Au cœur du quartier Saint-Cyprien, face au musée des Abattoirs, on trouve un lieu mythique du tango argentin qui a rythmé pendant plus de dix ans les nuits toulousaines. Jean-Pierre Pech, maître du « Petit Diable » [[Le Petit Diable, 99 allées Charles de Fitte, 31300 Toulouse. Tel: 05.61.42.86.95]] depuis 1991 tenait à en faire un bar aux multiples facettes. Le-petit-diable.jpg

C’est en 1997 que Jean-Pierre Pech importe le concept de milonga à Toulouse. La milonga, soeur aînée du tango est une danse populaire née à Buenos Aires. Par extension, c’est aussi le lieu où on danse le tango argentin. Depuis de nombreux bars ont repris cette formule qui mêle cours de danse et practica.

« J’ai souhaité donner à ce lieu une âme en y organisant des expositions, du café théâtre et des concerts : le « Petit Diable » a ainsi vu défiler les grands danseurs de tango argentin et de nombreux artistes tels que le groupe Gotan Project », nous confie Jean-Pierre Pech.

Le « Petit Diable » c’est aussi un lieu de libre expression : en témoigne la superposition des peintures comme autant de tranches de vie vécues par les murs. Plusieurs artistes ont également semé ça et là des diablotins, véritables effigies du bar.

Malheureusement menacé par le poids des contraintes économiques, le Petit Diable risque de fermer ses portes fin 2007. Allez vite y faire un tour !

—–
Le tango est né à la fin du XIXème siècle en Argentine et en Uruguay, dans les quartiers populaires de Bueno Aires et Montevideo. Musique lente et sensuelle, on danse sur le tango en marchant sur les temps forts.
—–

Les fondamentaux du tango argentin par Nicole Faur

Nicole-Faur-_tango_.jpgSurnommée « Tita », figure incontournable du tango toulousain, elle nous rappelle les fondamentaux du véritable tango argentin. Née à Empalot, cette ancienne professeure de tango âgée de 60 ans critique un tango qu’elle juge trop « européanisé ». Aujourd’hui elle se consacre à l’écriture d’un polar sur cette danse qui la fait tant vibrer.

Pour vous, le tango c’est quoi ?
Le tango, c’est une danse populaire. Les vrais danseurs sont bien dans leurs baskets. Quand on danse, on doit se marrer, on fait pas la gueule, c’est la joie, on s’amuse. C’est un peu comme les gens qui font du hip hop : on doit avoir du plaisir. On ne danse pas pour se montrer mais pour partager avec l’autre, être à son écoute.

Le tango c’est d’abord un lieu de vie. S’il n’y a pas un bar avec des grandes gueules pour rire, pour moi, c’est pas du tango ! Au départ à Buenos Aires, les danseurs, c’était des mafieux et des prostituées.

Et en France ?
Le problème c’est que ce n’est pas notre culture. On a un rapport au corps qui est différent de celui des sud-américains. L’autre différence c’est qu’en France, les danseurs ont tous un bac+8, alors qu’en Argentine, ils ont un bac-8 ! A Buenos Aires, ce sont des gens des cités qui savent bouger. En France on se prend trop au sérieux, ça manque d’humour et de légèreté. À Toulouse, il y a des endroits où c’est Alzheimer : on donne un bonbon à la menthe à l’entrée pour que les danseurs aient bonne haleine.

Et les danseurs dans tout ça ?
Je pense que la plupart des gens ont une image caricaturale du tango. Quand les gens voient danser un couple, ils ont l’impression qu’ils font des choses très compliquées ; malgré tout, ils ont l’air de s’entendre. Cette image du couple en osmose correspond à un fantasme collectif. Les danseurs qui arrivent ont une blessure narcissique, ils ne savent pas distinguer le pied droit du pied gauche et ils ont des problèmes de toucher. Le tango, c’est pour eux un moyen d’être au centre du monde, mais ce n’est pas thérapeutique du tout, ils feraient mieux d’aller chez un psy. Moi j’ai fait psy et tango, j’ai lâché le tango !

Quel avenir prédisez-vous au tango en France ?
Il y a toujours eu des hauts et des bas. C’est une danse populaire vivante : tant qu’il y a des musiciens qui créent de la musique comme le « Gotan » , la danse se renouvelle. Le dernier mouvement de Tango, le tango électro avec Gotan Project dans les années 90, a inspiré des danseurs déjà performants pour créer un style nouveau. En France même si on est plutôt dans un « bas », ça remontera.