Montpellier a accueilli le premier forum national des médias indépendants les 15 et 16 octobre. Télévisions, radios et journaux se sont réunis pour débattre de l’avenir de ce secteur à la marge mais qui ne prétend pas nécessairement le rester.

« Les médias alternatifs ne sont pas une alternative  ». Sous forme de constat comme de revendication, Nicolas Séné du journal Fakir ouvre un week-end de discussions très animées. Tous ici sont loin d’être d’accord mais ont en commun d’appartenir de près ou de loin à ce « tiers secteur » des médias associatifs et alternatifs. La question est d’ailleurs rapidement posée : « Qu’est ce qu’un média alternatif  » ? Un média qui à la fois dans ses contenus et dans sa forme essaie de sortir du cadre majoritaire des médias commerciaux. Fournir une information peu médiatisée au travers de structures non commerciales comme les associations ou les coopératives. La définition, plutôt vague, englobe ainsi l’ensemble des radios associatives, des télévisions comme en sont celles de la Fédération des vidéos et pays de quartier, de la presse militante, avec CQFD, Article 11, Fakir ou Le Monde Diplomatique.

A ce public s’ajoutent certains sites internet d’information comme Mediapart, des associations de critique des médias et surtout un bon nombre de citoyens plus ou moins militants venus s’informer sur l’état actuel du secteur. « Pour un week-end de coupe du monde de rubgy, avec en plus le marathon de Montpellier, deux cent personnes c’est plus qu’une réussite » s’enthousiasme Stan, l’un des organisateurs.

Ecoutez Zamane Ziouane, étudiante en science politique à Montpellier à propos du rôle du journaliste dans la construction de l’information.
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Dépasser la « simple » critique des médias

C’est dans ce joyeux patchwork que prennent place des discussions aussi diverses que « le rôle du journaliste-citoyen », pluralité et pluralisme dans les médias, les guerres médiatiques en Amérique Latine, etc … Les débats sont animés et lors-qu’interviennent certains représentants d’organes de presse locale comme le Journal de Montpellier, les critiques se font rapidement vives de la part de personnalités comme le cinéaste Pierre Carles, rompu depuis des années au « cirque médiatique ».

Mais si la critique des médias est justement un des sujets abordés, l’objectif est d’aller désormais plus loin, d’en dresser le bilan et surtout de construire un autre modèle médiatique. Sur ce qu’il sera, les opinions divergent encore : certains voudraient continuer à « faire subsister une myriade de structures à la marge, qui essaiment et restent dans le contact direct » comme c’est le cas pour Article 11. D’autres ont l’ambition de « renverser le système médiatique et rendre ces médias alternatifs majoritaires » comme le journal Fakir.

A l’offensive, envers et contre toutes les crises

La situation actuelle est pourtant défavorable à ces médias quel que soit leur support. La presse écrite souffre énormément de l’augmentation des coûts de diffusion et de l’essor du numérique. Les radios, elles, voient leur statut associatif remis en cause au niveau européen.

Quant aux télévisions, le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA) les a tout simplement ignorées au moment d’attribuer les nouvelles fréquences pour la TNT et elle restent très confidentielles. Reste Internet, mais même là, les craintes se font jour. « la neutralité du net est en danger  », argue-t-on et l’on se prend à imaginer déjà des contre-réseaux sans possibilité de contrôle gouvernemental. Mais malgré tout « on trouvera toujours des solutions  ». Un peu de publicité institutionnelle par-ci, des financements européens par-là, souscriptions et dons pour le cinéma, les abonnements de la presse papier et bien sûr l’huile de coude bénévole et militante partout.

Et tout ce bric-à-brac tient mine de rien le choc malgré les coups. Après plusieurs années, beaucoup sont impatients de voir la suite : « ça fait vingt à trente ans qu’on tente de survivre en défendant notre bout de gras. Il est désormais temps de passer à l’offensive et d’aller attaquer les médias dominants sur leur terrain ». Qu’on se le dise, ces médias là, nous n’avons pas fini de les voir, de les lire et d’en entendre parler.