C’est une querelle qui n’en finit plus. L’interdiction du service UberPop, ne semble pas avoir calmé les taxis. Mardi 26 janvier, partout en France ils comptent le faire savoir. A Toulouse, les chauffeurs ont prévu de se retrouver dès 5 heures du matin afin de commencer leur journée de mobilisation.

Le point sur la législation en vigueur

Depuis le 1er janvier 2016, le service UberPop est interdit. L’application mobile permettait de mettre en relation des chauffeurs non professionnels avec des clients se trouvant à proximité. Or, il est permis aux particuliers de se faire rémunérer pour effectuer un trajet mais seulement lorsqu’il s’agit de rentrer dans les frais du voyage (ce que proposent des services comme Blablacar). Pour le reste, la loi Thévenoud interdit la rétribution pour une course d’où l’interdiction d’UberPop dont le but des chauffeurs était une véritable rémunération.

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La Loi Thevenoud : frein à la liberté d’entreprendre ?

C’est en tous cas ce que met en avant la société Uber, figure de proue des VTC. La société avait invoqué l’inconstitutionnalité de l’interdiction d’UberPop au moyen d’une question prioritaire de constitutionalité (QPC). Le principal argument du dirigeant de la société de VTC, Travis Kalanick, était la liberté d’entreprendre, qui, selon lui, était mise à mal par l’interdiction du service UberPop.

Finalement, le Conseil Constitutionnel avait rendu publique sa décision, confirmant que l’interdiction d’UberPop était bien légale. Pour Didier Gouzot, président du syndicat des artisans taxis de Toulouse et de Haute – Garonne (le SAT 31) : « Les chauffeurs UberPop jouaient la montre pour poursuivre leur activité impunément ». Les « sages » ont estimé qu’«eu égard à l’objectif d’ordre public poursuivi, l’atteinte portée à la liberté d’entreprendre des VTC n’est pas manifestement disproportionnée».

En revanche, le Conseil Constitutionnel a donné raison à Uber sur la tarification, estimant qu’ici, la liberté d’entreprendre était en jeu pour l’entreprise américaine. La tarification horokilométrique n’est donc plus l’apanage des taxis. Malgré ces nombreux épisodes juridiques, les taxis ne semblent pas satisfaits de la situation actuelle.

Les taxis demandent plus de contrôle

Les taxis manifestent ce mardi 26 janvier 2016 pour l’application des nombreuses règles qui selon eux, ne sont pas respectées.

Premier élément de dispute : la maraude. En France, la maraude, c’est à dire le fait de prendre des clients sur la voie publique en dehors des stations réservées, est le monopole des taxis. Les VTC ne sont aucunement autorisés à le faire et l’interdiction s’applique également à ce qu’on appelle la maraude électronique. Les applications mobiles ne peuvent fournir simultanément aux clients la localisation et la disponibilité des véhicules de VTC. Or dans les faits, ce monopole n’existe plus et les taxis le regrettent. Le syndicat des artisans taxis de Toulouse demande donc la suppression des applications qui seraient contraires à la loi.

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Autre point de débat : l’obligation de retour à la base entre deux courses pour les VTC. Un chauffeur qui dépose un client ne peut donc stationner sur la voie publique pour en récupérer un deuxième. S’il n’a pas de réservation, le chauffeur est dans l’obligation de retourner à sa base.
C’est quand même fou d’être obligé de manifester pour faire appliquer la loi
, s’agace Didier Gouzot. Aujourd’hui, il regrette que l’activité UberPop se poursuive de façon déguisée. En effet, certains chauffeurs qui travaillaient chez UberPop offrent toujours le même service en utilisant des voitures Uber ou bien des véhicules banalisés. «Je suis conscient que nous sommes dans une période compliquée suite aux attentats, mais la police doit faire en sorte de faire appliquer la loi aux VTC», s’exclame le président du syndicat.

L’opinion publique prise en otage.

Suite à l’annonce de la mobilisation générale des taxis, Uber et Heetch ont lancé des campagnes de communication pour défendre leur place.

Chacun son hashtag ! Pour Uber, allié avec d’autres sociétés de VTC c’est #NonALaFinDesApplis, les entreprises appellent leurs utilisateurs à signer une lettre au président de la République pour protéger les applications mobiles.

Pour Heetch, l’autre « ennemi » des taxis, #TouchePasAMonHeetch est le hashtag de résistance. La société de car-sharing (partage de voiture), est menacée par les taxis qui demandent son interdiction. Ses patrons appellent à la mobilisation samedi 30 janvier à 18h et ont crée un événement sur Facebook : «Faites la fête pas la grève» qui appelle à sauver Heetch.

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Remise en question en demie teinte chez les taxis

A Toulouse, Didier Gouzot affirme que « les taxis ont perdu 32% de leur clientèle depuis l’arrivé de tous ces nouveaux services. Toutefois, Alexandre Pariente, ancien employé chez Heetch, en charge des dossiers d’inscription des nouveaux conducteurs contredit ces propos. «Une étude a été financée pour comprendre qui étaient les utilisateurs de Heetch. Il s’avère que ce sont en grande majorité des personnes qui ne prennent pas le taxi».

Autre problème soulevé par Alexandre Pariente : «Plus de la moitié des trajets ont pour point de départ ou d’arrivée la banlieue, zone dans lesquelles il est impossible de trouver un taxi sans le commander, et dans lesquelles ils refusent souvent de se rendre». Des revendications que le syndicat des taxis toulousains semble entendre : «Nous sommes conscients que nous l’avons peut-être cherché cette concurrence», concède Didier Gouzot. Le directeur du syndicat souhaite donc améliorer le service des taxis. Réaliste, quant au prix élevé d’une course en taxi, il prépare une offre adaptée aux jeunes, facilitant les déplacements de nuit et cela à des tarifs préférentiels. Un projet qui se fait attendre dans une ville comme Toulouse où vivent plus de 105 000 étudiants.

Cependant, pas question pour les taxis de s’accorder avec les VTC et autres services de transports. Impensable donc d’accepter la proposition de Travis Kalanick, d’accueillir les taxis sur la plateforme Uber. «Si chacun reste chez soi tout ira bien», déclare Didier Gouzot à ce sujet. Le ton est donné !