Le 16 janvier, Emmanuel Macron provoque la polémique en défendant un « réarmement démographique ». Alors qu’il a annoncé un plan pour relancer les naissances, des scientifiques et des citoyens remettent en cause la natalité à tout prix.

« Les organismes constitués, les Églises, les États, les partis politiques, les économistes, les instituts. Tous à quelques exceptions près sont natalistes », clame Didier Barthès, porte-parole de l’association Démographie responsable. Être nataliste, c’est encourager la natalité de la population avec des mesures prises par l’État. Emmanuel Macron, comme l’ensemble de ses prédécesseurs et de ses adversaires politiques, adhère à des politiques natalistes.

La France, désignée comme la championne d’Europe de la natalité, connaît en 2023 une baisse de 20% des naissances par rapport à 2010. La chute de la natalité fait redouter à certains un effondrement de la société et de l’économie, comme en témoigne ce rapport du Sénat datant de janvier 2024 : « les élus nationaux sont responsables du renouvellement des générations, ainsi que de la pérennité et de la survie de leur pays ». Stéphane Ravier, sénateur zemmouriste et auteur de ce rapport, affirme que la survie de la France dépend du nombre des naissances.

La majorité des économistes a, elle aussi, des discours pro-nataliste. Selon les théories néo-classiques, la croissance économique dépend entre autres de la démographie car les individus fournissent du travail, indispensable à la croissance économique. En France, les dirigeants se préoccupent particulièrement d’une menace à notre système social. « Alors que les comptes de la Sécurité sociale sont déjà dans le rouge et que le nombre d’actifs baisse inexorablement par rapport à celui des retraités, le statu quo ne sera pas tenable », soutient Le Monde dans son éditorial du 18 janvier. Or, « faire beaucoup de jeunes pour financer les retraites, c’est s’assurer d’avoir le même problème à une échelle supérieure dans quelques années, c’est une pyramide sans fin », affirme Didier Barthès.

Contre le discours nataliste : de rares voix dissidentes

« Les personnalités politiques en France sont majoritairement natalistes alors que, dans la population française, il y a une majorité de gens qui sont pour une baisse de la démographie », souligne le porte-parole de Démographie responsable. En effet, selon une enquête IFOP de 2022, 65% des interrogés pensent que la population française doit être stabilisée (49%) ou réduite (16%). Les économistes qui préconisent une baisse de la démographie, aussi appelés les néomalthusiens, sont peu nombreux.

Ce sont surtout les scientifiques qui alertent sur l’augmentation inquiétante de la population, qui a un effet important sur l’environnement. « On fait comme si démographie et environnement étaient deux sujets séparés, alors qu’ils sont indissociablement liés », témoignent des scientifiques dans une tribune au Monde. Alors que l’humanité se compose de 7,6 milliards d’êtres humains, la population devrait atteindre 11,2 milliards de personnes en 2100, selon des estimations de l’ONU. « La population a été multipliée par huit depuis 1800, ce ne sont pas des chiffres normaux. Ce qui a permis à l’humanité de durer, ce sont des effectifs en équilibre avec la biosphère. Or, aujourd’hui ce n’est plus le cas », souffle Didier Barthès. Cette croissance démographique devenue incontrôlable pourrait conduire à une « véritable catastrophe pour notre planète : destruction de la biodiversité, ressources en eau menacées […], déplacements massifs de populations », alertent les signataires de la tribune du Monde.

L’humanité se multiplie et « exerce une pression sur l’environnement », affirme Didier Barthès, engendrant de plus en plus de pollution et de déchets. Ces derniers ont un impact négatif sur la reproduction, du fait des « perturbateurs endocriniens ou encore de la pollution de l’air ». Pour préserver l’environnement et la fertilité, un des moyens serait donc de ralentir l’explosion démographique de l’humanité.

Crédit photo : Amy West