Depuis octobre dernier, les bourses du Crous semblent la jouer à pile ou face. Malgré l’annonce en grande pompe de l’instauration d’un dixième mois de bourse, les versements mensuels subissent depuis un retard chronique.
Septembre 2011 : après un été de rumeurs et de négociations, Laurent Wauquiez, ministre de l’Enseignement supérieur, annonce que les 560 000 étudiants boursiers bénéficieront d’un dixième mois de bourse, afin de faire face à des dépenses grandissantes dues au rallongement des périodes universitaires (de septembre à juin). L’effet d’annonce est là, les versements, eux, se font désirer.
Résultat d’une politique insensée ? Ce dixième mois (neuvième mois et demi pour être précis) a été versé, mais il n’a pas été budgété pour l’année 2011, il constitue donc une dépense supplémentaire imprévue pour les caisses de l’Etat qui s’est vu obligé de prélever des fonds normalement consacrés aux fonds d’aide d’urgence. Les paiements jouent alors désormais à cache cache avec les étudiants sur les nerfs. Ils arrivent, sans que l’on puisse connaître la date, ou n’arrivent pas : le revers de la médaille de ce « bonus » tant attendu…
« J’ai été ravie de découvrir que je toucherai des bourses en septembre, explique Maylis, étudiante à l’IEP, mais j’ai compris que je m’étais réjouie trop vite. Le 15 octobre je n’avais toujours rien reçu, j’ai commencé à m’inquiéter car je n’avais aucun courrier, et aux guichets, le personnel du Crous n’arrivait plus à gérer, je crois que je les ai touchées le 28 ! Depuis, je ne touche plus ma bourse avant le 15 du mois, au lieu du 5. »
Réorganiser son budget
De nouvelles échéances qui obligent à une profonde réorganisation du budget étudiant, quand elles ne sont pas facteurs d’angoisse : « Le problème majeur, continue Maylis, se trouve dans le fait que toutes les grosses dépenses sont réalisées en début de mois : le loyer, l’électricité, la carte de transport… Alors avec vos bourses qui n’arrivent pas avant le 15, c’est un vrai casse tête ! »
« Moi, j’ai pu voir venir, quand on est boursier on apprend à anticiper, j’avais mis de l’argent de côté grâce à mon job d’été. Courses, sorties… je n’ai pas changé mon train de vie, en me disant que les bourses finiraient bien par tomber, mais j’avoue que j’étais inquiète. Pour des étudiants plus « just » c’est un vrai problème. Il y a là une forte dimension politique, ce n’est pas comme ça que l’Etat parviendra à jouer contre les inégalités… »
La mobilisation s’organise
« Le dixième mois de bourse a été sorti pour calmer le mouvement étudiant 2009 contre la loi sur la réforme de l’université. Il ne constitue pas une « avancée sociale » dans la mesure où il a toujours été nécessaire pour s’accorder avec le calendrier étudiant (il y avait toujours un mois de carence où les étudiants boursiers ne percevaient rien) », déclare Victoire Louriais membre de l’AGET FSE, syndicat étudiant.
« Apparemment, rien n’est fait pour améliorer la situation, puisque une loi de finances 2012 a été votée qui réduit le budget de 21 Crous sur 28. Etant donné que cela pourra se répercuter sur les bourses, déjà bien mises à mal, cela devrait se ressentir sur les prix des tickets de restoU, les logements, les personnels… »
Et lorsque l’on cherche une explication, difficile de trouver des personnes à même de répondre. Au Crous, la réponse des salariés est simple : « Nous n’avons aucune explication à apporter, veuillez adresser un courrier à la direction, vous verrez bien ce que cela donnera… ».
Loin de se laisser abattre, l’AGET-FSE, syndicat étudiant a décidé d’appeler à l’action la semaine du 30 janvier au 3 février sous la bannière Semaine de la précarité étudiante. Reste à savoir si l’action collective aura plus d’effet…