Les coupes franches dans les budgets des théâtres leur posent de lourdes difficultés. Au Théâtre national de Toulouse, l’heure est déjà aux premiers dégâts.

tnt-2.jpg
« Les théâtres sont en danger. C’est grave », s’exclame Marie Attard, une ancienne du TNT. Crédits : Wikimedia Commons

Qu’ils soient associatifs ou publics, les théâtres mènent dans la ville rose une bataille ininterrompue pour se procurer des financements suffisamment élevés, gages d’une programmation de qualité. Excepté les théâtres privés, ils sont le plus souvent sous perfusion de subventions publiques, attribuées par les collectivités et par l’Etat, par l’entremise de la Direction régionale des affaires culturelles (Drac). Le Théâtre National de Toulouse (TNT) tire ainsi 80% de ses dépenses de fonctionnement des fonds publics. En 2015, le Théâtre Garonne a touché 720 000 euros d’aides de la mairie. La même année, la Cave Poésie a empoché 90 000 euros.

>> LIRE AUSSI : Financement des théâtres : l’amateurisme de la mairie pointé du doigt

Mais l’intraveineuse financière cafouille, depuis que la nouvelle municipalité de droite, sous la houlette de Jean-Luc Moudenc, a décidé dans le cadre de son plan d’économies de baisser de 25%, sur 5 ans, les subventions allouées à la culture. Potentiellement, ces coupes pourraient annoncer des lendemains des plus tragiques pour plusieurs de ces édifices.

Coup de rabot

Première salve en janvier 2015, lors de la première livraison de subventions de la nouvelle mairie, lorsque le volume des aides a diminué de 10%. Ce coup de rabot n’est que le premier, le budget devant se comprimer autant, chaque année, jusqu’à la fin du mandat. « Cette baisse, à terme, c’est 250 000 euros en moins pour le fonctionnement du TNT », déplore Marie Attard, ancienne chargée de communication du TNT.

Le TNT, qui est un Centre Dramatique National (CDN), a tenté de limiter la casse en amont, en entrant dans des tractations avec la municipalité. Peine perdue. « Dès 2014, on a entendu des bruits qui couraient, disant qu’il y aurait cette baisse. La direction a donc eu une réunion avec la mairie pour expliquer que, avec ces 10% en moins, il faudrait employer moins d’intermittents, faire des spectacles avec moins de personnes… Pour seule réponse, la mairie a dit que c’était notre problème, que c’était à nous de le gérer », s’exaspère encore la communicante.

Comme de nombreux autres responsables, M. Attard décrie les « choix politiques » de la maison Moudenc. Dans ses restrictions budgétaires, le Capitole a fortement taillé dans les subventions alloués à la culture, mais peu aux sports : le TFC et le Stade toulousain n’ont pas vu baisser leur subvention d’un iota en 2015. Autre exemple, l’école des Beaux-Arts a vu sa subvention faiblir de 5%. Les coupes ne sont pas uniformément réparties.

« Faire des concessions »

Concrètement, au TNT, les répercussions en interne ont été immédiates. « Après la baisse, l’ambiance est devenue tendue. Quand on nous apprend que l’on perd 10%, qu’il va falloir des concessions, ça oriente les choix de programmation et les directeurs sont obligés de faire des sacrifices : des postes qui ne sont pas pérennisés, des postes qui sautent… Et beaucoup d’incertitudes », confie encore Marie Attard.

Pour une grosse structure comme le TNT, les pertes sont plombantes. Mais pour les petits théâtres, les anciens niveaux de subventions sont une question de survie. « Les théâtres associatifs comme le Théâtre du Pont Neuf, étaient à deux doigts de fermer à cause de leur budget revu à la baisse. D’autres sont en danger. C’est grave », s’inquiète Marie Attard. Avec au fond, la peur de voir se généraliser, à cause des coupes budgétaires, des programmations au rabais qui ne satisfassent plus la clientèle… Et qui signent l’arrêt de mort des théâtres alternatifs.

Paul Conge