ordinateur, enregistreur vocal…), l’acquisition d’ouvrages et de manuels destinés à la bibliothèque de l’établissement, la mise en place des modules coaching, le financement de la participation de Sciences-Po Toulouse au Forum des métiers ou encore des allers et retours des étudiants engagés dans le programme DISPO.

Ce système est-il pour autant optimal ?

Si un tel système permet aux écoles – grâce à une politique vigoureuse et une stratégie ambitieuse à long terme – de récolter des fonds en proportion conséquente, il n’est pas pour autant exempt de tout reproche. Car bien souvent, on assiste à un saupoudrage des aides. Concrètement, certaines Grandes Écoles, notamment parisiennes, vont rafler la majeure partie de cet impôt au détriment des autres établissements supposément moins attractifs. Bref, il faut savoir jouer des coudes, parvenir à mettre en avant les nombreux atouts présentés par l’IEP tant la concurrence entre établissements est importante. Une tâche assez prenante d’où notre volonté de mobiliser les élèves et les enseignants sur cette question afin qu’ils puissent apporter leur concours.»