Christian Authier est journaliste à «L’Opinion indépendante», à Toulouse. Cette année, son dernier livre, «Une belle époque» (Ed.Stock) son quatrième roman, a fait partie de la sélection du Prix Renaudot…
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Univers-cités : Selon vous, à quoi sert un prix littéraire ?

Christian Authier : Il s’agit simplement de couronner une œuvre littéraire à la base ; bien que cette récompense devienne de plus en plus un produit commercial. Par ailleurs, c’est un rituel qui compte aussi son lot d’inattendu : on mise toujours sur des favoris, ce qui n’empêche pas certaines surprises : en 1932, Céline n’a pas eu le Goncourt alors même qu’il était sûr de son coup. En 1998 également, Houellebecq fut également «le candidat malheureux » du Goncourt avec son best-seller « Les Particules élémentaires ».

– Pour un écrivain, un prix littéraire est important parce qu’il signe la reconnaissance de ses pairs… ou pour les chiffres de vente qu’il génère?

Un prix littéraire, soyons franc, peut changer la vie d’un écrivain d’un point de vue matériel surtout lorsqu’il est important. Bien sûr, il pèse aussi sur sa notoriété, mais l’aspect matériel n’est pas étranger à la suite de sa carrière puisque d’une certaine manière, c’est ce qui l’aide à durer. Quand on sait qu’un auteur touche environ 2 euros par livre, c’est un détail qui a son importance.

Vous avez déjà obtenu le prix de Flore, puis le prix Nimier en 2006 pour « Les liens défaits». Donnez-vous aux prix littéraires un sens particulier dans votre carrière ?

Très honnêtement, ça ne change en rien ma manière de travailler au quotidien. Je reconnais être heureux d’avoir obtenu ces reconnaissances, mais je vous mentirais en disant qu’il y a un avant et un après prix littéraire. Pour l’écrivain que je suis, ça a été l’occasion pour moi de devenir quelqu’un de visible dans la sphère littéraire. En tout cas, une chose est sûre : ma carrière n’a pas connu un vent de prospérité. Ce fut un bonheur d’obtenir le prix Nimier, qui me tenait vraiment à cœur, mais le Nimier ne fait pas vendre !

Justement, vous faites la distinction entre les prix littéraires que vous avez obtenus ? Certains ont-ils plus d’importance à vos yeux ?

Je reconnais que le prix Nimier représentait pour moi, et c’est toujours le cas, quelque chose de particulier. Non pas qu’il soit plus prestigieux que les autres : il ne possède pas un rang très significatif en terme de puissance de vente… mais le fait est qu’un certain nombre d’écrivains que j’adore l’ont eu. Et puis, à l’origine de ce prix, il y a ce désir de couronner des écrivains assez jeunes, en devenir, une idée que je trouve assez noble.

Cette année, vous avez été en lice pour le Renaudot…

Oui, je ne l’ai pas eu, mais en guise de réponse, je citerais mon éditeur : « N’attendons rien, nous ne serons pas déçus », m’a-t-il répété : il avait raison !

Dans votre dernier ouvrage « La Belle Epoque » , vous racontez notamment vos années à Sciences-Po : qu’en retenez-vous ?

D’abord, un brassage étonnant de gens d’origines diverses ; et puis bien sûr, cet enthousiasme un peu inconscient de la jeunesse, que j’évoque avec une certaine nostalgie dans mon livre.Je suis d’ailleurs resté en contact avec pas mal d’anciens de Sciences-Po.

Être écrivain à Toulouse, et plus généralement, être un écrivain provincial : quelle réalité, quelles difficultés?

Vivre à Toulouse a été un véritable choix de ma part. Les conditions de vie me conviennent mieux : On est peut-être plus loin du « petit milieu littéraire » parisien, mais si les connivences et les réseaux relationnels qui s’y tissent peuvent représenter un avantage d’une certaine manière, on y rencontre une pression beaucoup plus forte en retour. Et puis, surtout, les tentations sont moindres en province, et pour ce qui est de mon cas, c’est peut-être préférable…

Des projets en cours ?

Je termine un livre, qui n’est pas un roman cette fois : une sorte de rétrospective, qui va s’appeler « Deuxième séance », dans laquelle je reviendrai sur une cinquantaine de films passés inaperçus auprès du public ou de la critique. La vitalité de ces œuvres iconoclastes me fascine…


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Dernier livre lu Le Temps de Franco de Michel Del Castillo.

Dernier livre que vous avez adoré Il faut qu’il parte de Sébastien Lapaque.

Livre de chevet Monsieur Jadis d’Antoine Blondin.

