Dans « Le monde des étudiants », publié en 1995, Mireille Chalançon estime que 10% des étudiants participent à des organisations propres à l’université, -1,9% dans des organisations qui se revendiquent syndicales. En 2009, le baromètre étudiant IFOP a lui estimé à 1% le nombre d’étudiants syndiqués en France*. Le syndicalisme étudiant traduit une forme d’engagement particulière de défense des droits des étudiants. « Univers-cités » est donc parti à la rencontre de Jessica Ibre, étudiante, membre active du syndicat Sud Etudiant.

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Photos: © Florian Bardou

Depuis deux ans, Jessica, petite brune vêtue d’un manteau noir et d’une écharpe nouée autour du coup, fait partie de l’organisation étudiante Sud-Solidaires sur le campus du Mirail où elle effectue sa troisième année de licence en Histoire de l’art. Originaire de Tarbes, elle est aussi militante au Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA) et bénévole à la Maison de quartier de Bagatelle, non loin de laquelle elle habite.

Du punk à l’engagement politique et syndical

Dans la famille Ibre, la politique ou le militantisme ne sont pourtant pas choses courantes : « Mes parents ne sont pas du tout militants, ce sont des gens qui ont jamais fait de politique de leur vie », nous précise Jessica. Qu’est-ce qui a donc pu pousser la jeune femme à s’engager de manière radicale dans le monde de la chose publique ? Réponse : « J’avais des idées, des idées de gauche, j’avais envie de m’engager dans quelque chose. Il y avait trois syndicats plus ou moins sur la fac, c’est Sud Etudiant qui m’a le plus botté. »

Mais son engagement, elle le doit avant tout à la musique et surtout au punk qui selon elle lui a donné une conscience politique : « J’écoutais du punk et c’est ça qui m’a donné des idées par rapport aux paroles. Au fur et à mesure je me suis mise à lire des bouquins, de Marx à des trucs beaucoup plus récents, beaucoup plus d’actualité, c’est ce qui m’a plu et ça a permis de mettre mes idées en ordre et de m’engager ». Et de développer : « Je sais que Jeunesse Apatride [ndlr : un groupe de punk rock québécois] leurs paroles me parlaient à chaque fois, mais après c’est le punk en général engagé de gauche qui m’a permis de traîner dans ces mouvements, de rencontrer certains militants. »

Au moment de la forte mobilisation contre la réforme des retraites à l’automne 2010, Jessica se sent alors happée par le mouvement de protestation. Elle décide alors de franchir le cap de l’engagement en rentrant au NPA. « Je pense qu’il faut quelque chose de fort, de concret. Moi ça a été au moment où il y a eu des mobilisations, où il y a eu des gens dans la rue et où j’ai eu envie d’être avec eux ; du coup je me suis engagée pour ça, pour ne pas me perdre au milieu de l’amas militant dans les manifestations… Avoir quelque chose avec quoi lutter, un outil, donc un parti ou un syndicat. » Jusqu’à s’engager l’année suivante à Sud pour défendre les droits des étudiants et leur cause.

Féministe en lutte contre toutes les discriminations

Pour cette étudiante en licence, le syndicat est un investissement de tous les jours qui « prend du temps », « parfois difficile à concilier avec le reste » mais nécessaire et dans lequel elle croit « pour faire changer les idées ». Si elle ne s’attribue pas une mission personnelle, mais plutôt collective, elle porte aussi un engagement propre sur certaines questions. « Je suis surtout engagé sur le féminisme dans le syndicat », ajoute-elle. D’ailleurs, cet investissement passe autant par de l’affichage ou de la diffusion de tracts que par l’animation de formations autour de la question féministe.

Mais en parallèle, la jeune femme « super-engagée » fait partie de la maison de quartier de Bagatelle et de la Coordination locale d’action citoyenne pour les quartiers (CLACQ). « En plus du féminisme, je m’intéresse à tout ce qui est antiracisme, aux quartiers populaires. J’avais aussi envie de m’engager là-dedans dans une maison de quartier, celle de Bagatelle qui a un passé militant très fort. » Un activisme militant intense qu’elle souhaiterait plus répandu parmi la communauté étudiante qui « manque de temps pour s’investir » concède-t-elle.

*Sources : rapport pour l’observatoire de la vie étudiante Les engagements des étudiants, juin 2009.