willy-braun-france-digitale2-2.jpgDiplômé de l’ESC Toulouse, Willy Braun est aujourd’hui délégué général de l’association France Digitale. L’organisme se donne pour but de faire de la France le territoire le plus propice possible au développement des startups en réalisant du lobbying auprès des institutions et en animant une communauté de jeunes entreprises du numérique.


« Univers-Cités » : Est-ce que tu peux nous présenter ton parcours, comment es-tu « tombé » dans le milieu des startups ?

Willy Braun : Auvergnat, j’ai fait ma prépa à Clermont-Ferrand. J’ai ensuite intégré l’ESC Toulouse, où je suis resté trois ans. J’ai organisé le startup week-end de Toulouse. Le monde des startups, je l’ai découvert un peu par hasard donc. Celui du numérique, j’ai toujours baigné dedans, je jouais beaucoup par exemple. Après Toulouse, je suis passé par l’EBG* à Paris puis publié un livre*, avant d’intégrer France Digitale.

Alors, France Digitale, c’est quoi ?
Dans le CAC 40, il y a très peu de champions du numérique. Nous, on veut plus de Deezer, Priceminister, Ventes privées et Dailymotion ! D’après nous, il y a deux principales raisons à ce problème : l’environnement français et sa difficulté à attirer des talents et le manque d’échanges entre les startups existantes. Donc concrètement, on fait du lobbying auprès des parlementaires, en réalisant des simulations chiffrées des impacts d’un projet de loi par exemple. Ensuite, on organise des événements pour les membres de la communauté. Par exemple, les directeurs marketing se réunissent, l’un d’entre eux expose son problème et les autres l’aident à le résoudre. Ou bien, on les rassemble autour de questions : comment revendre sa startup à un grand groupe ? Comment réaliser une levée de fonds ? etc.


Que penses-tu de l’environnement français ?

Il y a de nombreux bons points en France. Déjà, il existe beaucoup d’aides publiques comme des abattements de charges sociales. Sur le long court, ce n’est pas top mais la France est l’un des États les plus favorables pour se lancer au début. Ensuite, il existe de très bonnes formations. Le problème : l’environnement français manque de prévisibilité. Il est difficile de faire des prévisions de lois ou de fiscalité. Par exemple, en ce moment, les mesures prises fiscalement sont plutôt favorables mais le problème c’est la communication qu’il y autour, les annonces et contre annonces. C’est la raison d’être de France Digitale d’ailleurs. Ensuite, il y a un manque financement. Si on allouait seulement 0.2% des rétributions des assurances vie aux startups, cela doublerait leur poche d’investissement !

Quel est le profil des startups et startupers inscrits à France Digitale ?
On fait un baromètre chaque année. Je ne sais pas s’il est représentatif des startups d’autres domaines d’activité (greentech etc.) mais de toute façon la majorité des startups françaises sont dans le numérique ! Quand je dis numérique c’est au sens large : réseaux sociaux, objets connectés à internet etc. La majorité des entreprises sont à Paris mais on a une petite dizaine de membres toulousains parmi lesquelles Scooptit ou Netwave. 89% des employés de startups sont en CDI. L’âge moyen des dirigeants est de 43 ans et celui des salariés 32 ans. Ce n’est pas un environnement strictement de jeunes donc. Ingénieurs, diplômés d’ESC, autodidactes et designers sont les quatre profils les plus répandus chez les dirigeants.

Il y a de plus en plus de startups en France. C’est l’environnement ou le changement de mentalités qui favorise ce développement?
Déjà, l’écosystème. On remarque une vague concentrique de startups : des personnes viennent d’une startup puis créent la leur ensuite. Ensuite, on cherche maintenant à donner un sens à ce que l’on fait. Il y a une certaine désillusion de la carrière de grands groupes qui peut finalement être synonyme de frustration. Enfin, il y a de plus en plus de développeurs et de plus en plus d’usages.

Quels conseils donnerais-tu aux jeunes pour se lancer ?
Je reprendrais en reprenant une image d’Eric Carreel, fondateur de withings : le problème en France, c’est que nous faisons des tours de rond-point et qu’on ne sort jamais du rond-point alors qu’il faut prendre la première sortie. On pourra toujours faire demi-tour ensuite. Il faut se lancer parce qu’on ne risque pas tant que cela finalement. Deuxième conseil : n’hésitez pas à faire autre chose avant. Quand on est étudiant on manque de méthode. C’est bien d’aller travailler un peu avant dans une ou deux startups. Même si on a l’impression d’en perdre, on gagne du temps au final.

Est-ce qu’il existe un un sentiment d’appartenance au monde des startups?

Oui. Peut-être presque trop je trouve. Il existe un véritable mythe de l’entrepreneur, un entre-soi, un rapport au monde différent. Il y a des références idéologiques, des auteurs, des repères qui reviennent. C’est une philosophie de la vie. Ils n’hésitent pas à le dire quand ils foirent. Ce qui les rassemble tous : leur vie professionnelle et leur vie personnelle sont très liées, ils parlent sans cesse de leur projet.

*Electronic Business Group: Think-thank sur l’économie digitale
*Internet marketing 2013 de Neila Romdane et Willy Braun – éditions: Elenb