Le plan de retructuration d’AIrbus Group aura des répercussions chez ses sous-traitants. Selon une étude commandée par la CGT d’Airbus, entre 5000 et 7000 emplois pourraient disparaître dans ces entreprises ces prochaines années. « Univers-Cités » a rencontré deux salariés d’entreprises de sous-traitance, B*. et Mélanie.

« Univers-Cités » : On parle souvent des salariés d’Airbus d’une part et des sous­traitants d’autre part, y a­-t­-il vraiment une différence de statut ?
B.: Pour moi, quelqu’un qui fait le même travail que moi chez Airbus est mon équivalent c’est de la coopération, qu’il soit d’Airbus ou d’ailleurs. Cela vient peut-être du fait que j’ai auparavant moi-même travaillé à Airbus en tant qu’intérimaire. Mais sur le terrain, nous n’avons pas l’autorisation de travailler sur les mêmes « plateaux » qu’eux alors qu’on est sur le même lieu de travail. Ce n’est pas forcément un avantage pour la réalisation des projets.

chaîne d'assemblage

« Le nombre de salariés qui vont être licenciés, personne ne le connaît, mais si Airbus passe devant Boeing, tout le monde m’en parle ! » Mélanie, technicienne à Mtek.

Mélanie : C’est indéniable, on n’a pas les mêmes avantages, mon salaire est plus bas, je n’ai pas de RTT, j’ai moins de congés, la cantine est réservée aux salariés d’Airbus ce qui suppose un coût supplémentaire pour moi, je n’ai pas de Comité d’entreprise (CE), pas de 13e mois, pas de prime, enfin, je n’ai pas la reconnaissance qu’ils ont. Et puis avec Airbus, on a quand même la sécurité de l’emploi.

La sous-­traitance est-elle synonyme d’instabilité ?
B. : On fait appel à des sous-traitants pour de courtes périodes, C’est une ressource (désigne le personnel dans le jargon) supplémentaire pendant un temps donné sur un projet. Ce qui veut dire que le jour où Airbus décide de limiter son nombre de ressources, je peux être amené à perdre ma mission. Du coup, soit mes managers me trouvent une autre mission directement, soit je suis en inter-contrat et donc dans l’attente d’une nouvelle mission. Je peux être amené à être mobile pour l’entreprise de sous-traitance, dans une autre ville de l’hexagone et même à l’étranger. Ça peut être compliqué si on a des attaches. Je ne sais pas si je peux refuser une mission qui m’engagerait ailleurs, j’imagine que oui, mais dans quelles conditions, combien de fois je peux refuser, je n’ai encore jamais connu ce genre de situations…

« Je suis comme un joueur de foot professionnel, je passe de club en club, mais je suis beaucoup moins bien payée!  » Mélanie

Mélanie : Ça dépend si ce sont de grosses boîtes, je sais que pour mon cas, MTEC travaille depuis maintenant dix ans avec Airbus et il ne sait pourtant toujours pas ce qu’il va se passer au jour le jour. Après, dans la prestation, il est exigé d’être mobile, moi ça ne me dérange pas, au contraire, ça me plait de me dire que je vais changer tous les deux ans, mais pas tous les six mois ! Par exemple, dernièrement, je ne savais pas ce qu’il allait advenir de ma mission pour fin février, finalement et heureusement, elle est prolongée jusqu’à fin juin.

On annonce une baisse des investissements en Recherche et Développement du côté d’Airbus. Êtes-vous optimiste ?
B. : Je veux rester optimiste. Aujourd’hui, je sais que dans le domaine de l’aéronautique, il y a un probable déclin du nombre de sous-traitants chez Airbus. Je travaille sur un projet où on a limité la Recherche et Développement (R&D), on garde le même avion mais on a changé la motorisation. Ils n’ont pas pour projet de développer un autre avion de A à Z. J’imagine qu’Airbus a développé l’A380 et le 350 pour les rentabiliser, ils vont attendre d’en vendre un maximum avant de lancer de nouveaux projets.
Mélanie : Non. Je suis en R&D et je sais qu’il va falloir me remplacer. C’est inévitable, tu ne peux pas sortir des avions tout le temps, Airbus n’embauche pas en R&D, c’est normal, y’a des périodes de creux. Mais en priorité, Airbus va s’attacher à protéger ses propres salariés, les autres, comme moi, sont vraiment peu confiants en l’avenir. On ne sait pas encore à quelle sauce on va être mangés.

* B. n’a pas souhaité dévoiler son nom ni l’entreprise de sous-traitance pour laquelle il travaille, signe que le sujet Airbus est sensible à Toulouse.