Une journée gastronomique dans les six restaurants  » U  » de Toulouse. Voilà le pari audacieux sur lequel le CROUS de Toulouse a misé. En association avec le chef étoilé des Jardins de l’Opéra, Stéphane Tournié, les cuisiniers des restaurants universitaires ont reçu une formation pour préparer le menu. Mais qu’en est-il du résultat ?

Il est 13h30 au restaurant universitaire de l’Université du Capitole. Je monte les marches du royaume du repas rapide pour étudiants. Une foule de jeunes gens au ventre vide déambule entre les plats, les entrées, les desserts. Tous paraissent fébriles et désireux de se remplir la panse au plus vite. J’essaie d’interpeller les mines affamées en les avertissant qu’aujourd’hui c’est « journée gastronomique ». Les regards de « crocs magnons » en manque de barbaque me font reculer dans ma tentative d’éducation culinaire. Je renonce à les convaincre de ne pas se précipiter vers le stand « steak-frites » et repars, dépitée, chercher mon bol de soupe et mon poisson aux épices. Un repas gastronomique au « RU », est-ce une blague ?

Le sourire aux lèvres et pleine d’enthousiasme gastronomique, je plonge ma cuillère dans ma soupe de potimarron à la vanille, et découvre un fruit de mer non identifié au fond du récipient. Bonne entrée en matière pour ce premier repas « haut de gamme ». Bien qu’ayant eu la main un peu lourde sur le sel, cette soupe est convenable, même si, ma foi, la couleur du liquide ne correspond guère à la douce nuance corail du cucurbitacée. Le pâté en croûte quant à lui est pertinent et les fruits secs qui l’accompagnent – raisin sec, noisette et abricot – ont bonne allure.

Les choses se compliquent quand je plante ma fourchette dans le plat principal, un morceau de saumon au gingembre accompagné d’un méli-mélo de légumes. D’abord, je suis au regret de dire que j’ai beau farfouiller entre les arêtes et la sauce, pas de trace du condiment aphrodisiaque. Alors même si le poisson est bien cuit – une nouveauté appréciable – c’est une grosse déception.

Je me rabats sur les légumes, le fameux méli-mélo, et il me faut rajouter trois petits sachets de sel pour pouvoir avaler une bouchée. Même si d’habitude une pancarte « légumes de régime » est inscrite en face des légumes sans sel, aujourd’hui c’est repas gastronomique et moi je ne suis pas à la diète. Alors merci de mettre du sel, pas trop dans la soupe et un peu dans les légumes, ça ne fera pas de mal.
De son côté, mon voisin paraît satisfait de sa daube au roquefort. Au moins, on sent le roquefort. Encore heureux que ça n’ait pas goût de gingembre. Appelez-moi la direction !

Dernier test avant verdict final : le dessert. Du riz au lait aux fruits exotiques. Malheureusement, si le titre de la composition sucrée est affriolant, le goût de la mixture l’est moins. Une amertume sans nom envahit le palais au contact de ce riz qui du coup n’a plus rien d’exotique. On distingue du kiwi et de la mangue et une envie irrésistible de recracher le tout. On se retient, entre gens éduqués, en songeant au riz au lait de sa grand-mère, certes sans fruit des îles, mais mangeable, voire délicieux. La concurrence était donc ici déloyale. On regrette qu’un peu de vanille ou de fleur d’oranger n’ait pas remplacé ce mélange terrifiant d’amertume et de fruit pas mûrs.

Vous trouvez que je suis dure ? C’est que j’attendais avec une impatience –peut-être démesurée – ce fameux repas, et que le résultat n’est pas à la hauteur de mes espérances culinaires.
Allez, ne soyons pas trop critiques, pour le prix, l’initiative est louable, voire salutaire. Dommage qu’elle n’ait été relayée nulle part, ni sur les réseaux sociaux ni sur des affiches.
Dernière suggestion : un petit café gourmand à la Cafétéria aurait peut-être pesé dans la balance, mais en l’absence de ce sésame on reste tout de même sur sa faim…