« Desaparecido » pendant deux semaines, Marco Bechis compte parmi les rares prisonniers ayant survécu à la dictature. « Garage Olimpo » est avant tout un témoignage. La camera de Marco Bechis nous emmène là d’où si peu sont revenus.

Dans ce film qu’il dit autobiographique, Marco Bechis s’est inspiré de son propre vécu pour retracer l’histoire de Maria, 18 ans, arrêtée à son domicile et emmenée dans le « garage olimpo ».

garage_olimpo-65db2.jpg Le « garage olimpo », c’est là, juste dans un sous-sol de la ville. Lorsqu’on y est amené, on ne verra que les murs de sa cellule, et encore. Tous les détenus y passeront une grande partie de leur temps les yeux bandés. Par un témoignage avant tout sonore, Marco Bechis nous plonge, à travers son héroïne, dans ce passé noir de l’Argentine avec un réalisme déroutant. De son vécu, comme tous ceux de sa génération tombés dans les filets de la dictature, restent les sons : bruissement strident des portes, rebond de la balle de ping-pong des hommes de la dictature qui font passer le temps, et la radio…

Volume poussé à fond, son écho retentit dans les couloir du garage. Couvrir les cris, certainement. Car les souffrances des prisonniers ne sont pas portées crûment au regard du spectateur qui est malgré tout propulsé dans l’horreur vécu par près de 30 000 « desaparecidos ». Témoin d’une vie qui, là haut, suit son cours, la radio résonne de manière insolente entre les murs macabres de la prison comme une intruse dans ce qui n’a plus rien de vivant ni d’humain. Comme un lien rompu entre ces deux mondes, on transite du sous-sol à la surface par le son d’une chanson en vogue qui filtre dehors par les canalisations et résonne sourdement dans la rue.

Un écho dont on ne saurait situer l’origine, une réalité bien présente mais inaccessible. Une dictature qui sévit, en silence, ou presque, dans un murmure, imparable. La vie au dehors, elle, est suspendue. Elle continue malgré tout, rythmée par les disparitions et l’insupportable silence qui les entoure. Police indolente et condescendante, Église souvent complice, les familles à la recherche de leur disparu se retrouvent rapidement confrontées à l’impuissance.

Garage Olimpo, film culte devenu incontournable en Argentine, se veut à la frontière avec le documentaire. Il a, à sa sortie en 1999, fait l’effet d’une bombe : incommodante pour certains, appréhension pour d’autres chez qui la peur était toujours présente. Indispensable au travail de mémoire, il constitue un précieux témoignage pour les familles des victimes, la société argentine dans son ensemble et les futures générations.

Voir l’entretien avec le réalisateur, Marco Bechis.

 Garage Olimpo, trailer