Entre l’IEP et l’Université Toulouse 1 – Capitole, les relations ont longtemps stagné avant de subir un sérieux coup de fouet. Tutelle, autonomisation puis mise en concurrence : panorama d’une histoire bien remplie.

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Si le désordre a souvent régné entre l’IEP et UT1, il n’en a pas toujours été ainsi. Le début de l’histoire remonte à 1948, année de naissance de ce qui est alors l’Institut d’Etudes Politiques de l’Université de Toulouse (IEPUT). Les premières décennies ne sont guère tumultueuses. L’UT1 est alors l’établissement d’enseignement supérieur de référence en matière juridique à Toulouse.

L’IEP, lui, se contente du rôle prestigieux inhérent à son statut de grande école, affilié à son voisin d’en face. Il est alors considéré comme un cursus complémentaire, d’une durée de trois ans. En aucun cas une formation à part entière. «Nous étudiions à Sciences Po comme certains le font aujourd’hui à l’ENA, toutes proportions gardées», résume Christian Lavialle, vice-président de l’Arsenal.

Les deux établissements partageaient quelques enseignants (notamment en droit), des sièges au conseil d’administration et des postes de directoire. André Cabanis, qui occupa la direction de l’IEP entre 1980 et 1995, enseignait également de l’autre côté de la rue des Puits-Creusés. D’une certaine manière, les deux entités universitaires s’entendaient à merveille, tant que l’IEP n’exprimait pas trop fort ses velléités d’autonomie.

« L’IEP a été traité comme une UFR »

Arrive alors le décret 89-902 du 18 décembre 1989. L’IEPUT devient l’IEP et obtient le statut d’établissement public administratif. Un semblant d’autonomisation, qui doit remettre à l’honneur la science politique dans la ville rose et apporter à Sciences Po des champs de compétences supplémentaires. Mais pour Toulouse, l’avancée restera lettre morte. D’après Laure Ortiz, qui dirigea l’IEP entre 2000 et 2010, «l’IEP et l’UT1 n’ont jamais tiré les conséquences de cette autonomisation, et l’IEP a continué d’être géré comme une simple UFR (ndlr : Unité de formation et de recherche ; autrement dit, une antenne universitaire), sans les avantages liés à ce statut».

Pour preuve, il a longtemps été difficile d’obtenir la moindre équivalence en droit à l’UT1 après avoir étudié à l’IEP. De quoi pousser la directrice à mettre un coup de pied dans la fourmilière. «Il fallait que cesse ce sous-développement de Sciences Po ! Pour tout vous dire, le ministère de l’Enseignement supérieur avait songé, durant les années 1980, à supprimer l’établissement, peu convaincu de son utilité !»

Le diplôme porté à cinq ans

Avec Laure Ortiz à la tête de Sciences Po Toulouse, les choses vont sérieusement changer. Les enseignements délivrés pour commencer, ce qui généra le départ de nombreux professeurs issus de l’UT1 dont les cours n’avaient pas été renouvelés. «Je suis arrivée à la demande de jeunes professeurs qui en avaient marre que la science politique soit un sous-ersatz du droit.»

Avec la loi relative aux libertés et responsabilités des universités (LRU, votée en août 2007), Sciences Po en a profité pour porter la durée du diplôme de trois à quatre, puis à cinq ans. Une mesure vitale, puisque «sans le master, [Sciences Po Toulouse] serait mort», justifie Laure Ortiz. De sorte qu’aujourd’hui, les deux établissements sont sur des logiques concurrentielles. C’est ainsi que l’UT1 a réquisitionné plusieurs masters initialement proposés par l’IEP et renie à ce dernier le droit de délivrer un doctorat.

Les relations sont actuellement plus paisibles, mais l’opposition entre ces deux incontournables du centre-ville toulousain symbolise un affrontement larvé entre deux conceptions de l’enseignement supérieur. Grande école d’un côté, université de l’autre, si ce n’est pas la science politique contre le droit.