Une source d’inspiration La musique,…la vie, et la littérature.

Un remède contre la page blanche Me promener dans la rue. Me poser dans un bistrot… J’y croise certaines scènes de la vie, j’y entends des bribes de conversations qui sont des pépites d’inspiration…

Une œuvre d’art non littéraire: Une chanson… que je ne considère pas comme un art mineur contrairement à Gainsbourg ! Il s’agit de « Cars and Girls » de Prefab Sprout, un groupe anglais des années 80…

Un artiste ?: Anselme Selosse, un vigneron champenois. Il veut que son champagne ait les bulles carrées…

Un instrument de musique: La trompette de Miles.

Un lieu à Toulouse: La basilique Saint-Sernin.

Un autre destin: Joueur de foot… ou star du rock.

Pascal Dessaint s’est installé à Toulouse en 1983. C’est d’ailleurs le lieu même de la plupart de ses histoires. Ses romans ont été récompensés par de nombreux prix.

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Univers-cités : Selon vous, à quoi sert un prix littéraire ?

Pascal Dessaint : Avant tout à attirer l’attention sur un livre. Dans le flot de la production éditoriale, il est important que certains d’entre eux soient remarqués. Cela évite aussi à d’autres de tomber trop rapidement dans l’oubli.

Pour un écrivain, un prix littéraire est important parce qu’il signe la reconnaissance de ses pairs… ou pour les chiffres de vente qu’il génère?

Pour être juste, disons qu’il y a un peu tout ça à la fois. Quand Laurent Godet reçoit le Goncourt par exemple, c’est une consécration tout à fait méritée. Je reconnais que par ailleurs, le choix de certains jurys peut parfois se révéler surprenant : on peut regretter un manque de curiosité de la part des jurys des grands prix et à ce titre, on peut toujours aspirer à une vision plus large, mais est-ce possible ?

Dans votre cas, pas mal de prix ont jalonné votre carrière : cette année vous avez obtenu le Prix Mystère de la Critique, comme en 1996 ; en 2000 le Grand Prix de la littérature policière, le Grand Prix du roman noir français en 2006… Donnez-vous aux prix littéraires un sens particulier ?

Il est clair que ma vie d’écrivain aurait été tout autre sans ces reconnaissances, c’est indéniable. Ils ont tous apporté un plus non négligeable à chaque étape de ma carrière. Le Grand prix de la littérature policière en 96, par exemple, a accompagné le succès déjà remporté par mon livre, lui permettant de cette manière d’allonger sa durée de vie, qui a été relancée sur environ six mois. Le Prix Mystère de la Critique, quant à lui a eu pour effet de concrétiser une dynamique, puisque c’est lui qui m’a fait connaitre. Et puis, c’est un prix que je viens de recevoir pour la seconde fois, à douze ans d’intervalle, et ça, ça a du sens.

Vous faites la distinction entre les prix littéraires que vous avez reçus ? Certains ont-ils plus d’importance à vos yeux où représentent-ils des reconnaissances d’égale valeur ?

Après seize ans d’écriture, j’ai obtenu les prix les plus prestigieux de ma catégorie : par conséquent, tous comptent pour moi bien évidemment. Mais j’avoue qu’en terme de plaisir, le Grand Prix de Cognac a laissé une trace nette et franche. Il m’a abreuvé d’une énergie extraordinaire. De plus, le film adapté de mon livre est en cours de production : dans ces cas-là, on peut se laisser dire qu’un prix peut en cacher un autre !

Être écrivain à Toulouse, et plus généralement, être un écrivain provincial, loin du microcosme littéraire parisien, qu’est-ce que ça signifie pour vous ?

Il existe bien un microcosme parisien, mais on oublie souvent de dire qu’un grand nombre d’écrivains vivent en province. Pour ma part, je considère cette situation comme une chance, un luxe. Et puis, plus pragmatiquement, vivre de sa plume est parfois difficile : de ce point de vue, vivre en province coûte bien moins cher !

Vous avez des projets en cours ?

La sortie de mon prochain livre est prévue pour le 4 mars : il s’agira d’un recueil de chroniques vertes et vagabondes… un ouvrage d’humeur sur la nature.


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Dernier livre lu: Personne n’est parfait de Donald Westlake.

Dernier livre que vous avez adoré: La Réserve de Russell Banks.

Livre de chevet: Dalva de Jim Harrison.

Une source d’inspiration: La nature.

Un remède contre la page blanche: Marcher.

Un artiste: Modigliani.

Un instrument de musique: Le piano.

Un lieu à Toulouse: Le dernier étage du parking des Carmes.

Un autre destin: Guide de montagne.