L’Europe est-elle en passe de devenir une vaste zone non-fumeur ? Tour d’horizon des différentes initiatives nationales en matière de lutte contre le tabac.

Le décret antitabac en France

15 ans après son adoption, la loi Evin sera finalement appliquée. A compter du 1er février 2007, la cigarette devra se consumer hors des enceintes des lieux publics, entreprises, administrations, établissements scolaires, universités et magasins. Bars-tabac, restaurants, casinos, hôtels et discothèques bénéficieront toutefois d’un sursis jusqu’au 1er janvier 2008 pour installer des fumoirs clos et hermétiques, dotés d’extracteurs d’air, ou pour appliquer la tolérance zéro.
L’annonce a été faite, dimanche 8 octobre, par le Premier ministre, Dominique de Villepin, lors de l’émission Le Grand Jury RTL-LCI- Le Figaro. Au vu des 60 000 morts par an directement imputables à la cigarette et des 5 000 dues au tabagisme passif, soit « en moyenne treize par jour », la mesure répondait à « un impératif de santé public qui s’impose à tous », a précisé le Premier ministre.
Toute infraction sera punie d’une amende de 75 euros pour le fumeur et de 150 euros par fumeur pour le patron de l’établissement. Le décret prévoit également des aides au sevrage. L’Etat devrait ainsi débloquer 100 millions d’euros par an pour aider les fumeurs qui souhaiteraient arrêter. Toutes ces mesures du gouvernement français s’inscrivent dans un vaste mouvement européen, visant à lutter contre le tabagisme passif.

Les feux de l’amour s’allument à l’extérieur en Irlande et en Italie

Graf.jpg Pas question aujourd’hui de franchir la porte d’un Pub sur l’île verte sans écraser d’abord sa cigarette. Le 24 mars 2004, l’Irlande a été le premier pays européen à imposer l’interdiction de fumer dans tous les lieux de travail (y compris les pubs et restaurants). Les amendes montent jusqu’à 3000 euros. Depuis le 10 janvier 2005, les Italiens eux-aussi boivent leur « expresso » sans fumer. La loi antitabac prévoit de lourdes sanctions pour les contrevenants : jusqu’à 275 euros d’amende pour le fumeur, le double si la cigarette a été allumée en présence d’une femme enceinte ou d’un enfant de moins de 12 ans ; de 220 à 2 200 euros pour les gérants d’établissements.
Hiver comme été, les fumeurs noctambules se retrouvent désormais devant l’entrée des boîtes de nuit pour griller une cigarette. Plus agréable pour les Italiens choyés par le soleil que pour les Irlandais éprouvés par la pluie. Mais le nouveau lieu de rencontre a aussi provoqué l’émergence d’une nouvelle forme de socialisation : le « smirting » (smoking et flirting). Lorsqu’on aperçoit l’objet de son désir quitter la boite pour fumer, c’est l’occasion parfaite pour la drague la plus classique : « Tu as du feu, s’il te plaît ? ». Aujourd’hui, on ne parle donc plus seulement de la cigarette après le sexe mais aussi de la cigarette avant le sexe.

L’Allemagne – le contre-exemple

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La publicité pour le tabac affichée partout, les rues bordées des distributeurs automatiques des cigarettes, les tables des bars couvertes des cendriers. Dans les stades pas question d’éteindre la cigarette. L’Allemagne – le paradis des fumeurs ?
Au vu des dangers du tabagisme passif, l’interdiction de fumer dans les lieux publics est vivement discutée par les autorités politiques allemandes. Mais jusqu’ici, il n’existe pas d’interdiction générale. Depuis octobre 2002, le cabinet fédéral allemand a décrété l’interdiction de fumer dans les entreprises seulement. Cette réglementation ne concerne pas les restaurants, bars et autres lieux de travail qui sont ouverts au public. Les restaurants disposant d’une licence ont simplement le devoir de proposer des zones non-fumeurs. Il n’est pas interdit de fumer dans les transports ou les bâtiments gouvernementaux.
Le débat sur le tabagisme est surchargé d’histoire. L’Allemagne a déjà connu une vaste campagne antitabac. « La femme allemande ne fume pas » était, en effet, un slogan nazi. Déjà en 1938, il était interdit de fumer dans les administrations, les bureaux de postes, les hôpitaux et à l’armée de l’air. C’est pour cette raison que l’acte de fumer demeure associé à l’antifascisme. Il reste que des études réalisées sous le nazisme ont démontré pour la première fois la causalité entre le cancer du poumon et le tabagisme. Ces résultats sont toujours valables et reconnus par nombreux experts. Financeur généreux des études : le non-fumeur Adolf Hitler.

« Snus » : la solution suédoise pour arrêter de fumer

Le cancer du poumon et la crise cardiaque mettent fin à la vie de beaucoup de fumeurs. Les dangers du tabagisme sont connus. En France, six fumeurs sur dix expriment leur désir d’arrêter. Gommes et timbres sont proposés pour substituer à la nicotine. La dépendance est malheureusement souvent trop forte et les tentatives d’arrêter échouent. Le « Snus », pratique inventée en Suède, offre une possibilité de consumer la nicotine d’une manière différente.
Le snus suédois, une poudre de tabac humide de différents arômes, est désormais proposée à la vente. Le tabac est, en effet, placé derrière la lèvre supérieure. Il ne faut ni mâcher ni avaler le snus. Lorsque le gouvernement suédois a imposé une réglementation stricte sur la consommation de cigarettes dans les lieux publics en juin 2005, les ventes de snus ont très fortement augmentées. Le snus n’affecte pas les poumons comme les cigarettes parce qu’il n’est pas inhalé. Les Suédois ont, en effet, le taux le plus bas de cancer du poumon en Europe. Le snus – une alternative inoffensive de consommation du tabac ? Les effets du snus ne sont pas encore suffisamment connus pour le dire. En dehors de la Suède qui bénéficie d’une dérogation, le snus n’est pas vendu en Union Européenne. Une directive de 2001 interdit aux Etats membres la mise sur le marché des tabacs oraux qui ne sont pas destinés à être fumé ou mâché.