Les entreprises de pompes funèbres sont au cœur de la lutte contre le coronavirus. Leur rôle est essentiel, mais les professionnels courent des risques importants en intervenant dans les hôpitaux et auprès des familles.

Reconnu comme secteur essentiel au même titre que la santé ou la grande distribution, les entreprises de pompes funèbres sont aussi en première ligne face à la crise sanitaire. Des consignes spécifiques à la profession ont été transmises par le Haut Conseil à la santé publique à travers deux décrets. Le premier, publié le 18 février, interdisait à la famille de revoir le corps si la personne était décédée du covid-19. Il fallait également procéder à une mise en bière immédiate, afin de limiter les risques de contagion.

Un second décret, émis jeudi 26 mars, rend caduc le premier en indiquant que le corps n’est plus ou peu contagieux après le décès. Le corps peut être présenté aux proches à une distance d’au moins un mètre, et famille comme professionnels doivent être équipés de protections complètes.

A ce jour, toutes les entreprises funéraires toulousaines n’ont pas eu à prendre en charge des décès liés au covid-19. Les autres ne sont pas toutes à égalité face à l’épidémie.

Des consignes très restrictives

Une importante entreprise funéraire de la région, qui a préféré rester anonyme, explique appliquer les consignes de la préfecture, qui correspondent à celles du premier décret. Le corps est mis en bière en deux housses hermétiques, dans un cercueil simple, et les moments de recueillement sont très limités. Seule la famille proche, le conjoint, les frères et sœurs et les enfants du défunt, peuvent assister aux cérémonies. De plus, lors des rendez-vous dans l’entreprise funéraire, deux personnes maximum sont accueillies par bureau.

L’entreprise dispose d’un stock important de masques, gants et gel hydroalcoolique, puisque ce sont des équipements qu’ils utilisent régulièrement dans l’exercice dans leur profession. Elle pourrait toutefois bientôt être à court de gel désinfectant. L’entreprise indique donc ne pas craindre pour la santé de ses employés, mais concède que « certains confrères sont en difficultés ».

Matériel en rupture de stock

Pour Michel Mandou, directeur des pompes funèbres Mandou, le second décret est dangereux. « Il met en jeu la santé du personnel, on refuse de le faire. » Dans son entreprise, il applique donc les mêmes consignes que son confrère : cérémonies et accueil des familles limitées, distanciation, lavage de mains régulier… Mais l’entreprise ne dispose pas de suffisamment de matériel. « On est en rupture de stock. On a bien deux-trois masques, mais ils viennent de gens qui ont eu pitié de nous. On n’a toujours rien reçu de la préfecture. L’agence de santé régionale est incapable de nous apporter des réponses… »

De plus, « tout le monde ne joue pas le jeu ». Michel Mandou explique que certains médecins ne précisent pas toujours que les patients sont décédés du covid-19, ou que des cliniques ne mettent pas en place les consignes d’éloignement au moment de la récupération des corps. « Quand on a une suspicion, on utilise des combinaisons jetables, mais on en a très peu. »

« On ne peut pas vraiment anticiper ce qu’il va se passer »

Face à la possibilité d’une augmentation du nombre de défunts à prendre en charge dans un futur proche, la préfecture recense les capacités de chaque entreprise de pompes funèbres. Mais Michel Mandou craint un dépassement des capacités. Il a déjà défini avec son fournisseur un nombre réduit de modèles de cercueils simples, afin de gagner du temps s’il doit s’occuper d’un trop grand nombre de corps.

Son confrère exprime mois de craintes. « Pour l’instant c’est plus calme, probablement parce qu’on fait plus attention aux personnes âgées. On ne peut pas vraiment anticiper ce qu’il va se passer. »