Cette semaine, rencontre avec Stéphane Pinon, ancien de l’IEP… très ancien puisque ce porfesseur de droit constitutionnel a quitté les bancs de la rue des Puits-Creusés en 1995. Un parcours sinueux, avide de connaissance. Stéphane Pinon à l'Assemblée Nationale

Diplômé de l’IEP de Toulouse à une époque où la formation se faisait encore en trois ans.

C’est après une licence de droit public dans sa région natale du Centre que Stéphane Pinon s’inscrit à l’IEP de Toulouse. Avec Philippe Raimbaud, un ami lui aussi venu de Tours, il se mettent en collocation sur les bords de la Garonne, pour «découvrir une nouvelle région, intéressé par l’histoire de Toulouse et par la région.»

Une fois installé dans la seconde ville étudiante en France, le constitutionaliste en profite pour assouvir sa soif de connaissances en sciences humaines. Droit, sciences politiques, mais aussi histoire et philosophie, «je n’avais pas comme perspective de devenir professeur. Je m’abreuvais de culture générale en me disant que les portes s’ouvriront toutes seules.» A l’époque, l’IEP se terminait avec un mémoire. Sous la direction de Mme Théron, il choisit le sujet de la codification en droit administratif, «très aride comme thème» reconnaît-il aujourd’hui.

Il commence à s’interesser tout particulierement au droit constitutionnel et à la IIIème République en suivant un «cours passionnant de M. Jean Rives sur la IIIème République et surtout sur l’entre-deux guerres et le mouvement de réformes institutionnelles des années 30» qui l’inspirera plus tard dans une thèse.

Mais le déracinement avait assez duré, il retourne au pays pour ce qu’on appelait alors un DEA en droit public, aujourd’hui qualifié du doux nom de Master 2 recherche à l’université Francois Rabelais de Tours. C’est là qu’il comprit «qu’il y avait une voie dans le professorat».

Premier sujet de thèse : Idées constitutionnelles d’André Tardieu sous la direction de M. le professeur Jean Rossetto. Mais une thèse coûte cher, la rédaction dure au minimum quatre ans, il faut trouver le financement. «Pour subvenir à mes besoins, j’ai passé les concours des IRA [Instituts Régionaux Administratifs, NDLR], que j’ai eus. L’IEP est d’ailleurs une très bonne formation pour ces concours, je ne pense pas que je l’aurais eu sans être passé par Sciences Po. Cela m’a permis d’aller un an à Lyon, avec une thèse à faire, un salaire, et l’écriture de quelques articles juridiques.»

S’ensuivent un poste d’encadrement de surveillants d’internat à Amiens, «pas terrible, en prise directe avec les syndicats, et pas interessant intellectuellement», un poste d’attaché temporaire d’enseignement et de recherche,« A.T.E.R., ou à terre si on est pessimiste», qui permet de continuer une thèse en enseignant quelques heures. «J’ai ainsi pu finir de rédiger ma thèse à Tours tout en habitant Lyon car entre temps j’y avais fondé une famille et j’avais eu un coup de foudre pour la région.»

En 2002, il finit par publier sa thèse. «En quatre ans, c’est un record avec tout cela.» Les réformes constitutionnelles des années trente. Aux origines de la Vème République, obtient le prix de l’Assemblée Nationale, ce qui permit au jeune docteur en droit consitutionnel de la publier aux éditions de la L.G.D.J., parmi les éditions les plus prestigieuses chez les juristes.

Aujourd’hui, il enseigne, en tant que maître de conference, la Théorie de l’Etat, comprenez «droit constitutionnel», à l’université de Cergy-Pontoise après un bref passage à l’université de Tours. «Cergy est à 3 heures de Lyon contre 5 pour Tours, plus il y a la bas un très bon centre de recherche dirigé par Carlos Herrera sur la Philosophie juridique et politique.» Le choix était donc rapide, mais le jeune professeur se souvient quand même avec nostalgie du superbe site universitaire près de la Garonne, de l’Arsenal, du climat toulousain, des cours passionnants de MM. Rives et De Quissac et surtout de ses exploits en basketball et en football au CRIT de Rennes. «J’ai d’ailleurs toujours gardé un groupe d’amis de cette époque.»

Cergy, la belle vie, oui, mais ce lyonnais d’adoption n’écarte pas l’idée de changer d’horizons. «Ca me plairait aussi beaucoup d’enseigner dans un IEP, ou pourquoi pas de l’autre côté des Pyrénées.» Celui qu’on appelle, dans les couloirs de l’université des Chênes de Cergy-Pontoise, «le chouchou des étudiant(e)s» quittera-t-il bientôt la faculté valdoisienne ?

L’ouverture du CRFPA aux étudiants de Science Po

Lorsqu’on lui demande ce qu’il pense de l’ouverture du CRFPA, le concours d’avocats, aux iepiens, le professeur, qui a lui-même un pied de chaque côté ne se mouille pas. «A l’époque c’était science pipot, aujourd’hui c’est un IEP qui a extrement progressé, il est fort possible que la formation juridique soit solide, mais elle ne sera jamais aussi solide qu’en droit car en droit, elle est exclusive», nous confie Stéphane Pinon, avant de lâcher «c’est dévoloriser une fois de plus le cursus universitaire