Deux fois par semaine, une dizaine de personnes descend au sous-sol du 70, allées des Demoiselles. Dans ce parking aménagé, un tapis, des sacs ; c’est pour le cours de boxe. Un cours gratuit et ouvert à tous, comme les autres activités organisées au centre social autogéré. Il y a quelques mois, des familles en difficulté ont pu s’installer dans ces bâtiments grâce à l’action du CREA (Collectif pour la Réquisition, l’Entraide et l’Autogestion). Découverte d’un entraînement pas tout à fait comme les autres.

IMGP2187.jpg Le rendez-vous est à 18 heures pile. « La boxe, ça doit être super-discipliné, alors le tri se fait tout seul », explique Arnaud, l’entraîneur. « Comme dans les clubs, on commence l’année à cinquante et après seulement la moitié des personnes viennent ». Pas très grand mais plutôt baraqué, Arnaud a le regard perçant et le sourire facile. Il aimerait bien que l’effectif du cours soit fixe, mais il s’adapte.

L’école de la vie?

18h15 : une fois en tenue, les boxeurs partent faire un footing d’une demi-heure environ. « Déjà, ça filtre. Plein de gens se rappellent de leur cross de collège et ne veulent pas courir… Mais si t’es pas capable de te donner le mal de courir, alors c’est même pas la peine de faire de la boxe», sentence Arnaud. Eh oui, ça rigole pas. La boxe, c’est du mental.

18h45 : de retour déjà en sueur, il faut continuer l’échauffement avec « le cardio » (des exercices pour accélérer le rythme cardiaque), et le renforcement musculaire (abdos, pompes et compagnie). Puis les élèves s’attellent à travailler leur technique. Directs, crochets, uppercuts: en boxe anglaise, on utilise seulement les poings pour porter les coups au buste et au visage. L’entrainement se termine par les combats – la « mise de gants ». Gants, tapis, sacs : Arnaud prête tout pour le cours. Il a déjà pensé à demander une cotisation de 10 euros, histoire de racheter du matériel. « Mais même ça, j’arrive pas à le faire », confie-t-il. Difficultés de l’autogestion.

Arnaud déclare ne pas voir de lien entre la boxe et son engagement militant. Avant d’arriver dans le sud, il a été boxeur en Bretagne, pendant plusieurs années. A Toulouse, il a commencé par donner des cours au Katenaire, un squat « politique » fermé en avril dernier. « La boxe, c’est un combat intérieur. Moi je compare souvent ça à l’école de la vie : il faut pas t’énerver, encaisser, accepter de prendre des coups… ».

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Ils ont entre 18 et 32 ans, la plupart sont politisés, cherchent à savoir se défendre. Dans la masse aléatoire des boxeurs du CREA, difficile de savoir lesquels ont le plus de choses à prouver ou à traîner derrière eux. Les coups pleuvent mais sont encaissés en rigolant – le plus souvent.

La violence dans les règles

Et attention à ceux qui disent que la boxe, c’est un sport masculin. Ici, quasiment la moitié des élèves sont des filles – et ce ne sont pas celles qui cognent le moins fort. Pour Arnaud, la « gnaque » n’a pas grand chose à voir avec le sexe ou la marque du short.

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Hélène, 25 ans, est exactement du même avis. Quand elle est arrivée pour animer des ateliers avec les enfants du CREA, elle a vu dans ces cours une bonne occasion de remonter sur le ring. De la boxe, elle en a déjà fait pendant cinq ans et ça l’a « transformée ».

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Pas question de faire n’importe quoi donc. « En garde! » : Arnaud passe pour corriger les positions et donne de la voix. Il aimerait bien se faire relayer plus souvent par les « confirmés ». « Après, je ne me vois pas me faire payer pour ça» s’excuse-t-il presque. Et quand on lui demande ce qui le motive à donner tant de temps aux apprentis-boxeurs, l’entraîneur réfléchit avant de répondre : c’est voir les gens se dépasser, faire des choses qu’ils n’auraient jamais pensé être capables de faire.. et pas seulement dans les combats ».

Des entraînements non-mixtes ont commencé fin novembre, ils ont lieu tous les dimanches soir à partir de 18h.

Pour plus d’informations sur le centre autogéré et ce qui s’y passe, http://crea-csa.over-blog.com/