Avez-vous jamais franchi la porte de la librairie Floury Frères, sise au cœur floury.jpeg.jpg de la charmante rue de la Colombette ? Faites-le, c’est une bienheureuse expérience.

On entre là dans l’antre du libraire : des livres partout, des piles qui chavirent mais jamais ne tombent. Car 12 000 titres environ peuplent cette librairie spécialisée en littérature française, étrangère et en sciences humaines. Dans un petit recoin, vous aurez la chance d’apercevoir quelques morceaux choisis de littérature jeunesse.

Sans relâche, Eric et Hervé Floury organisent les étals réunis dans les 70m2 de ce temple du livre. Les livreurs débarquent, avec un nouvel arrivage. Ils ne posent pas de questions, ils savent où déposer les colis. « Si on accueillait toutes les nouveautés qui paraissent, il faudrait s’agrandir de 40m2 par an ! », s’exclame l’un de nos hôtes.

Là, on nous explique tout sur le monde de l’édition : les choix marketing, les critères de sélection, les seuils de rentabilité, la concentration qui appauvrit la création, l’évolution de la filière, l’inquiétude mesurée face aux sites marchands sur internet…Les choix des ouvrages, ici, ne sont pas faits selon des critères de vente. « D’ailleurs, quand un livre commence à bien se vendre, ce n’est plus chez nous qu’on vient l’acheter ! » s’exclament-ils.

Hervé et Eric, ce sont les libraires découvertes, ceux qui lisent, qui connaissent, qui aiment la littérature. Et qui savent rendre hommage à certaines professions auxquelles on ne pense jamais, comme les représentants des maisons d’édition. « Lorsqu’ils connaissent leurs métiers, ce sont eux qui nous aident à faire nos sélections. Ils connaissent nos goûts et ceux de nos lecteurs ».

C’est au tour du premier habitué de pousser la jolie porte de verre, en quête de discussion et de découverte littéraire. Au fil des heures, on se rend compte que chaque « client » est connu par son nom, on sait ce qu’il vient chercher. Une jeune lycéenne entre pour acheter le roman qu’elle doit étudier en classe. C’est Eric qui terminera de citer le titre de l’ouvrage, déclarant tout de go, sans même vérifier, que l’édition est épuisée. Remarque acerbe d’Hervé : « les profs pourraient quand même se renseigner avant de choisir d’étudier un livre… ».

La discussion dérive sur les dernières sorties littéraires, les clients s’en mêlent. « D’ailleurs, ce sont souvent nos clients qui nous font découvrir de nouveaux titres ». Des clients qui semblent enfin se rendre compte de l’importance de leur rôle pour continuer à faire vivre les petites enseignes. Hervé nous rapporte, non sans malice, ce qu’un client lui a récemment confié : « c’est aussi à nous lecteurs, de faire quelque chose. Votre lieu est important, c’est notre devoir de le défendre, donc à nous d’acheter ».

Allez, comme on nous le conseille, relisons la lettre de Diderot aux libraires et poussons la porte de ce commerce. C’est notre responsabilité de le faire vivre.